Ma très chère Poppy, à présent que le sommeil et le soleil m’ont fait profiter de leurs bienfaits, j’ai l’esprit au clair, plus au clair qu’il ne le fut depuis des semaines, peut-être bien des mois! Comme cette terre nous fait du bien. Et quel plaisir de se sentir de nouveau forte. Je me demande si nous n’avons pas négligé ce qu’un accouchement peut provoquer chez une femme. Docteur Kay m’en avait pourtant averti. Il faut croire que subsiste en moi un peu de l'orgueil de mes ailleux. Je ne saurai dire si c’est une bonne chose ou non. Mais, il me semble qu’il en faut, au moins un peu, pour tenir droite. Ne crois-tu pas ? Je crois que toute cette histoire nous rend plus fortes toutes les deux. Ne le crois-tu pas ?

Une fois de plus, je voulais te dire merci. Sans ton courage, sans ta loyauté, je serai probablement retenue à Hannover. Tu es une formidable amie. Qui sait ce que Père aurait décidé pour Dalia ? Rien que d’envisager ce qui aurait pu advenir j’éprouve un sentiment glacé, une peur de le voir, et aussi une rancœur dont je ne parviens pas à me défaire. Toi qui es là-bas, dis-moi un peu ? Que se dit-il ? Ma mère va-t-elle mieux ? Ma douce Iris est-elle heureuse de ses fiançailles ? On dit qu’Arthur Blakemore est un jeune homme bien élevé. Que disent ses domestiques de lui ? Pardonnes, ce déluge de questions ma Poppy. C’est que tu es maintenant pas seule indicatrice.

Il y a bien le comte d’Avon ici. Cependant, mon cher parrain est loin de tout ceci. Avec lady Amélia, ils vivent une existence coupée du royaume, du monde même. Il est toujours ami avec Papa et avec lord Leicester. Cependant, nous ne parlons pas d’eux ici. Nous parlons de tout le reste. J’apprécie sa compagnie. Il est d’un grand calme. Il émane de lui une sérénité qui apaise mes sens. Je me dis parfois que j’aurai aimé qu’il soit mon père. Crois-tu que c’est une pensée injuste ?

Nous n’allons pas tarder à partir en balade. Je suis heureuse de reprendre l’équitation ici, car les paysages sont magnifiques. Cela fait quelques fois que j’ai pu monter l’un des chevaux. Un jeune fougueux et attachant. Je pense que si Maître Douglas ne parvient pas à obtenir le retour des miens, je m’arrangerai pour reprendre un poulain. Je crois que le collier de grand-maman me donnerait la somme suffisante pour cela. Je sais qu’elle comprendrait mon geste. Plus tard, je souhaite, que Dalia connaisse le bonheur de l’équitation.

C’est Zenon qui est notre guide dans cette sortie. J’apprécie de retrouver le tonus de Curious III. Un nom qui me tire un sourire, car je trouve qu’il lui va fort bien. Je tente d’appliquer ce que j’ai pu travailler à la formation de l’été dernier. La période de l’Ecosse ne remonte pas à si loin. Néanmoins, avec tout ce qui s’est passé entre-temps, il me semble qu’une vie a défilé. Je sentais que mon dos travaillait bien lui aussi. Je ne fut pas mécontente lorsque Parrain décréta notre pause de midi.

-“ Merci! … Vous non plus. ” Je pris le verre qu’il m’offrait en lui souriant. Il avait la soixantaine. Il était de la même génération que Papa. Mais, je le trouvais en meilleure forme. C’était peu de dire que son épouse était rayonnante à côté de maman. -“ Celui-ci ressemble bien plus, au tout premier. ” Me souvenais-je.

Je buvais à petites gorgées. cela faisait un bien fou. J’écoutais les sons des alentours. La nature ne faisait pas exactement les mêmes musiques ici. La chaleur assourdissant tout. -“ Vous vivez dans un endroit magnifique. ” Nous connaissions davantage la région à présent. Le sud de l’Inde regorgeait de beauté. J’étais impatiente d’aller découvrir le plateau des Eléphants. Prem m’y emmenait avant notre départ. Cela allait être splendide.

