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Convalescence Qu’est-ce que tu as fait Violet…
Dans quoi sa chère amie s’était-elle embarquée? Depuis combien de temps cela durait? Ce journaliste, Rose l’avait vu parler à Violet, au Gala, il y a des mois de cela. Était-il son amant depuis tout ce temps? Les parents de monsieur Hadid avaient dit aux policiers que leur fils avait une petite amie, mais qu’ils ne la connaissaient pas encore. S’il s’agissait bel et bien de Violet, c’était compréhensible. Elle avait un visage connu : l’article sur le gala, son passage à la radio, puis à la télé en compagnie d’Edward lors de la campagne. C’était d’ailleurs ce qui avait poussé Rose à retenir son amie, prête à se rendre à l’hôpital pour revoir ce journaliste dès qu’elle avait su la nouvelle peu après minuit. Il y avait trop de monde. Les parents de M. Hadid avaient veillés sur leur fils à sa sortie du bloc opératoire, ainsi que ses collègues infirmières, les médecins… Ce n’était qu’à la fin de son quart de travail, vers 3h du matin, que l’état du journaliste s’était stabilisé.
Cut fut également à cette heure-là que Rose lui donna rendez-vous, à l’une des portes arrières du département des soins intensifs. Violet n’était pas sur la liste des visiteurs, mais sur la liste des bénévoles, si. Les visites aux patientes avaient beau être interdites pendant la nuit, ce ne serait pas la première fois, ou la dernière, que Rose faisait une petite entorse au règlement. Certains patients des soins intensifs n’en ressortaient jamais. C’était cruel de priver quelqu’un qui les aimait de les revoir une dernière fois, en espérant que, pour Violet, ce ne serait pas le cas.
En apercevant Violet, et sa mine fatiguée, Rose la serra dans ses bras « Salut… » lui dit-elle, un sourire désolé sur les lèvres. « Pardon de t’avoir fait attendre, mais ça n’aurait pas été une bonne idée. Je ne sais pas si c’est une bien meilleure idée que tu le vois maintenant, mais je comprends. Viens ». Rose ouvrit la porte de service pour entrer dans le couloir qui menait aux chambres. Çà et là, on entendait le claquement des portes, le bruit de pas des infirmières au loin, et le ronronnement constant des machines qui maintenaient tous les patients en vie. Incluant M. Hadid.
« Je te préviens que ce ne sera pas agréable à voir. Il est très mal en point ». Ceux qui lui avait fait ça cherchaient à le tuer, sans aucun doute, et ils n’étaient pas passé très loin. M. Hadid était arrivé juste à temps avant qu’il ne soit trop tard. Elle avait entendu le médecin parler… l’os de la tempe avait été réduit en morceaux, et il n’avait pas été le seul. « C’est là », lui dit-elle en désignant la chambre 202.
La première chose qui se remarquait chez M. Hadid était son visage, bouffi, couvert de plaies et d’ecchymoses qui coloraient ses joues, son nez brisé et le tour de ses yeux clos d’une couleur bleuâtre, mêlée de rouge et de noir. Les points de suture près de la tempe, sur l’os de la joue et la mâchoire étaient encore bien apparentes et à vif. On avait bandé ses côtes et plâtrer sa main gauche. La pire blessure qu’il avait eu était pourtant invisible : hémorragie cérébrale, dont les conséquences étaient encore inconnues. Les chirurgiens avaient tout fait correctement. Ils ne sauraient qu’au réveil de M. Hadid s’il garderait des séquelles de cet incident. Pour le moment, un tube passant par sa bouche et relié à une machine lui permettait de continuer à respirer pendant le coma. Des fils sortaient de toute part de ses bras et de son cou, tous reliés à diverses machines veillant à maintenir ses fonctions vitales, et à les surveiller, comme les lents bip de l’électrocardiogramme, synchronisé au rythme de son cœur.
