Louisa avait un peu honte. Elle avait fait pas mal de merde ces derniers temps… La blonde avait lâché plein de gens. Elle avait partagé son temps en Emily – qui allait de plus en plus mal – et chez JB. Le moral de Louisa oscillait, entre le bon et le très mauvais. Il y avait des moments où elle avait l’impression que tout allait bien se passer, puis cela retombait brutalement. Emily avait des sautes d’humeurs terribles. Louisa les subissait, sans savoir vraiment quoi faire. La rousse était son amie, elle ne la lâcherait pas… Mais de l’autre Louisa avait la sensation qu’un gouffre s’était formé entre elles. Qu’Emily avait désormais une carapace d’épines et de verres cassés, et que plus Louisa essayait de l’aider, plus elle s’abimer. Mais la musicienne ne savait pas quoi faire, elle était coincé dans cette situation avec la terrible sensation que tout finirait par exploser à un moment donner. Et elle avait peur de ce moment. Car si Emily allait de plus en plus mal, si c’était de plus en plus violent, quel serait le point culminant ?

Il pleuvait en cette fin de matinée. Louisa avait décidé de s’éloigner de tout le monde, d’essayer de se vider un peu la tête. La présence du flic avait canalisé sa vie, aidant à que tout ne parte pas en vrille. Louisa trouvait doucement, mais surement, de la sécurité. Mais la blonde ne pouvait pas changer si vite. Elle avait besoin de liberté, de temps perdu et de divaguer. Louisa avait un sweat, une capuche recouvrant sa tête. L’humidité était rentré dans ses vêtements. Elle n’allait pas attraper la crève, elle avait l’habitude de cette situation. Ses pas l’avaient portés dans ses coins connus, pour au final qu’elle passe devant le local de la croix rouge. Elle s’arrêta devant, hésita, puis décida d’entrer dans le bâtiment. Il y avait peut-être Sean. Il avait dit qu’il travaillait là… Enfin, peut-être probablement. Louisa ne savait plus très bien.

Sean c’était un mec vraiment sympa. Cela faisait parti des gens qui lui redonnait un peu foi en l’humanité, et surtout des hommes en général. Il était venu la voir à l’hosto, il l’avait protégé et avait été cool avec elle. Et Louisa… Ben Louisa n’avait rien fait. Elle ne l’avait pas tenu au courant. Elle ne lui avait rien dit. C’était nul comme comportement. Elle demanda « Bonjour, je crois qu’il y a quelqu’un qui s’appelle Sean qui bosse ici ? Est-ce qu’il est là ? ». Au tant essayer, elle n’avait rien à perdre de toute façon.

Visite à la Croix-Rouge
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Le local central de La Croix-Rouge est anonyme. De l’extérieur c’est un bâtiment en mauvais état. La façade n’est plus de la première jeunesse. Les murs sont sales. Un endroit hybride entre centre de trie des dons, hébergement et cantine. A l’intérieur c’est une fourmilière. Quasiment tout est décloisonné. Les bénévoles sont repérables uniquement parce qu’ils ont un veston gris. A la zone d'accueil il y a une table qui sert de borne d'accueil. Un vieux PC de seconde main fait un bruit de tonnerre. Un casier rempli à ras bord de dossier en papier.

Une femme est assise sur une chaise de braderie derrière la table. Elle quitte tout de suite la liasse de papier des yeux pour regarder la jeune fille. C’est Laure qui est là ce matin.

_ Bonjour ! Un léger accent étranger trahit les origines françaises de la bénévole. Son visage transpire d'amabilité. Sean ? Oui ! Je l’ai vu tout à l’heure. Elle capuchone le stylo et fait le tour de la table pour venir près de notre visiteuse. Sans avoir encore que c’est elle la protégée de Jean-Baptiste. Londres est petite quand on y pense.

_ Il est en cuisine. Venez. Je vous y emmène. Laure lui indique la direction de la droite avec le sourire. Elle l’escorte dans le gigantesque espace d’un pas dynamique. Il pleut on dirait ? On a des boissons chaudes. Je m’appelle Laure. Lui dit-il en lui tendant la main, tout en marchant. Elles avancent au milieu d’un mélange de sans abris, de pauvres, de familles en difficultés et de bénévoles. C’est un autre visage de la grande ville. Ici tout le monde a l’air assez paisible. On croise des discussions amicales, des marques de solidarité, des rires édentés.

Charpentier ralentie quand elle arrive devant une grande cuisine de chantier. Elle avance le long de la rampe de service en cherchant me cherchant des yeux. Je suis en pleine préparation des sandwichs du midi.

_ Sean ! J’ai le casque sur les oreilles. Y a un morceau des Dafk Punk qui me fait danser alors que je fais la mise en place des rondelles de cornichons sur les pains. Quand je suis à des postes mécaniques je le fais en musique. Ca m’aide à garder une cadence sans trop m’emmerder. MILLER! Là, j’entends. Je baisse le casque. Je fais volte-face.