Je viens m'asseoir à la droite de Zenon. J'imitait sa posture ce qui permettait de soulager mon dos. Depuis l’accouchement, il est plus sensible. Je fais attention. -“ Je vous crois… Mais croyez-moi vous avez bien meilleure mine que nos amis de Londres. Madame aussi! ” Je n’allais pas citer des noms. Il comprendrait. J’approuvais vivement son observation. -“ Oui! Je me sens très bien ici. Cet endroit un merveilleux. … J’en avais terriblement besoin. Grâce à vous, je sens que j’ai retrouvé … mon équilibre. ” Lui dis-je en confidence.

Je lui souris. -“ Ah ? Oui ? ” Mais de quoi allions-nous discuter à l’abri des oreilles ? Allait-il me parler de mes parents ? Sans doute que le Prince était au courant maintenant, que je me trouvais à Bellary. Il n’y a pas vraiment de secret qui dure chez les aristocrates. Mais, il n’en fut rien. Non, ce dont il me parla concerne uniquement notre lien. Si j’en étais soulagée, j’en fus aussi intimidée.

-“ … Oh risque de vous fâcher avec Papa ? Avec tous vos amis ? ” Décider de me donner un titre à moi ? Qui plus un titre ancien ? De comtesse! Alors que j’étais disgraciée aux yeux de la couronne et de l’Eglise ? N’y avait-il pas des limites à la rébellion ? -“ Mon nom va porter l'opprobre sur vous et sur votre héritage! ” N’avaient-ils pas assez subi le courroux de la noblesse ? Je plongeais mes yeux dans les siens pour essayer de comprendre. -“ Vous avez tant fait pour moi... Pour nous. Vous qui êtes si bon avec moi… Comment pourrais-je amener la honte sur votre splendide héritage ? Parrain… c’est… Je ne me le pardonnerai pas. ” Ses enfants non plus probablement. Et son épouse ?

-“ C’est bien vrai… ” Murmurais-je empreinte de modestie au rappelle qu’il me fit sur la chance que nous avions. Très tôt, l’on nous avait enseigné à Iris et à moi l’existence des classes sociales. Aussi l’importance qu’elles avaient. Comment, nous les nobles, nous avions besoin des plus modestes. C’était des explications structurelles à laquelle je donnais un sens abstrait. C’est devenu des plus concrets à présent que je ne suis plus une lady. -“ Oh oui beaucoup mieux Parrain. … Je ne serai volontiers restée ici !” Plaisantais-je dans un rire. -“ J’espère que nous pourrons revenir vous voir. ” Je n’ai pas de doute sur le fait que Zenon et Amélia seraient pour nous accueillir. Cependant, j'ignorais si nous pourrions assumer de telles dépenses dans l’avenir. J’imagine que tout dépendra de la décision de faire appel contre Edward. Ce dont je ne voulais pas réfléchir pour le moment.

Je n’y avais plus pensé non plus à ce que Parrain avait fait comme suggestion le jour de notre arrivée. Je ne l’avais pas pris trés au sérieux alors. Visiblement, je me suis trompée! Je posais ma main sur la sienne. J’écoutais son point de vue. Le calme et l’assurance qui se dégageaient de lui rendait tout ceci sérieux, trés sérieux. Il anticipait même certaines de mes questions.

Pourquoi un fils ne voudrait pas du nom de son père ? Je ne comprenais pas. C’était sidérant d’imaginer que Zac rejetait son héritage. Quelles étaient les raisons ? Je savais qu’il avait au moins un fils. Amélia m’en avait un peu parlé pendant notre journée. N’était-ce pas à lui d’obtenir le titre de comte ?

-“ A Lechlade! ” Te souviens-tu de ce manoir Poppy ? Je le connais bien. Quand nous étions plus jeunes, je venais souvent chez les de Lascelle avec Père. Nous passions un après-midi à cheval, ou au bord de la piscine. Je me souviens que leur fille était gentille avec nous. Elle me parlait de l’Inde et de la vie qu’ils avaient là-bas. C’est un peu à cause de Joy que j’avais toujours eu envie de venir ici.