J’entrais tout de suite dans le couloir, me réfugiant tout de suite dans les bras de Rose. -“Je sais. Je sais, merci d’avoir organisé ça. ” Je ne pouvais rien reproché à cette femme. Elle m’avait prévenue et maintenant elle me permettais de le voir, alors que c’était contre les règles. Alors qu’elle avait besoin de ce travail. Non, vraiment, je ne pouvais rien dire. J’aurais été prête à attendre jusqu’à l’aube. Ne serait-ce que pour le voir deux minutes. -“ Si. Je dois le voir. Rose. ” Lui affirmais-je pressante. J’avais brusquement peur qu’elle renonce à l’idée et que je ne puisse le voir. Je ne pouvais pas supporter cette idée. Je lui prenais le pas très vite. J’avais beau être épuisée de nervosité, mes nerfs, justement, me faisaient tenir. Avec les dernières années j’étais souvent sur ce système. Ceci dit, sans les aides médicamenteuses c’était plus dur.
-“ Mais, il va vivre. C’est ce que tu m’as dit.” Lui rappelais-je au bord des larmes. Je n’avais plus aucune maîtrise de mes larmes depuis son premier coup de fil. C’était le cas depuis quelques jours de toute façon. Mon sevrage et la grossesse faisaient une combinaison détonante. -“... D’accord. ” Je m’arrêtais. J’observais les chiffres sur la porte. J’avais un peu peur de l’ouvrir maintenant. -“Merci Rose. ” Je posais ma main sur la poignée… Je prenais à peine le temps de dénouer mon foulard. Je voulais le voir, le toucher, l’embrasser.
J’avançais pas à pas vers le lit. La mécanique des machines en fond. Ces petits sons continus étaient obsédants pour mon esprit fatigué. J’aimais le silence. Ou bien les mélodies harmonieuses. Mais cela c’était le diable. D’abord je ne comprenais pas exactement ce que je voyais. Il était encore trop loin. Mais peu à peu. Mon estomac se retourna. Ma gorge se serra. Mon coeur trembla de peur. Je fis les derniers pas en courant presque. Je lâchais sans m’en soucier le sac avec ses affaires. Il tombait quelque part. Je n’avais d’yeux que pour mon adoré. Mon adoré décomposé. -“ Oh non… mais... ” Qui était assez cruel pour s’en prendre à un de ses semblables de cette façon ? Je comprenais maintenant pourquoi Rose avait l’air si inquiète. En découvrant toutes ces blessures… cet affreux tuyaux dans sa bouche, je comprenais qu’il pouvait mourir. Non. Je… Mon être refusait d’un bloc cette possibilité. Ce ne pouvait être ainsi. Seigneur ! Mes sens perdirent tous leurs repères. Cela m’arrivait parfois. Lorsque j’étais dépassée. Plus depuis que j’étais à fleur de peau. Je sentais que j’étais en train de tourner de l'œil. J’eus à peine le temps de chercher une chaise du regard que… -“ Ro ... ” Le noir devenait mon monde.
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Convalescence « De rien », souffla-t-elle avant de laisser entrer son amie. Jamais Rose n’avait vu Violet saisi d’une telle inquiétude pour quelqu’un, ni d’un tel désarroi. L’avait-elle déjà vu au bord des larmes? Rose se mordit la joue. Ce qui se passait entre son amie et ce journaliste n’était pas une simple amourette, ni une relation purement charnelle. Rose n’aurait pas imaginé Violet tenter ni l’un ni l’autre… Bien que sa relation avec Edward n’ait pas été le conte de fée que Rose avait espéré pour son amie, était-elle mauvaise au point que Violet s’aventure sur le même chemin qu’elle avait emprunté il y a des années? Si c’était le cas, Violet risquait beaucoup plus qu’elle, et perdrait beaucoup plus. La puissance des Hanovres avait beau être diminuée aujourd’hui, leur nom imposait toujours autant en respect, même jusqu’ici, à l’hôpital. Même mariée à Edward, Violet était plus Hanovre que Crawley.
