La justice avait été rendue. La cours s'était retirée et les accusés condamnés. Un recours en appel était toujours possible, mais pour ce soir, les condamnés allaient dormir en prison. C'était des truands, trafiquants de drogues, détenteurs d'armes et s'étaient montrés violent lors de leur interpellation. Ils avaient été condamnés à de la prison ferme. Le juge s'était montré intraitable. La défense avait été bien menée, mais ne s'était pas révélée suffisante. Léandre espérait que ce petit séjour au frais allait faire comprendre à ces individus qu'il fallait qu'ils changent de comportement.

Le juge avait été très attentif aux débats. Sa décision n'avait pas été influencée par des personnes extérieures, mais par les échanges, les rapports des experts, ainsi que ses convictions personnelles. Léandre était un bon juge et sa décision avait été tout à fait rationnelle. La justice était aveugle, comme il l'était lui-même. La main posée sur la rambarde, le juge était en train de retourner à son bureau. Il connaissait parfaitement le tribunal, bien qu'il ait toujours besoin de sa canne blanche. Les lunettes noires posée sur le nez, Léandre était attentif à son environnement. Il allait devoir prendre une pause avant de continuer ses dossiers... Le smog lui pesait, impactant directement et durablement sa santé. Léandre faisait ce qu'il fallait pour éviter que cela se ressente trop à son travail, mais il devait faire attention. Il avait réussi à choper un nouveau rhume, et bien qu'il n'y ait rien de grave pour le moment, il était sous anti-biotique. La fin de journée se faisait sentir.

Un pas pressée et cadencé se fit entendre. Le juge n'avait pas besoin de voir pour savoir à qui cela appartenait. Keenan devait être dans une rage folle d'avoir perdu... Et c'était quelque chose de bien agréable de voir cette avocate mise en échec. Léandre n'avait pas pris sa décision pour cette raison, mais c'était une conséquence positive. Le juge se retourna et se confronta à la rousse, posant naturellement son regard sur l'avocate. Cela faisait quelques années qu'ils se croisaient dans les murs du tribunal, mais le juge était toujours resté dans l'ombre de son maître d'apprentissage. Aujourd'hui, il n'y avait plus de Blakemore et Léandre prenait ses propres décisions lors des procès. Et s'il était de nature frêle, le juge avait les épaules pour son poste. Léandre était amusé, mais il ne laissa rien transparaitre, ayant simplement un sourire polis. Il demanda "Maître Keenan, vous êtes venue me souhaiter une bonne soirée ?". La rousse avait du tempérament et il se demandait si elle était du genre à casser divers objets pour passer sa colère.

Le juge appréciait l'avocate, il aimait la voir plaider. Elle savait être cruelle, perverse et se jouait de la moral et des faux semblants. Elle était une épine dans les rouages de la justice, mettant à mal les enquêteurs et se préoccupait de la souffrance des victimes. Elle était horrible et talentueuse... totalement fascinante. On la disait femme fatale, mais Léandre ne voyait pas, alors il ne pouvait se fier qu'à son ton de voix et son parfum caractéristique. Keenan respirait la richesse, la réussite et le pouvoir. Elle était comparable à fruit tellement gorgé de sucre qu'il en pourrissait de l'intérieur. Elle était belle en apparence, mais c'était un poison. Et comme pour tout fruit défendu, elle n'en était que plus séduisante. Mais de tout ça, Léandre ne le partageait, gardant analyse, idée et fantasme au fonds de lui.

Léandre avançait à son rythme, se guidant à l'aide du mur et de sa canne. L'avocate était à sa droite, elle avançait au rythme du juge. Elle n'allait pas le lâcher, c'était évident. Le juge répondit calmement, mais d'un ton sans appel "Je vous accorde 10 minutes, pas plus.". Il acceptait déjà de la recevoir, ce qu'il aurait pu refuser. Mais Léandre savait qu'il valait mieux gérer les choses directement... et puis, il voulait entendre ce qu'allait dire l'avocate. Le juge refusait rarement une entrevu, à moins qu'il n'est vraiment pas le temps ou que cela soit pour une demande vraiment absurde.