Le haras… Un sujet dont je ne parlais plus. Mais, nous savons que je ne pourrais pas éternellement être la mère de Dalia. Je savais, qu’au fond, Prem avait envie que je trouve un emploi. Cette question reviendrait entre nous une fois de retour sur Londres. Je ne pouvais pas, ne pas considérer, l’aspect pratique des choses. Les terres des de Lascelle étaient de bonnes terres. Il y avait de quoi mettre en place le projet que j’avais en tête depuis un an. Lui, il n’avait rien oublié. - “... On dirait que vous avez pensé à tout. ” Soufflais-je.

C’était un accord qui me parait solide. Ils nous offraient un gîte et de quoi monter une affaire. Le tout avec en plus une réintroduction à la noblesse… Ce qui paraissait impossible. J’avais commencé à accepter l’idée que je n’étais plus noble. La naissance de Dalia m'a beaucoup aidé dans mon procédé. Je n’attachais plus les mêmes choses exactement à tout ceci. Ceci dit, mon coeur avait eu une réponse immédiate. C’était un honneur et un cadeau inestimable.

Nous avons parlé de la cour tous les deux. Il connaissait mon ressenti. Si j’avais eu une chance de concilier les deux mondes, cela m’aurait plu. - “ Je suis honorée… ” Être une filleule était une chose. Mais être une héritière en est une autre. J’allais vite effacer la larme au bord de mes cils. Personne dans l’aristocratie, si ce n’est lord MacAsill, n’avait été aussi bon avec moi, depuis que j’avais été reniée. Je ne savais pas quoi lui dire. -“Ce que vous dites a beaucoup de valeur à mes yeux. J’ai foi en votre jugement. ” Alors, s’il était certain de ne pas y avoir d’ombres.

-“Je ne peux pas vous dire “oui” avant d’en avoir discuté avec Prem. ” Je devais en parler avec mon chéri. Beaucoup de points allaient le concerner. Dalia aussi serait liée à tout ceci, puisqu’elle était ma première née. “ Il doit me donner son ressenti. ” Surtout que cela touchait à tous les points qui étaient sensibles, entre nous. -“ Je trouverai un bon moment pour lui en parler. ” Peut-être le mieux était-il de profiter de la beauté de Bellary ? -“ Parrain… je ne saurais jamais assez vous remercier pour votre bonté. ” Quelque soit notre réponse, cette proposition était d’une très grande générosité. -“Vous et Amélia êtes des gens bons. Nous devrions tous prendre exemple sur vous. ” Cette fois, je pleurais, emportée par une vague d’émotion.

Mon Parrain me faisait sentir la bienvenue et ce depuis que j’étais jeune. Ses enfants étaient plus vieux que moi, d’une dizaine d’années. Ils ne me l’ont pas fait ressentir spécifiquement. Je sais que lorsqu’il me dit que je, enfin, nous somme bienvenue ici, Zenon est sincère. Si seulement Père était aussi ouvert… Me disais-je une nouvelle fois.

Enfin ! Tout de même, je ne m’attendais pas à ce que son ouverture d’esprit soit aussi grande. Envisager de me confier ses biens, de me faire héritière, était un choix déterminant. Je ne sus comment prendre la chose. Je ne savais pas qu’il était possible de confier un héritage à une personne extérieure à la famille.

-“ Mais, enfin, vous avez aussi des petits-enfants ? Ne sont-ils pas prioritaires ? ” Demandais-je afin de lever tous les doutes. Même si la Loi n’est pas contre cette possibilité était-elle la plus juste ? Il y avait tout de même toute la descendance de Zenon à prendre en compte. Je ne me sentais pas légitime face à Matthews Sanders, ni ses frères et sœurs.

Je ne voulais pas remettre en question la confiance qu’il plaçait en moi. Je me demandais surtout si je suis la mieux placée pour servir les intérêts de sa lignée. -“ … Je suis touchée de cette confiance.” Me verrais-tu porter ce nom ? Me verrais-tu Comtesse ma chère Poppy ?