Un bruit dans la chambre fit sursauter Rose, qui se retourna pour regarder Violet. Son sac venait de glisser de ses mains. Elle regardait le journaliste, les yeux remplis par la détresse. «… Violet? » Rose attendit de s’approcher près de son amie, hésitant à rompre l’intimité de la chambre, mais en la voyant perdre pied, elle se précipita derrière elle « Violet! »
Rose rattrapa Violet dans sa chute. Inutile qu’elle ne se cogne la tête elle aussi ce soir! Transportant doucement son amie sur la chaise près du lit, l’infirmière pesta contre elle-même. Violet n’était pas du tout en état de voir son cher journaliste. En posant une main contre son front, Rose constata que son amie ne semblait pas fiévreuse, mais elle avait l’air blême, et son pouls était bas. Elle glissa un petit repose-pied sous les talons de Violet pour surélever ses jambes, et revint la voir avec un verre d’eau. « Bois ça, d’accord? » murmura-t-elle, en examinant plus soigneusement son amie. « … Tu as l’air épuisée Violet. Même si tu es inquiète pour lui, il faut que tu dormes, tu sais? Sinon je vais te chercher un thé, ou un café si tu veux, mais… Tu n’es pas malade j’espère? » Rose avait toujours connu Violet parfaitement en contrôle de ses émotions. La voir comme ça… ça avait quelque chose d’impressionnant.
J’étais désorientée. Je sentais le bras de Rose sous mon aine. Je sentais qu’elle me déplaçait. Je voulais lui parler et m’excuser. Mais c’était difficile de me concentrer. Doucement, je calais mon dos contre le dossier de la chaise. Je m’aidais du repose pied. -“ Merci...” Je fermais mes doigts autour du verre d’eau. Je le portais doucement à mes lèvres. Je buvais doucement. Je me sentais mal à l’aise d’avoir eu ce moment de faiblesse devant ta sœur. Je sentais bien que je l’inquiétais.
Mon regard retournait vers Prem. Mais sa vue me déchirait trop le cœur. Je ne pouvais pas m’y attarder. J’écoutais notre gentille Rose. La situation était tout autre, je pense que je lui aurais menti. J’aurais feint. -“ Pas de café non...” Je voulais amener des bonnes choses dans mon organisme. Je prenais mon alimentation au sérieux. La caféine devait se prendre de façon raisonnable. J’en avais beaucoup trop bu aujourd’hui. Je voulais pas non plus prendre de risque concernant notre petit ange. -“Rose...” C’est parce qu’elle était une soignante que je brisais mon secret. Nous étions trois à le savoir sur cette terre. Elle serait la quatrième. -“Je suis enceinte.” Je la regardais droit dans les yeux. J’espérais qu’elle allait comprendre la situation sans que j’ai a trop en dire. -“Il n’est pas d’Edward.” Je n’allais pas lui dire de qui il était. Mais je faisais confiance à son intelligence. -“J’ai dû arrêter mes anxiolytiques.” Je lui donnais les informations médicales. Qu’elle puisse me dire si ce vertige devait être pris au sérieux ou pas. De mon point de vue c’était surtout l’émotion. -“ Je pense que c’est seulement une hausse du stress. ” La tête me tournait un peu. Je ne me sentais pas bien. Mes sens étaient un peu trop exacerbés. Les odeurs de l'hôpital me bousculaient.
-“Oh.” J’attrapais le bras de la chaise pour me redresser. Je reconnaissais les signes avant coureur. Je devais faire vite. Je repoussais doucement le repose-pieds pour aller vers la porte qui portait le sigle des toilettes. -“Excuse-moi...” Soufflais-je avec le cœur au bord des lèvres. J’allais le plus vite possible. J’ouvris la porte des WC à la volée. A peine me pensais-je que je vomissais une bile aussi claire qu’acide. Mon estomac était vide. Il n’avait rien à rendre le pauvre. Je finissais par glisser et m'asseoir sur le sol. L’image de Prem dans ce lit, défiguré, comateux, était si dure. Les larmes se mirent à couler sans que je puisse rien y faire. Ce n’était pas des larmes pudiques. Je n’étais pas en été de l’être. J’étais angoissée, épuisée, et dévastée. Il fallait que la peur sorte de moi.