Jessica ouvrit la porte et Léandre entra dans la pièce. Son rhume l'empêchait de sentir si quelqu'un était entré dans le bureau ou non. Cela le contrariait. Le juge se rendit naturellement jusqu'à sa chaise et se posa. La fatigue lui pesait. Il avait prévu de travailler sur d'autres dossiers, mais là, il avait vu trop gros. Il allait devoir rentrer pour se reposer. Le juge était rattrapé par sa santé. C'était extrêmement frustrant. Léandre faisait aussi des efforts pour ne que cela ne se remarque pas dans son travail, il ne voulait pas que les parties adverses puissent profiter de ses faiblesses passagères.

Léandre entendit l'avocate s'asseoir, posant le dossier qui devait être conséquent. Le juge avait parfois du mal à concevoir la taille des dossiers, tous les éléments lui étant transmis étaient sous format audio. Ou c'était sa graffiére qui s'en occupait. Le juge avait une confiance absolue en elle. Elle était ses yeux dans le tribunal. La porte du bureau s'ouvrit et Léandre du immédiatement que c'était elle au bruit des bijoux qu'elle portait. Elle venait récupérer ses affaires avant de partir, comme ils l'avaient convenu le matin même. Léandre entendit la greffière s'arrêtait une demis-seconde. Elle n'aimait pas l'avocate, Léandre le savait pertinemment. "Je prends juste mes affaires..." "Pas de problème Mélanie." Alors qu'elle attrapait son sac et s'apprêtait à quitter la pièce, Léandre l'interpella "Vous avez oublié quelque chose.". Elle s'arrêta avant de faire demi-tour et attrapa son pass. Elle les salua, avant de fermer la porte du bureau et de les laisser tranquille.

Léandre était assis au fonds de sa chaise, au repos, les mains l'une dans l'autre, et entièrement à l'écoute de son interlocutrice. Il avait entendu l'avocate manipuler des papiers, mais cela n'avait pas d’intérêt pour lui. Léandre ne pouvait pas les voir et n'allait pas croire Keenan sur parole. "Vous pouvez faire appel, c'est votre droit. Mais ne me faîtes pas perdre mon temps.". Le juge la coupa au moment où elle se mit à parler de la jurisprudence "Élément que je ne vous ais pas laissé présenté car cela n'avait pas d’intérêt réel. Si les deux affaires sont proches au niveau de la forme, le fonds est totalement différent. Ce qui rend toute comparaison caduc. Et vous le savez.". Léandre connaissait cette affaire. Il avait aussi préparer le procès pour ce genre d'argument. Il savait aussi que cela frustrait l'avocate, mais ce n'était pas son problème.

Alors que Léandre allait poser une question, il s'arrêta de lui-même et se tourna sur le côté. Il eut une sorte de quinte de toux étouffé. Ses poumons étaient encrassé et Léandre n'était pas en capacité d'évacuer les poussières naturellement. Il resta un instant sans bouger, puis soupira. Son corps allait finit par le lâcher un jour. Léandre finit par se mettre de nouveau en face de son bureau, puis sorti un gel hydroalcoolique du meuble, se lavant rapidement les mains. "Excusez-moi.". Il fit rapidement un point mentale sur l'affaire puis reprit "Maître Keenan, nous n'allons pas refaire les audiences. Avez-vous un élément supplémentaire qui puisse argumenter votre demande en appel ?". La tigresse avait-elle encore de quoi faire balancer les événements ? Ou était-elle réellement mise en échec ?

En tant que juge, Léandre devait rendre un avis sur l’intérêt d'un appel. L'affaire lui paraissait claire et pour le moment, son avis serait défavorable. Mais il était prêt à changer d'avis. "Je vous écoute.".

Léandre écoutait son interlocutrice, attendant patiemment ses arguments. Mais l'attente laissa rapidement la place à la frustration. Elle ne voulait pas jouer selon ses règles... Et le pire était qu'elle avait raison. Léandre arrivait à réfléchir, mais son intélec était forcément impacté par sa santé. Il ravala une réponse cinglante, préférant se taire. Les machoires crispées, le juge était contrarié. Keenan en faisait que le renvoyer qu'à sa propre faiblesse. Pendant un dixième de secondes, Léandre laissa ressortir ses sentiments, puis réussit à reprendre totalement le contrôle sur sa manière d'être. Blakemore avait été un bon maitre à ce sujet. Il ne fallait rien laisser passer.