-“ Oh oui. Je le lui dirais. Je pense qu’il va avoir des questions en en effet. Il n’est pas journaliste pour rien! ” Remarquais-je complice et affectueuse. La curiosité de Prem était encore plus grande que la mienne. La quête de vérité qu’il suit n’est pas la plus facile. Je sais qu’il s’est dévoué à un exercice difficile… et dangereux. J’admire énormément sa détermination. Même lorsque cette dernière peut contrarier mes propres plans. J’inspirais donc profondément en serrant doucement les mains du comte. Un homme calme et apaisant. J’aurai aimé qu’il ait le même effet sur mon Père.

Je ne pouvais penser ainsi, pourtant, pendant un court instant, je me pris à imaginer ce que ma vie aurait pu être si j’avais été la fille de Zenon. -“ Vous êtes si optimiste. Malgré tout ce qui vous est arrivé. Je ne sais pas comment vous faites. ” Un vrai mystère à mes yeux. Nous en avions appris plus sur les de Lascelle. J’avais découvert combien leur parcours avait été compliqué. Les forces qui s’étaient élevées contre eux. Leur harmonie aprés toutes ces épreuves, était admirable. Parrain était modeste aussi. Tandis que les larmes me venaient, je lui souriais.

Par chance, il n’était pas pudique. Je me réfugiais vite dans ses bras. -“ Excusez-moi. ” Lui disais-je alors que je sentais revenir la tristesse qui me tenait depuis ma dernière dispute avec Papa. Bien sûr, la naissance de Dalia me comblait de joie. L’amour de Prem m’abreuvait de bonheur. Mais, qu’il était malheureux de ne pas le partager avec eux. Je ne comprends toujours pas pourquoi. Ne pas comprendre est une souffrance en soi. Comme je ne comprenais pas la vioence d'Edward à mon endroit. Suis-je une femme aussi égoïste qu'ils le disent ? Poppy ?

-“ C’est juste que vous vous montrez si gentil. … Plus gentil que papa. ” Je n’osais pas montrer ce manque à Prem. Je ne voulais pas le blesser ou ranimer des mauvaises pensées. Il était fâché. Il avait de bonnes raisons de l’être. Je l’étais aussi. Mais la colère ne faisait pas tout. Je n'accepterais pas encore tout à fait cette idée que nos vies seraient à jamais séparées. -“Nous avons eu tellement de critiques … cela fait du bien d’entendre que nous ne sommes pas des monstres.” Avaient-ils eu des alliés en leur temps ? Des amis sur qui compter ?

-“Croyez-vous qu’ils me pardonneront un jour d’avoir choisi Prem ? ” C’était un espoir que je n’avais pas encore formulé à voix haute. Je me l’étais interdit. Cela ne faisait que remuer la peine. Je devais accepter. C’était le plus sage. Ceci dit, mon parrain, en plus d’être un bon conseiller, était aussi un proche des Hanovre. Lui et mon père se connaissent depuis longtemps. Ce sont des amis. Le comte devait avoir un avis. Oui certainement qu’il avait une idée de si mon rêve pourrait ou non se réaliser. -“ Je n’ai jamais voulu faire de mal à personne. Je vous assure. ” Lui redis-je ce jour-là. Comme je l’avais dit une autre fois. J’avais beau savoir que j’étais dans mon droit, mon coeur culpabilisait en partie. Je n’avais jamais envisagé que mon bonheur puisse être source de souffrance.

Je me rendais compte, en l’écoutant, que le comte d’Avon parlait peu de ses héritiers. -“ … Je comprends. ” Mes questions me paraissent idiotes. Parrain n’était pas le genre d’homme à agir sur un coup de tête. Evidemment que non. Il avait réfléchi à tout. Il avait pensé à moi comme une sorte de solution de secours. La motivation première je la comprenais très bien. Quand je lui dis être honorée ce n’était pas exagéré. -“ Est-ce… à cause des règles concernant le mariage que Zac refuse son héritage ? … Pour sa femme ? Megara ? ” Je n’ai jamais rencontré l’épouse de Zac. Je sais seulement que cette femme est une femme du peuple, une anglaise et qu’elle travaille dans la police comme lui. Pour le reste, je ne peux faire que des suppositions.