Tant pis pour la bienséance. La nuit serait la gardienne de mon énorme faiblesse. Je remontais mes genoux contre ma poitrine. Je pleurais toutes les larmes de mon corps. J’avais beau chercher de l’air je ne pouvais pas me calmer. Mes nerfs étaient trop à vif. J’avais trop peur. Peur pour lui. Peur pour nous. Peur pour le bébé. Peur pour moi. Pourquoi fallait-il que tout cela nous arrive ? Mais pourquoi Seigneur ? Qu'allais-je faire... si... Non, je ne peux l'écrire.
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Convalescence Les assaillants du journaliste n’avaient pas ménagé leurs coups pour le défigurer. Son apparence était difficilement supportable pour ses proches, même maintenant, alors que les soignants avaient nettoyé son visage, sa bouche et ses cheveux ensanglantés. La chemise qu’il portait avait dû être jetée, tant elle était poisseuse de sang. Il faudrait plusieurs semaines, peut-être plusieurs mois pour que toutes ses plaies se résorbent, et que monsieur Hadid puisse être complètement guéri. Mais il était trop tôt pour parler de guérison.
Rose examina le visage exténué de son amie. « Qu’y a-t-il Violet? » . L’infirmière se demanda si elle devait être inquiète pour elle. Violet ne lui confiait pas tout, mais elle avait fait beaucoup de choses pour elle et pour Archie, qui adorait ses cours d’équitation. Jamais elle n’aurait eu les sous pour donner à Archie ce genre de cours. Le gala de bienfaisance avait aussi apporté une grande aide à l’hôpital. Il y avait eu des dons très généreux par la suite, après l’interview qu’avait mené le pauvre journaliste. Rose sentait qu’elle avait une dette envers ces deux-là… ce couple bizarrement assorti que formaient Violet et monsieur Hadid.
Posant une main sur sa bouche pour retenir une exclamation de surprise, Rose écarquilla les yeux. « Oh, Violet! C’est… » Les mots ne lui vinrent pas. C’était merveilleux et mortifiant à la fois. Rose jeta un oeil au journaliste en comprenant qu’il était le père, et son sang se glaça dans ses veines. Seigneur… Quel horrible cauchemar son amie devait vivre, en regardant le père de son enfant si mal en point, en ne sachant pas s’il vivrait ou mourerait, si elle devrait avoir cet enfant seule. Un cauchemar que Rose pouvait très bien s’imaginer.
Le malaise de Violet était alors d’autant plus inquiétant, mais peu étonnant. Malheureusement, les anxiolytiques étaient hors de question, et elle avait bien fait d’arrêter de les prendre. Mais il faudrait trouver une solution. Rose vu alors bondir Violet hors de sa chaise pour filer droit vers les toilettes de la chambre, et vomir le peu qu’elle venait d’avaler. L’infirmière, compatissante, se précipita auprès d’elle. Le premier trimestre est bien souvent le plus difficile, mais avec tout ce que vivait Violet, il l’était d’autant plus. Rose s’accroupit près d’elle. La voir pleurer lui donna envie de la serrer dans ses bras, lui donna envie de pleurer avec elle. Mais quelle pleurnicheuse elle faisait! Rose renifla, les yeux humides, et elle posa une main sur l’un de ses genoux de son amie angoissée. « Violet, je sais que c’est dur, mais il faut que tu respires. Inspire… et expire ».