Le juge entendit l'avocate commençait à ranger ses affaires, puis se lever pour finalement... lui amener un verre d'eau. Cette action renforçait la colère de Léandre. Son handicape faisait qu'il était dépendant des autres sur beaucoup de choses. Les démarches administratives, la conduite, la lecture de document où même sur le choix de ses vêtements. Léandre étant aveugle, il ne pouvait pas faire les boutiques seules. Alors de voir Jessica agir de cette manière le mettait en colère. Il était aveugle, certes, mais il agissait au mieux pour rester le plus indépendant possible. Il ne voulait pas d'aide, surtout de la part de Jessica. Il ne toucha pas au verre d'eau, tournant la tête vers elle alors que l'avocate était passée à côté de son bureau. Sous ses lunettes noires, il la suivait naturellement du regard. Le cadre était en train de devenir informel et le juge savait que c'était un terrain dangereux. Surtout avec Keenan.

Léandre était un jeune juge, il était attendu au tournant pas de nombreuses personnes. Certains attendaient la faute. Et quand à la santé de Léandre, elle n'avait jamais été bonne. Et elle ne pourrait jamais s'améliorer réellement. Le juge était coincé dans ce corps frêle. Léandre était comme tout les hommes, il aurait voulu être plus grand, plus épais, plus fort, mais il ne l'était pas et ne le serait jamais. Il aurait voulu pouvoir éclate de colère, taper du poing sur la table, mais ce n'était pas comme ça qu'il devait agir. Léandre était dans le contrôle, parce que ses sentiments étaient comme son corps : une faiblesse. Il ne pouvait gagner en écoutant son coeur. La colère était aussi une mauvaise conseilière. "Vous vous inquiétez pour moi ? C'est étonnant.". Mais ce n'était pas un acte altruiste. L'avocate voulait surtout qu'il rende un avis favorable sur sa demande en appel. Jessica était une personne qui consommait littéralement les gens, les achetant et les jetant à la poubelle dès qu'elle n'en n'avait plus besoin. Léandre appréciait cet aspect du caractère de l'américaine, mais il savait qu'il rentrait lui aussi dans cette case. Jessica se montrait sympathique avec lui uniquement pour arriver à ses fins. "Dans cette affaires, tout les indicateurs étaient au rouge pour vos clients. Vous avez bien plaidé Jessica, mais vous ne pouvez pas toujours gagner.". Même la brillante américaine devait bien se confronter à l'échec. Le juge la respectait énormément. C'était une excellente professionnelle.

Le juge ne pu s'empêcher de baisser légèrement la tête, il passa une main sur son visage, puis attrapa ses lunettes pour le poser sur le bureau. Léandre sentait une barre au niveau de son crane. Ses poumons étaient encrassés. Il avait mal de cette douleur horriblement classique chez lui. Le juge savait qu'il avait bien fait d'anticiper sur les anti-biotiques, mais la situation n'aurait pas dû évoluer de cette façon. La pression de la journée était en train de retomber... Et son corps ne semblait pas vouloir l'encaisser. Ses prunelles brunes reflettaient sa fatigues. Les yeux de Léandre fonctionnaient, il voyait sans voir. C'était là tout le drame.

Léandre, malgré ce qu'il aurait voulu, était en train de se relâcher. Délaissant son impassibilité et son calme qui lui servaient d'armure. Il décida de couper court à la conversation "Demain matin à 7h30 dans mon bureau. Ne soyez pas en retard.". Le juge avait un emploi du temps très chargé et il n'avait pas d'autres possibilités. A cette heure-là, il était généralement déjà présent pour commencer à travailler sur ses dossiers. Léandre travaillait trop, il le savait. Le juge allait alléger le pied prochainement. Le smog impactant directement et durablement sa santé. Son plus gros dossier était celui qu'il venait de terminer aujourd'hui... Pour le reste, ce n'était que des affaires courantes. Si la préparation du procès avait demandé du travail à l'avocate, cela avait aussi était le cas du juge. Il avait fait un sans-faute, il fallait que ça continue. Caleb l'attendait au tournant, comme de nombreuses autres personnes. La pression était énorme, la charge de travail conséquente. Une personne ayant des nerfs plus fragiles aurait craquée depuis longtemps. Mais si le juge avait une mauvaise santé, il avait un moral d'acier.