Maintenant que j’étais une maman je voyais les choses autrement. Je n’imaginais pas que Dalia soit contre ce que je représente. La peine que cela me ferait. Comment faisaient-ils pour accepter la distance Amélia et Zenon ? -“ Vous… ne les voyez pas souvent. Cela ne vous manque pas ? ” Ce serait surprenant. Je n’étais pas entré en contact avec Zac comme je me l’étais juré de le faire à la suite de l’agression de Prem. Les semaines se sont transformées en mois. Prem était sortie du coma. Moi, j’étais partie en Ecosse. Maintenant cela fait bientôt un an. Aucun “Lars” ne s’était de nouveau manifesté pour faire du mal à Prem. Alors, c’était comme un cauchemar qui perdait peu à peu de la prise.

-“ Il faut des personnes pour poser les questions. N’est-ce pas ? Comme lui. Comme votre fille. Prem m’a dit qu’ils ont travaillé ensemble. ” Avec le recul, c’est à se demander s’il y a une sorte de Destin, comme le dit le grand Livre. Est-ce que certaines routes sont destinées à se croiser malgré tout ? Est-ce que l’on peut avoir cette âme-soeur, cette moitié, dont parle la poésie ?

-“ Je le souhaite. Je comprends. Avoir Dalia a tout changé. Vous savez ? C’est comme si le reste avait perdu de sa force d’un seul coup. Maintenant, tout ce que je veux c’est que mon bébé ait une vie paisible et pleine d’amour. Que Prem puisse faire ce qu’il aime. ” Pourquoi mes parents ne montrent-ils pas la même sagesse que les De Lascelle ? Ou même que les Blakemore ? Pourquoi maman s’obstinait à détourner le regard ? Ils étaient du même âge. Ils avaient vécu les mêmes choses.

Cela faisait du bien d’entendre autre chose que “séchez vos larmes Violet”. Ou bien “tenez vous droite Violet”. Zenon était plus gentil. Il était plus doux. Peut-être avait-il eu raison de ne pas rester à la cour. Il n’était distant et froid comme tous les autres. -“ Je ne sais pas… ” Non, je ne savais vraiment pas. Même sans écouter mes parents… Edward… et son avocate, toutes ces personnes avaient l’air de penser que j’étais une horrible personne. -“J’ai fait de la peine à beaucoup de gens. ” Edward m’avait fait du mal. Mais mes accusations lui en faisaient aussi. Il serait en difficulté toute sa vie. -“ Mais ce qu’ils faisaient était mal. Je ne pouvais pas me taire. N’est-ce pas ? ” Il me semblait que j’avais été dans le juste. J’avais agit dans le sens du droit. Comme Prem s'acharnent à le faire avec le journalisme. Mais… pour l’heure nous ne récoltions que de la colère et du mépris.

Mes épaules s'affaissent un peu. Bien entendu, Parrain n’allait pas mentir pour me rassurer. Il avait raison. Père ne se détournera jamais de ses obligations. Il m’en voudrait toujours de l’avoir trahi. -“ … merci. ” Le remercie-je. Je n’avais aucune idée de quand cela serait possible. Zenon et Amélia ne viennent presque plus en Angleterre. Papa ne faisait pas le déplacement à Bellary. Mais au moins cela laissait un peu d’espoir pour le futur. Ce qui était déjà beaucoup.

-“ Je vous crois.” La sincérité de son affection me faisait du bien. Probablement plus d’effet que les mots. Tommy et Poppy ont dû me quitter. Je n’avais pas vu Iris depuis des mois. Il n’y avait que Prem pour me montrer de l’affection. Prem et Parrain maintenant. -“ Lorsque l’on voit la façon dont vous regardez Amélia, on ne peut pas avoir de doute. ” Lui reconnut-je en souriant à mon tour. Je ne connaissais pas encore très bien lady de Lascelle. Amélia se montrait polie et affectueuse avec moi. Cependant, elle ne me parlait jamais de choses très personnelles. Il y avait une barrière entre nous. Je ne saurais pas dire pourquoi. -“ Ni elle avec vous. Vous êtes… une preuve. Le mariage d’amour a du sens. ” Leurs choix nous servent d’exemple.