Rose inspira et expira avec elle, par la bouche puis par le nez. Elle devait prendre tout l’oxygène qu’elle pouvait, et calmer sa respiration. Rose lui tendit un mouchoir. « Quand tu te sentiras à nouveau une crise venir, essaie de te concentrer sur ta respiration. Tu ferais peut-être mieux d'éviter le café ou le thé trop fort, pour quelques temps. Éviter Edward aussi... ». Violet savait sans doute que le stress était mauvais pour elle, mais aussi pour le bébé. Rose n’allait pas le lui réitérer. De toute manière, elle savait que Violet ne pourrait pas s’en empêcher. Il fallait seulement qu’elle sache comment réagir, lorsque ça arriverait. « Je ne veux pas que tu reviennes le voir l’estomac vide, d’accord? Ni sans que tu sois reposé », dit-elle doucement, mais fermement.
Cela pourrait sans doute paraître dur, mais Rose insistait pour que son amie prenne soin d’elle. « Le sort de ton cher journaliste n’est pas entre tes mains, même si tu passerais l’éternité à son chevet, mais celui de votre enfant l’est, Violet ». Monsieur Hadid pouvait compter sur les médecins, qui faisaient tout en leur pouvoir pour l’aider à se rétablir, et il pouvait compter sur elle et les autres infirmières pour le soigner. L’enfant que portait Violet ne pouvait compter que sur sa mère. « Est-ce que tu as d’autres symptômes ou maux importants? Des nausées ou des maux de ventre persistants, ce genre de choses? À combien de semaines es-tu? »
Cela devait être encore tout récent. Cela voulait également dire que le bébé était encore très fragile. Aussi vulnérable, il avait doublement besoin que sa mère soit en pleine santé et en pleine forme. Elle même étant même, Rose voulait que Violet connaisse le bonheur d’avoir son bébé dans ses bras. Rose enviait parfois ses collègues en maternité, qui avaient la chance de voir ce bonheur tous les jours, mais elle se savait trop fragile pour supporter la douleur que certains malheureux parents traversaient, lorsqu’on devait leur annoncer le pire.
-“... Oui.” Répondis-je au raisonnement intérieurement de Rose. Le fait que je sois enceinte n’était pas si étonnant que cela. A mon âge j’étais même en retard pour assurer la lignée. Non, le souci venait du fait que cet enfant n’était pas l’héritier légitime des deux lignées associées par mon mariage. Je n’avais pas besoin d’expliquer à mon amie toute l’horreur que me faisait cette situation. Je m’inquiétais de l’avenir d’un enfant bâtard et métisse, jusqu’à présent. Maintenant, je m’angoissais de savoir si cet enfant allait avoir un père. Était-ce un message divin ?
Je levais lentement la tête, croisant les yeux humides de Rose. Je l’entendais bien. Je comprenais pourquoi elle me demandait de respirer. Je n’avais pas fait de grosse crise d’angoisse depuis quelque temps. -“Je...” Je m'agrippe alors à sa main. Je fis mon maximum pour reprendre le contrôle. Le souffle, la respiration, par le ventre. J’avais l’impression d’entendre la voix d’Iris qui me soufflait ces conseils. Nous étions rôdées. Mais cela faisait longtemps que ma sœur ne pouvait plus me secourir dans ces moments-là.
Je portais le mouchoir sous mes yeux. -“... On était en train de s’organiser pour que je… m’éloigne du domaine.” Je ne lui donnerai pas les détails. J’avais confiance en Rose. Ceci dit Edward était retord. Je voulais pas qu’elle se retrouve dans une situation compliquée à cause de nous. Moins elle en savait et mieux c’était. Je posais une main sur mon bas-ventre pour m’excuser auprès de l’ange. “Il faut que je mange, oui. Je sais. … Rien ne passe quand je suis nerveuse, Rose.” Cependant, nous étions d’accord. Je devais me nourrir. Je devais faire attention à mon corps, pour le bébé.