Le juge n'avait plus rien à faire dans son bureau. Il aurait dû se lever, mais il était momentanément trop fatigué pour. Il avait ramené posé ses mains l'une dans l'autre, il salua l'avocate "Bonne soirée.". Et au moment de dire ça, le juge sentie qu'un liquide chaud venait de lui tomber sur la main. A la deuxième goutte, il ramena sa main droite contre son nez. Le saignement était le signe définitif qu'il avait atteint son point de rupture. Pendant un bref instant, il se demanda s'il n'avait pas été empoisonné. Léandre l'avait jamais eut une bonne santé, mais il fallait souligné qu'il réagissait extrêmement mal. Le juge interpella l'avocate "Mademoiselle Keenan, avant de partir, rendez-moi un dernier service. Pouvez-vous appeler les urgences ?". Son état de santé avait dégringolé depuis ce matin et les choses étaient en train d'accélérer. Il ne voulait pas prendre de risque... et surtout, il sentait que la douleur était en train de passer à un stade anormale. Léandre était un bon client des services d'urgence. Avec sa maladie, le moindre malaise pouvait se montrer extrêmement dangereux. Le juge sentait qu'il risquait de s'évanouir d'ici peu. Le juge ne laisserait personne l'envoyé au placard, ni six pieds sous terre. C'était une mauvaise herbe, il s'en sortirait toujours.

Pendant un bref instant, Léandre eut peur que l'avocate s'en aille. Il avait besoin d'aide, il ne pourrait pas se débrouiller seul cette fois. Mais Jessica prit les choses en main. Le juge l'entendait s'agiter, jurer, téléphoner et exiger. Il sentait qu'elle commençait à paniquer, mais pour le moment la situation était maitrisée eu mieux. Léandre restait silencieux, concentré sur lui-même. Il essayait de faire le bilan de la situation, de son ressenti, de son corps qui était en train de craquer. La situation était totalement anormal. Le juge se connaissait, savait comment son corps réagissait... Il avait toujours été malade et avait appris à vivre avec. Mais là, c'était radicalement différent. La douleur n'était pas habituel, c'était plus violent, plus agressif. Léandre sentait qu'il perdait vite, trop vite. Le saignement n'était qu'un symptôme, une alerte générale pour dire qu'il allait mal.

Léandre n'arrivait plus à suivre la conversation. Les mots avaient perdu leur sens. Il eut une terrible quinte de toux, plus violente que la précédente. C'était un soubresaut. Le corps du juge était faible, mais il était comme tout autre vivant, il ne laisserait pas mourir. Léandre avait toujours eut des problèmes respiratoires. Il était usé et tousser de cette façon lui donnait l'impression d'avoir avalé des lames de rasoir. Pendant quelques instants, sa respiration se fit sifflante.

Jessica était là, elle fut obligé de l'interpellé à deux reprises pour qu'il l'écoute. Les mains de la rousse se posant sur son front, puis passant dans son cou pour essayer de savoir comment il allait. Mais Léandre savait qu'il allait mal, il le ressentait dans tout son corps. Il expliqua "Il faut que je m'allonge..." Sa voix était faible et trainante. Bien qu'il ait commencé à bouger seul, il avait absolument besoin de l'aide de Jessica pour ne pas s'effondrer. Les jambes du juge ne le portaient plus, l'amenant à essayer de contrôler sa chute. Une fois à moitié allongé au sol, Léandre continua d'expliquer "Ma tête et mon torse doivent en partie rester à la verticale... ça va m'aider à respirer...". Et il avait besoin de cette aide. Le juge ne respirait pas bien par moment. Il parlait lentement et doucement car il avait la sensation qu'il devait économiser l’oxygène. Léandre n'arrivait plus à tenir sa tête, ayant absolument besoin de l'aide de Jessica pour ne pas totalement s'effondrer.

Le juge commenta gravement "J'ai dû être empoisonné...". Léandre était une proie facile. En étant aveugle et ne détectant pas le sucre, les choses pouvaient aller vite. En étant déjà enrhumé, son odorat et son gout étaient clairement en berne. Le mouchoir n'arrêtait plus le saignement, laissant de nouveau le liquide se répandre. Ce n'était pas grand chose, mais c'était représentatif de l'état général de Léandre. Les pupilles du juge ne bougeaient plus, alors qu'en état normal elles se fixaient naturellement sur son interlocuteur. Le brun était en train de s'affaiblir à vitesse grand v. Il n'allait plus pouvoir tenir ne conversation d'ici peu, il le savait, il le sentait. Léandre expliqua "La respiration... C'est le syndrome de Kartagener... Pour le reste... Ce n'est pas normal...". Le juge posa sa main contre celle de l'avocate. C'était sa manière de demander de l'intention. C'était ce qui remplaçait un regard cherchant à se fixer dans les yeux de son interlocutrice. Dans une autre situation, il aurait été ivre de se retrouver dans les bras de celle-ci, la chemise en partie déboutonnée et ayant toute son intention. Mais là, Léandre avait peur, terriblement peur. "Ne me... Laissez... pas...". Il ne voulait pas affronter tout ça seul. Il n'y arriverait pas.