_ Wep ?! Je croise les yeux malicieux de Laure. Je souris. Je vois alors Louisa. Tiens ! Ca c’est une surprise. Hey Louisa ! Salut ! Je retire totalement mon casque. Je me rapproche du bar pour réduire la distance. Je suis content de la voir. Laure sourit. Elle pose une main sur le dos de Lou pour la saluer avant de repartir à l'accueil. Merci LAURE! La bonde fait un signe de la main sans se retourner. Je souris. Je me focalise sur la musicienne. Elle a l’air d’aller mieux physiquement. Mais j’ai l’impression que son esprit est toujours chahuté. Va falloir que je creuse un peu.

Je cherche un des gars pour prévenir que je fais une pause prépa. Une fois que c’est fait je retire la charlotte, et les gants.

_ J’arrive. Ca va toi ? Je marche en parallèle du bar, je fais le tour, je la retrouve. Je lui désigne une table ronde dans notre dos pour aller se poser. Je chope deux tasses propres sur le bar et une cafetière. Je viens poser le tout sur la table. Je cherche des yeux un truc à grignoter. Doit nous rester des chaussons aux pommes. T’en veux ? Je trouve un petit stock sur une autre table et je dépose la panière devant nous. Je tire la chaise de récup pour poser mon derrière. Je te sers ?

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Louisa se sentait un peu mal à l'aise d'être là, quelque peu intimidé. Elle avait aussi peur de se faire engueuler... C'était courant ces temps si et c'était aussi pour ça qu'elle avait eu le besoin de s’éloigner. La jeune femme était un peu paumé et ne savait pas comment gérer Emily. Heureusement, Lemoine était là, assurant à la blonde un point d’encrage bienvenue. Elle avait des moments compliqués, mais en passant du temps avec le flic, elle se canalisait. Par moment Louisa avait des pensées froides, se demandant s’il n’aurait pas été mieux qu’Emily ne meurt avant qu’ils la retrouvent. Quelque part, c’était ce qui était arrivé. Emily était tellement cassée…

La musicienne suivit Laure, attentive à son environnement. C’était un peu étrange, une sorte de joyeux bordel. Elle avait l’air gentille, en fait tout le monde avait l’air de l’être. Louisa n’était jamais venu dans le coin, mais peut-être qu’elle aurait dû. La blonde regardait les gens, se demandant bien pourquoi ils faisaient ça. Elle ne comprenait pas réellement, se disant qu’ils étaient plus là pour trouver un moyen de se pardonner eux-mêmes, comme pour essayer de racheter quelque chose. Il y avait forcément quelque chose à gagner. On ne pouvait pas utiliser du temps et de l’énergie pour les autres sans gagner quelque chose.

Louisa vit Sean. Il était marrant avec sa charlotte sur la tête et son casque. Après avoir réussi à l’interpeller, Laure finit par s’éloigner. Louisa lui fit un signe de tête « Merci. ». Depuis quelques temps, la blonde essayait d’être plus poli. Sean n’avait pas l’air en colère contre elle, mais plutôt content de la voir. Louisa éprouva un peu de soulagement. Elle répondit vaguement « Ouais… ça va. ». Question banale qui attendait une réponse banale. La blonde ne se sentait pas de dire grand-chose de toute façon.

Elle alla s’asseoir à la table que venait de désigner Sean. Louisa glissa les mains sous la table, ayant désormais le réflexe de cacher ses poignets. Les traces de cordes avaient presque disparu. Jean-Baptiste avait eu la raison, cela finirait par disparaître. Louisa répondit « Oh, oui avec plaisir ! ». La blonde n’avait pas manger de viennoiserie depuis un moment. Pour le café, elle répondit « Non merci, j’aime pas trop ça. ». Louisa n’aimait pas le gout amer du café, son palais finirait par changer un jour.

Louisa regarda Sean en silence. C’était un mec sympa et elle ne savait pas trop quoi dire. Elle expliqua « Ch’uis désolé de ne pas avoir donner de nouvelles. ». La blonde aurait pu trouver un tas d’excuse, mais elle ne justifia pas. Elle n’avait juste pas communiqué. « C’était nul de ma part, désolé. ». Louisa avait encore les vêtements trempés. Elle baissa les yeux, regarda la table, puis releva le regard. La blonde commenta « C’est sympas de travailler là. ».

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Je reste en suspend dans mon mouvement.