Naturellement, je me sentais glisser dans le rôle de l'élève, l’apprenante. J’acceptais sans broncher les remontrances. Je savais que c’était parce que j’étais à bout de nerfs. J’avais besoin d’appuis. J’avais besoin que quelqu’un me cadre. Cela avait toujours été ainsi dans ma vie. J’en ressentais les effets dès que j’étais surpassée par des événements. Autrement dit tout le temps ces derniers temps. -“ Oui, j’ai des nausées. Le matin et le soir aussi. ” C’était très désagréable. Je rebutais à manger le matin à cause de ça d’ailleurs. “Heu.” Combien en étais-je c’était une question simple pourtant. “ Sept semaines ? Il est pour début décembre. Normalement. ” Ce n’était pas une science exacte. Depuis que j’étais enfant mère nous disait que nous les femmes de cette famille avions les hanches étroites. Les enfants arrivaient toujours avant l’heure. Cela avait été mon cas. “ Je tiens un carnet de grossesse. ” Je l’avais pas pris avec moi. Mais je n’avais pas encore de médecin de suivi. Il était hors de question que j’aille voir le Dr Zimmerman. Il me dénoncerait devant mes yeux. Comme je ne pouvais pas faire confiance à grand monde c’était compliqué. Tout était compliqué.
-“Oh Rose…” Je me penchais pour aller enlacer son cou. Cette journée avait été horrible, et cette nuit l’était encore plus. Je ne pouvais pas serrer Prem dans mes bras sans lui faire mal. J’avais besoin de sentir une présence humaine. Je posais mon front contre son cou sans penser une seconde à l'inconvenance de ce geste. L’intimité que nous partagions avec Prem me rendait moins sauvage dans le contact. “Je ne sais pas ce que je ferai s’il meurt. ” Lui avouais-je tout bas. Prem avait révolutionné mon monde. Jamais je pourrais retourner à ma vie de Duchesse comme si de rien n’était. Jamais. Il disait que j’étais une grande romantique. J’étais d’accord avec lui. Je préférais ne pas imaginer une vie sans lui. Une vie qui n’aurait pas de substance. “Il m’a ouvert les yeux. Comme ton Angus. Je ne pourrais pas y arriver sans lui.” Doucement je l’enlaçais pour la serrer plus fort.
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Convalescence Rose hocha la tête « Bien ». Plus elle serait loin du domaine, mieux ce serait. Violet ne voulait pas d’Edward dans les parages, car finirait par deviner que quelque chose se tramait dans son dos, et Rose craignait ce qui se passerait pour son amie à ce moment-là. Pour l’avoir croisé quelques fois au domaine, en allant récupérer Archie après ses cours, elle savait à quel point il pouvait être glacial. « Tu manqueras beaucoup à Archie, mais je lui expliquerais » lui dit-elle en souriant. « Il adore ses cours d’équitation ». Peut-être que Tyrgan pourrait se montrer utile et lui donner aussi quelques leçons. Violet avait beaucoup d’autres choses à penser en ce moment.
Pleine de sollicitude, l’infirmière regarda la future-maman, et lui adressa un sourire contrit. Les symptômes dont elle faisait l’expérience étaient certainement désagréables, mais pas anormaux. « D’accord. Ça devrait diminuer en progressant. En attendant, essaie de manger souvent, en petite portion. L’important c’est que tu n’ai pas l’estomac vide ». Pour le reste, Rose était certaine que Violet suivait déjà une régime alimentaire exemplaire. Mis à part son anxiété, elle ne croyait pas que Violet ait de problèmes de santé majeurs. Elle avait toutes les chances d’avoir un bébé en pleine santé, même si rien n’est jamais garanti. « Ne tarde pas trop non plus à prendre rendez-vous avec un médecin. Je sais que ça doit être compliqué en ce moment, mais c’est important. C’est lui qui te dira à combien de semaines tu es exactement, et la date de naissance. Il te dira aussi si tu en as un, ou plus qu’un! » dit-il, avec un demi-sourire.