Sa respiration se fit sifflante. Il n'était plus en capacité de parler. Léandre essayait juste de respirer, d'avaler les précieuses goulées d'air lui permettant d'alimenter son corps en oxygène. Il ferma les yeux. Jessica lui paraissait brûlante.

Léandre avait la main sur celle de Jessica. Les yeux fermés, la respiration sifflante, le juge n'arrivait plus à ternir sa tête correctement. Il était dans un état de faiblesse lamentable. Il sentait que son état de santé général se dégradait beaucoup trop vite. C'était une chute. Léandre n'avait plus que des brides de conscience, n'étant plus réellement en capacité de réfléchir. Mais il avait bien conscience de ce qu'il risquait et ce qui allait se passer. Et c'était peut-être ce qui était le pire. Léandre avait peur. Il avait déjà passé des mois à l'hôpital suite à son accident de voiture. Il avait perdu la vu, perdu son père... Son corps, tout comme son esprit, étaient encore traumatisés par tout ça. Si Léandre se rendait parfois à l'hôpital, il savait toujours très bien pourquoi et comment cela allait se dérouler. Alors que là. Léandre allait être à la merci, subissant la violence inhérante des soins hospitaliers. C'était un mal nécessaire, mais qui demandait toujours, en plus de des dégat de la maladie en elle-même, un temps de reconstruction.

Léandre serra la main de Jessica. La peur était là. Elle bouffait sa cage thoracique. L'angoisse en elle-même aggravant les choses. Mais le juge avait trop conscience de la situation, il ne pouvait pas ne pas avoir peur. Il faisait face à une peur primaire dévorante, celle de sa propre mort. Il entendit Jessica l'appelait et commençait à paniquer. Il était incapable de répondre, effectuant juste une légère pression sur la paume de celle-ci. Il était encore là. Léandre sentait qu'il y avait une petite lumière au fonds de son cerveau. Une sorte néon, un élément lui hurlant qu'il ne devait surtout pas se laisser sombrer... Le juge se retrouvait face à lui-même. Il pouvait abandonner, là, maintenant, et abandonné cette respiration sifflante. La mort lui faisait peur, et pourtant il savait que cela serait une solution pour éviter beaucoup de souffrance. Il ne suffirait que de quelques instants. C'était difficilement descriptible. C'était se laisser tomber dans un froid chaleureux. Léandre ne pouvait pas mentir, pas face à tout ce qu'il était. Pas face à ses peurs, des angoisses, ses pulsions, ses rêves et toutes les cellules de son corps. C'était un dialogue muet, une décision prise dans le silence. Il ne faisait pas le choix le plus simple, mais celui qu'il fallait. Léandre était une mauvaise herbe, il s'en sortirait toujours.

Le juge n'entendait pas les sirènes des urgences, écoutant juste ce qu'il se passait dans la pièce. L'avocate finit par l'abandonner, mais rapidement deux autres mains attrapèrent les sienne. Léandre avait du mal à comprendre ce qu'on lui disait, mais signala qu'il était encore conscient en émettant une pression. Il était toujours là et il n'avait pas l'intention de mourir aujourd'hui.

Léandre respirait mieux. Il ouvrit les yeux, geste inutile mais montrant qu'il était tout à fait conscient. Sa tête était droite, posée dans un oreiller. Le juge était coincée au fonds d'un lit d'hôpital. Il ne voyait rien, mais l'odeur et l'ambiance sonore étaient uniques. Il était incapable de dire combien d'heures avait pu s'écouler entre l'appel des urgences et sa présence ici. Léandre avait une aide respiratoire, un simple apport d'oxygène. Pendant un moment, les soignants avaient voulus l'entuber. Mais ils avaient renoncés quand l'état du juge s'était stabilisé. Le brun n'avait pas exactement compris la chronologie des évênements, ni quels traitements on avait pu lui administrer, mais le fait était que le pire était passé.