Comme c’était une bonne chose que Parrain nous ait invités ici. -“ Vous me donnez du courage Parrain. ” En plus cette idée qu’il avait me rendait un peu plus optimiste pour l’avenir. -“ A notre retour, je finirais ce que j’ai commencé. J’aurais mon diplôme et je trouverai des chevaux!”

Je ne voulais pas être intrusive avec Parrain, aussi, je me contentais de donner un point de vue sans le questionner. -“ Mmm. Je crois que je vois oui. Vous vous êtes adapté à la situation. ” N’est-ce pas ce que nous faisons tous et toutes ? En fin de compte, nous passons notre temps à réagir aux événements et à les assimiler. En moins de deux ans, j’étais passée de femme mariée, en mauvaise posture, sans enfant. Aujourd’hui, j’avais un compagnon de vie, une fille et je commençais à avoir des perspectives d’avenir. C’était comme si je commençais une toute nouvelle vie. -“ Tout de même, je ne suis pas sûre que j’aurai réussi à le faire. Quand je vois comment Iris me manque… Je crois que j’aurai été très malheureuse s’il y avait eu autant de distance géographique entre nous. ” C’était mon impression. J’imagina alors Prem entrain de me faire une remontrance. Je souris. Il croyait plus en mes capacités que moi-même!

-“ Maintenant que j’ai repris un peu de forces… Je crois que quand je serai prête… J’en poserai aussi. Sur la façon dont nous fonctionnons. Pourquoi nous nous empêchons de dire les choses. ” Il n’y avait pas que des cas de violences, comme je l’ai connu avec le Baron. Il y avait des choses moins graves et des choses plus graves. Des vérités qui nous empêchent d’être heureux. Je ne voulais pas que cela perdure pour les générations futures.

-“J’espère que vous savez que vous pouvez compter sur moi parrain ? Pour toujours. ” Lui redis-je pendant notre câlin. En rencontrant Prem Hadid, j’avais appris deux choses. Parler à l’autre et faire de l’introspection. Je faisais tout ce que je pouvais pour les mettre en pratique quotidiennement. Zenon était une personne avec qui je me sentais assez complice pour le faire. J’espérais qu’un jour, je serai à l’aise pour le faire avec tout le monde. J’avais encore un bout de chemin à faire.

Il ne faillit pas, fidèle à la générosité qui le caractérise. -“ Nous avons eu de la chance que vous soyez présents dans l’entourage. ” Je ne faisais pas de raccourcis. Nos histoires ne sont pas les mêmes sur tous les points. Prem avait sa famille et pas Amélia. Zenon n’avait pas eu besoin d’abdiquer pour être avec sa compagne, moi si. Je me demandais combien d’autres couples se retrouvaient dans ces embûches ? Il fallait que je pense à demander des chiffres à mon avocat.

Zenon avait raison. J’étais d’accord avec lui. Malheureusement, j’avais un contre-exemple proche à omettre. -“ Iris et Arthur sont engagés dans des fiançailles. ” Le comte Leicester est un proche de mon père comme de Parrain. Je crois qu’il n’aurait pas obligé son fils à se marier si cela n’avait pas tenu. Mais, je n’avais que mon intuition pour me guider. Dans ce genre de cas, ce n'était pas suffisant.

-“ Merci, votre soutien est inestimable. ” Lui dis-je encore une fois. Je crois que je pourrais lui dire sans fin. Ce qu’il venait de me proposer était inouï. Personne n'aurait pu l’imaginer. J'acquiesçai du chef. Bien que j’étais en agréable compagnie ici Dalia me manquait. Prem me manquait aussi. J’avais besoin de voir leur sourire et sentir leur parfum. Tranquillement, je me dirigeais vers ma monture pour la préparer au retour. Sous cette luminosité la balade serait tout aussi belle qu’à l'aller. Je me réjouis par avance. Tout ceci me paraissait de bon augure.