C’était certainement un début de grossesse très compliqué pour sa chère amie. Compliqué, mais aussi très triste. Rose serra Violet dans ses bras. La voix remplie de chagrin de Violet lui monta les larmes aux yeux et lui serra la gorge. Elle repensait au père d’Archie, qui n’avait jamais pu connaître son fils. Il lui manquait souvent. Elle non plus, avait cru ne pas pouvoir y arriver sans lui. Angus lui manquait aussi, mais pas autant que leur petite fille qu’ils avaient perdu. Repenser à sa petite puce lui déchirait le coeur. Un jour, elle raconterait tout ça à Violet, mais pas ce soir. « Tu feras de ton mieux Violet, comme je l’ai fais », dit-elle, encourageante. « Ce ne sera pas facile tous les jours, mais je te promets qu’il y a de la lumière au bout du tunnel. C’est de tenir Archie dans mes bras qui m’a aidé à m’en sortir. J’espère que ce sera pareil pour toi. Si tu as besoin de quoi que ce soit, je serais toujours là ». Rose lui frotta doucement le dos, puis, s’écarta d’elle pour essuyer les larmes qui coulaient sur ses propres joues. « Mais sache qu’on fait tout pour le sauver d’accord? Si tout se passe bien, il sera sur pied d’ici un mois ».
Après tout, monsieur Hadid est en bonne santé. Le plus inquiétant était l'hémorragie cérébrale et les coups à la tête qu’il avait encaissés. Les conséquences de ces blessures-là sont toujours difficiles à prévoir, même pour quelqu’un qui est en pleine forme physique. « Tu peux te relever? Je peux aller te chercher une soupe, si tu le veux. On en a toujours en réserve ». Rose se redressa et épousseta ses pantalons avant de tendre la main à Violet pour l’aider à se remettre sur ses pieds, et revenir à la chambre, où le pauvre journaliste était toujours allongé, profondément endormi. « Tu peux lui prendre la main si tu veux » dit-elle en chuchotant. Parmi ses nombreuses blessures, la main droite du journaliste était toujours intacte. « Hum… Dis-moi si ça ne me regarde pas, mais ça fait longtemps que tu le connais? Enfin… que vous vous fréquentez? Vous vous voyiez en secret? »
Oui, bon… Elle était curieuse. Violet était plus discrète qu’elle. Seulement trois mois après avoir rencontré Angus, Rose s’enfuyait avec lui, délaissant titres et héritage familial à son plus grand bonheur. Tout cela n’avait jamais compté pour elle, d'adhérent jamais au narratif sur l’honneur de la famille, la préservation de la dynastie. Avec Violet, elle supposait que cela devait être différent. Elle était l’aînée après tout, et avait toujours été une très bonne élève, très attentive aux jugements et attentes de ses parents. Monsieur Hadid lui avait ouvert les yeux, mais Rose se doutait bien que le coeur de son amie devait être déchirait entre sa famille et son amant.
-“ Excuse-moi, de vous laisser. J’aime lui donner des cours. Si c’était possible je resterai. ” Lui assurais-je le cœur gros de mettre fin à ce moment complice avec Arthur. J’avais découvert avec lui la force et la beauté des enfants. Il était honnête. “Je me rattraperai. ” Lui promettais-je.
-“ Plus d’un ?! ” Cela ne m’était jamais venue. Je me sens confuse. Je ne savais pas trop si cette possibilité me donnait envie de rire ou bien de pleurer. Je redoutais déjà de devoir élever un enfant. Mais deux! Deux mon dieu… -“Nous voulons y aller ensemble. ” Expliquais-je à voix basse. Je n’avais pas besoin de dire le nom de Prem. Rose avait compris. Mon regard glissait en direction du lit. Je ne me faisais pas du tout face à ce visage défiguré. Je sentais de nouveau mon coeur se soulever. Les larmes remontent. -“Enfin… si... ” Terminer la phrase m’était impossible. Je ne pouvais pas prophétiser le pire à haute voix. J’étais, cette nuit, superstitieuse et peureuse. L’angoisse me rendait déraisonnable.