Le juge était resté conscient. Ce qui lui avait évité de passer par la phase de ré-animation. Il avait pu entendre le personnel hospitalier discuter. Léandre avait beau avoir été dans un état lamentable, il avait bien senti qu'il y avait eut une véritable phase de vide. Personne n'avait compris pourquoi son état de dégrader aussi vite, puis quelqu'un avait proposé un traitement. Si Léandre avait compris, ils avaient parlé d'antidote... Il y avait-il réellement eut empoisonnement ? Le juge n'avait eut aucune confirmation. On l'avait laissé dans le noir. Léandre ne supportait plus cette ignorance, tout en savant qu'il n'était pas en capacité de réfléchir. Il prenait tout pour argent comptant, n'arrivant plus à avoir de recul. Il était en beaucoup trop mauvais état pour avoir une réflexion critique.

Léandre essayait de faire le bilan de la situation, mais il était trop épuisé pour pouvoir réfléchir. Sa respiration était posée. Il entendait le bruit de l'électrocardiogramme. Le juge avait aussi une perfusion où un traitement était diffusé directement dans ses veines. Il fallait voir ce qui allait se produire par la suite et surtout dans combien pourrait-il être de nouveau sur pied. Léandre fuyait le monde hospitalier... Il aurait tout donner pour avoir une bonne santé. Il y avait trop de mauvais souvenirs en ces lieux.

Léandre était dans un grand état de fragilité, au tant physiquement que psychologiquement. Son esprit était encore impacté par la violence de l'accident qui lui avait arraché son père mais aussi la vu. Il fallait qu'il s'en aille. Cela faisait trop pour lui. Dans cette chambre d'hôpital, Léandre n'était plus personne. Il n'était plus qu'un patient parmi tant d'autre avec au dossier médical lourd. Le brun ne pourrait pas dormir ici. Il arriverai à sommeiller, mais à dormir profondément. Il y avait trop de bruits et surtout trop d'angoisse. Son corps, tout comme son esprit saturaient. Mais il n'était pas seul, du moins, pas totalement. Jessica avait été présente, elle lui avait parlé à plusieurs reprises. Le juge ne savait plus quoi penser d'elle. Il se savait en danger. Elle n'aurait jamais dû le voir dans cet état... C'était une avocate aux dents longues, une femme de pouvoir qui n'hésitait pas à jouer hors cadre. La maladie de Léandre était une pain béni pour elle. Le juge savait qu'il allait devoir faire avec désormais... Mais c'était un terrain surlequel le juge ne souhaitait pas s'aventurer. Léandre voulait se définir autrement que par sa santé.

Le juge entendit la porte de la chambre s'ouvrir. Il tourna naturellement sa tête dans la direction du visiteur. Ses yeux étaient ouverts et ses pupilles bougeaient de nouveau. Léandre espérait que cela soit sa belle-mère. Il avait besoin que ses proches soient auprès de lui. Le juge resta silencieux, économisant son énergie et attendant simplement que la personne se présente.

Léandre avait la tête tournée vers l'avocate. Les yeux ouverts, ses pupilles s'étaient posées sur le visage de la rousse. Il était calme, sa respiration était régulière. L'épuisement le maintenait dans un état tranquille. C'était donc Jessica qui était là. Elle n'était pas partie. Elle était resté. Léandre écouta, mais fut incapable de saisir toutes les informations qu'elle venait de lui donner. Mais le juge comprit que la situation était gérée, que Mélanie avoir les informations nécessaires et qu'il allait rester là pendant quelque temps. Léandre pouvait donc rester au repos.

A la question de Jessica, Léandre répondit "Non.". Il avait soif, il sentait que son corps réclamait de l'eau, mais il ne laisserait pas l'avocate le maternait. Surtout elle. Léandre ne se sentait pas de lever la main et d'attraper un verre. Cela lui demandait trop d'énergie. Léandre essayait de conserver ce qui lui restait de dignité. Le juge expliqua sincèrement "Je vous remercie pour d’avoir été là. ». Il ne commenta pas plus. Jessica avait appelé les urgences, elle l’avait aidé et elle était restée. Léandre ne savait plus quoi penser d’elle. Il n’avait pas imaginé qu’elle ait pu avoir autant d’empathie… Elle aurait pu partir et le laisse mourir, pourtant, elle était restée. Il y avait donc peut-être un cœur derrière ce vernis pourri ? Le juge était perdu, ayant beaucoup de mal à réfléchir. Mais il ne se laisserait pas avoir par cette image de bon samaritain.