_ Ah! Vrai, que j’ai le réflexe de la boisson caféinée. On carbure à ça pendant les services de nuit. Il doit bien nous rester du lait chaud de ce matin. Je souris à Louisa avant de filer vérifier ça en cuisine. La chance est avec nous, il en reste. Merde, je n’ai pas pris la tasse. Bon bah celle-ci ira très bien. Je regarde s’il n’y a pas un paquet de biscuits. Ah bah voilà. “Langue de chat” importées par notre amie Laure. Je trouve que ça va bien avec un “Coco”. Je dépose la tasse fumante sous le nez de la chanteuse. Je n’ai pas encore mis du sucre. Je pose un petit paquet de sucres en poudre en sachet. A elle de faire sa popote.

Je me verse ma tasse, alors qu’elle prend la parole, la première. C’est cool. Ca veut dire qu’elle a envie de causer. Je sais qu’elle n’est pas une bavarde. En plus, après ce qu’elle a vécu, pas facile d’aller à la pêche aux nouvelles sans être intrusif. Je pose la café.

_ Excuses acceptées ! J’en souris, un grand sourire amical. Je me suis inquiété pour elle, oui. Mais, à aucun moment je n’ai eu à lui reprocher ce silence. Qu’elle se sente concernée par ça me fait plaisir. Ca veut dire, qu’à un moment donné, elle a pensé à me donner des news. Merci. Je prend la viennoiserie du haut. Prends. Ce qui n’est pas mangé sera jeté. Les normes d'hygiènes sont strictes. Même une association ne peut pas passer au-dessus. Ça nous révolte souvent. Mais bon, c’est ça ou rien. T’en fais pas. Le principal c’est que tu ailles mieux. Franchement, je suis super content que tu te sois souvenue et que tu passes. Ca fait plaisir. Je l’observe davantage.

_ Oui ! Je lance un regard vers l’espace ouvert et grouillant. Il y a une bonne ambiance dans cette ONG. Y a une motivation générale. C’est cool ! J’ai déjà été bénévole quand j’étais étudiant. Après, avec l’Armée c’était devenu compliqué de faire les deux sérieusement. Ca doit faire quoi, deux ans que je file un coup de main ici ? Je préfère à l’asssos des Anciens Combattants. Je vois des gens différents. J’ai l’impression de participer à quelque-chose. A défaut de m’engager avec MSF, ici c’est bien. Ca permet que je fasse autre chose que geeker de mon temps libre. Oh si je m’écoute No Life m’irait TRÈS bien. D’autant que je me suis fait quelques potes en ligne avec qui on joue pas mal. T’as pas froid ? Je lui désigne son swat trempé. Je peux te filer mon sweat le temps de faire sécher celui-là. Tu veux ? L’habitude de toujours en avoir un dans mon sac. On ne sait jamais quel temps il va faire dans cette ville. Je n’aime pas avoir froid. Les nuits glacées dans le désert m’ont peut-être rendu plus sensible ?

_ Alors ? Met moi au parfum ? T’en es où ? Un album en préparation ? Ce serait cool. Non, je ne vais pas lui parler direct de sa santé. Ce serait trop bourrin. Je ne veux pas qu’elle se referme. Je croque dans la viennoiserie. Ca fait du bien cette petite pause improvisée. Et ton amie ? Emily ? Ca va ? Je me doute que tout n’est pas réglé en si peu de temps. Mais on peut tout de même espérer une évolution.

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Louisa vit Sean se relever, pour au final revenir avec un chocolat chaud et une boite de sucre. Il était vraiment gentil. Le blonde prit un sachet de sucre et en fit couler dans sa boisson. Louisa mangeait très sucré, sans doute beaucoup trop. Elle éprouva du soulagement quand ses excuses furent acceptées. Louisa prit une viennoiserie, l’écoutant parler. Cela lui faisait bizarre que des gens puissent balancer des viennoiseries de la sorte. Elles étaient encore bonnes pourtant. Devant le commentaire de Sean, elle eut un sourire. C’était agréable à entendre.

Réagissant aux propos de Sean, la blonde demanda "Ha oui ? Tu joues aux jeux vidéos ? Genre, à quoi ?". Louisa aimait bien passé du temps devant la console. Elle n'en avait pas eu le luxe depuis longtemps, mais c'était le genre de chose qui était vraiment cool à faire. Elle était curieuse de savoir à quoi il jouait. A des jeux de tir probablement. Des trucs de mec quoi. Louisa sentait l'humidité qui était rentré dans son sweat. Elle répondit, mentant allègrement "Non ça va.". Elle n'avait pas envie de l'enlever, ni de récupérer un sweat de Sean, même temporairement. La blonde avait souvent des fringues trempées, elle survivrait.