Je ne pouvais pas dire à ma Rose, que cet enfant était une surprise que je n’avais pas prévu. Une surprise que je n’étais pas certaine de vouloir sans Prem. Cela me paraissait insensé de devenir une mère sans lui. Ça n'allait pas. J’avais été heureuse parce que je savais qu nous l’aurions ensemble. La vérité était acide. Mais que ferais-je s’il mourrait ? La cruauté de mon raisonnement me brûla l'estomac. Mais j’avais toujours été consciente que l’enfantement n’était pas mon aboutissement. -“Un mois... ” Pourrais-je encore avorter ? Je ne connaissais rien de la législation. Cela non plus je ne l’aurais jamais, au grand jamais, envisagé de ma vie. Etais-je entrain de devenir un monstre ? Était-ce cela ?
Je m’appuyais sur elle pour tenir debout. Mes jambes étaient étrangement faibles. Je croyais que le fait de retrouver mon doux journaliste aurait été un soulagement. Malheureusement son état était plutôt une source de peur supplémentaire. Je secouais négativement la tête. Je ne me sentais pas capable d’avaler une souple, qui plus est industrielle. J’aurais plutôt aimé un des plats du temple par exemple. -“Non. Merci. Pas tout de suite.” Un peu plus au fait de son état, je réussi à aller jusqu’à son chevet cette fois-ci. Je contemplais son visage tuméfié. La voix de Rose me tira de ma contemplation. J'acquiesçais en silence. Je me sentais intimidée par ces blessures, ces machines, ces tuyaux, ces sons. Je tirais la chaise pour l’accoler au lit. Je trouvais une position à peu près confortable, afin de lui prendre la main. La chaleur de sa peau me rassura un peu.
-“Je le lis depuis quelques années. ” Un petit sourire me vint en repensant à notre première prise de contact. -“Mais notre rencontre s’est faite … avant le gala de bienfaisance. En octobre. Il a accepté de venir faire un article sur l'événement. ” Prem n’avait été ni mielleux, ni agressif. Mais aussi franc que je le retrouvais dans ses articles. Je caressais sa paume de mon pouce en racontant à notre ange gardien. -“Il a été … Prem. Incisif. Droit. ” Seigneur, je devais bien le reconnaître, il m’avait plut. Peut-être pas de façon aussi claire que ce soir. Mais j’avais eu envie de le revoir. De le connaître. De lui être agréable. Je m’étais moi même laissée attendrir par son sourire en coin et ses yeux noirs… Ses beaux yeux noirs. -“... C’est moi qui lui ai demandé de venir au domaine. Pour une rencontre. Il m’a invitée en retour. ” Je n’avais jamais pu parler de lui à quelqu'un. Si ce n’est à demi mots, pendant la nuit du gala. C’était le tout début quand mes sentiments prenaient vie. A l’époque je n’avais pas idée de tout ce qui allait se passer. Au souvenir de notre première nuit ensemble, mon corps est encore plus aimantée vers lui. Ne plus jamais me retrouver dans la chaleur de ses bras. “Il m’a ouvert les yeux. ”
Je me mis alors à contempler le corps endormi de mon journaliste. -“ C’est un esprit vif. Une belle personne, Rose. Ce qu’il écrit c’est important. ” En dehors de ma peine immense, j’étais sûre que cette ville, ce royaume, manquait de personne comme lui. Il ne pouvait pas mourir, pas si jeune, pas ainsi. Je venais repousser le col de sa chemise de nuit pour voir s’il portait le médaillon que je lui avais offert. J’en profitais pour venir poser un baiser, le plus doux possible sur son front. -“Bat toi Prem. J’ai besoin de toi. … Je t’en prie chéri. ” Chuchotais-je avant de me rassoir.