Léandre resta dans le silence. Que pouvait-il dire de plus ? Il était évident que Jessica allait profiter de la situation. Que cela soit de façon conventionnelle ou non. Le juge réagissait comme un animal blessé. Si elle commençait à jouer sur le personnel, utilisant la santé de Léandre pour l’atteindre, alors le juge se montrerai intraitable. Il n’y aurait plus de combat avec un respect mutuel… juste une volonté de détruire l’adversaire. Le juge prit la parole, avec une voix faible mais déterminée.« Jessica, je vous demande de rester discrète par rapport à ce qui s’est passé… ». C’était sa vie privée, sa santé, ses difficultés en tant qu’homme. Cela ne regardait personne d’autres. Et pourtant, il y avait des requins prêts à tout utiliser contre lui. C’était une terrible faiblesse. Ses adversaires allaient enfoncer le couteau dans la plaie, mais Léandre était prêt à rendre coup sur coup. Il n’aurait aucune pitié. « Si des informations sur ma santé étaient amenées à être diffusés dans le palais… Je saurai que c’est vous. ». S’il tombait, Léandre trouverait le moyen de faire sombrer les autres avec lui. Il n’hésitera pas, en particulier avec Jessica. Le juge savait déjà que son état de santé allait être le sujet principal des rumeurs, il n’avait pas besoin que quelqu’un rajoute de l’huile sur le feu. Il ne se laisserait pas mettre au placard. Léandre avait besoin de ce boulot. Il n’était plus rien sans son statut de juge.

Pourtant à cet instant, Léandre n’avait plus rien de dangereux. Il était trop épuisé pour réfléchir ou pour se revêtir de son armure habituelle. Le cœur était à vif. Il se savait totalement incapable de tenir une joute verbale.

Dans son état, Léandre était incapable de réfléchir. Il n'arrivait plus à maitriser les sous-entendus, ni les nuances de la langue. Jessica avait repris sa posture professionnelle. S'éloignant, étant de nouveau plus froide. Mais elle était encore très silencieuse, ne laissant ressortir qu'une petite pique envers Mélanie. L'avocate était exaspérée et elle avait coupé court à toute conversation possible, s'éloignant aussitôt. Pourtant, avec cet événement, Léandre venait de lui montrer toute une partie de sa vie privée. Mais il restait un juge et elle une avocate. Alors qu'elle s'en allait, juste avant qu'elle ne franchisse la porte, Léandre ne pu s'empêcher de l'interpeller "Jessica...". Il avait parlé un peu plus fort et cela lui avait demandé un effort, usant de cet oxygène précieux.

Les pupilles brunes de Léandre était posées sur elle. Il aurait aimé la voir, pouvoir observer son visage, ses expressions. Le juge aurait voulu l'analyser un peu plus. Ne serait-ce que pour savoir comment elle était habillée et si elle avait l'air fatigué. Léandre n'avait aucune idée de combien de temps elle avait pu attendre. Il voulait juste que leur échange se termine sur autre chose qu'un jeux de pouvoir, que le fait d'être renvoyé à leur rôle respectif. Le juge n'avait pas voulu être désagréable. Mais il n'était plus en capacité d'agir autrement. Léandre aurait voulu en connaître un peu plus sur la rousse, mais il ne connaissait que son univers professionnel. Il voulu dire quelque chose, mais resta dans le silence. Il ne pouvait pas s'exprimer. S'il disait ce qu'il avait vraiment sur le coeur, cela serait autant de pointes aiguisées qu'elle retournerait contre lui. Avec Jessica, la question n'était pas de savoir si elle allait lui plantait un couteau dans le dos, c'était de savoir quand.

Léandre éprouvait de la fascination pour l'avocate. On la disait belle, mais surtout elle était intelligente, orgueilleuse, mauvaise et rusée. C'était une femme de pouvoir, arrivant à mettre le monde à ses genoux par tout les stratagèmes possibles. Mais de tout cela, le juge savait qu'il se devait de ne rien dire. Ses sentiments et son corps étaient ce qui risquaient de le perdre. Malgré son visage cireux et la fatigue pesante, Léandre fit un léger sourire. Les choses ne changeraient jamais. Il y aurait toujours ce jeux de pouvoir. Rien ne pourrait être simple. Le juge termina simplement "A bientôt.". Il allait tout faire pour revenir rapidement. Léandre avait peut-être était mis hors circuit pour le moment, mais ce n'était pas définitif.