Louisa répondit doucement "Je joue plus beaucoup. Enfin toujours un peu, mais moins qu'avant.". La blonde ne jouait que lorsqu'elle était chez JB. Cela lui manquait. Mais faisait attention. Le fait qu'elle passe du temps chez le flic énervait beaucoup Emily. Alors parfois, elle préférait ne pas passer pour éviter une dispute. C'était plus simple. Pragmatique, Louisa commenta "De toute façon, j'arriverai pas à faire d'album. Des petites chansons à balancer sur internet oui... Mais le reste, ça marchera pas.". Depuis tout ce qui était arrivé, Louisa avait l'impression que tout était devenu plus compliqué. Ce n'était pourtant pas totalement vrai. C'était son rapport au monde qui avait changé et surtout, surtout, Emily. Elle allait pas bien. Toute l’énergie de Louisa disparaissait dans cette relation. C'était trop compliqué à gérer.

A la dernière question de Sean, Louisa baissa les yeux, laissant son regard filer sur le côté. Elle termina par relever le regard. "Non. Elle va pas bien du tout.". Elle repensa à la fois où elle avait attaqué à Sean à l'hosto "Tu sais, elle est pas comme ça normalement. Pas comme tu l'as vu à la dernière fois.". Louisa amena ses deux mains au tour de la tasse de chocolat, réchauffant ses doigts. Elle avait fait attention à bien ramener ses manches pour cacher ses poignets. "Emily c'est vraiment une chouette fille. Ca arrive qu'elle se batte, mais pas comme ça c'est passé avec toi. Faut pas lui en vouloir.". Pour son comportement en général, pour sa façon d'être.

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Pas de pull sec. Très bien. Je n’insiste pas. Elle sait ce dont elle a besoin. Je pense qu’elle sait aussi qu’elle peut me demander les trucs. Enfin j’espère !

_ Des jeux de tactiques militaires de base. Ca me permet de garder les réflexes. Très peu de personnes de ma vie actuelle sont au courant que j’ai eu une première “carrière”. Très courte la carrière. Jack le pirate parce que ça a été un sujet de base. Liam parce qu’il m’aide à contenir les PTSD avec les médocs. Mais sinon, personne. Je pense que c’est mieux comme ça. C’est un sujet qui met vite les civils mal à l’aise. Je ne les blâmes pas. Personne n’apprécie de se souvenir que c’est la merde partout sur la planète. Bref. Là je suis un testeur pour les nouveaux games indé’. J’aime bien. Ca permet de découvrir des trucs cools. Parfois, les mecs n’arrivent pas à aller jusqu’à la grande distribution. C’est un milieu de requins. C’est con. Le jeu peut être un vrai outil de partage. Tant qu’on sera dans ce modèle économique de toute façon y'aura pas de changement des règles.

_ J’comprends. Pas facile de tout gérer en même temps tout ça. Moi m’a bien fallu trois quatre ans, après l’accident pour toucher de nouveau à la batterie. Donc je comprend. La musique ça demande d’avoir la tête un minimum bien. C’est sûrement trop top pour elle. Mais bon, faudrait pas qu’elle arrête totalement ce qui lui fait du bien. Je suis bien placé pour savoir que c’est important d’avoir ce style d’activité. Sans quoi… on tombe encore plus vite dans la spirale. En tous cas ce serait dommage que tu lâches. T’as un truc avec la musique. J’aimerais bien que Nessa puisse l’entendre jouer. Elle donnerait un avis plus “pro”. Mais ça fait un moment qu’elle ne répond plus à mes messages. Je ne sais pas ce qui se passe. Et ma proposition tient toujours. Si tu as envie de venir nous voir jouer. Ou de partager une scène un soir. Franchement, ça me ferait plaisir ! C’est vrai ce serait sympa de partager ça avec elle. On fait ça pour le plaisir. Zéro pression. Je ne veux pas qu’elle pense que ce serait genre le gros défi du siècle. On est très loin de ça!

Je me suis douté que ce n’est pas réglé pour son amie. Ca me désole d’apprendre que je ne me suis pas gourré. Mais ça explique aussi pourquoi Louisa ne s’est pas plus montré. J’hoche de la tête sans sourire cette fois. Je me demande comment on peut aider une jeune fille comme Emily. Je suis dans le soin. Ce qui lui faut c’est un soutien mental.

_ T’en fais pas pour ça. J’ai bien compris. Je ne lui en veut pas du tout. Je l’observe. Allez ouvre toi Sean. Peut-être que mon exemple pourra les encourager. Sait-on jamais. J’suis passé par ce type de troubles. Je sais ce que c’est. Ce n’est pas facile. Pour personne, ni elle, ni toi. Oui, je sais que mes parents et mon frère ont souffert. Quant à Lydia… Lydia est celle qui a le plus subi ce que j’ai traversé. J’aurais donné ma peau pour leur épargner ça. Malheureusement, je n’avais aucun contrôle sur rien. Tout ce qui a pu m’aider c’est le temps et les thérapies. Je sais que je n’en suis pas encore sorti totalement. Mais la clef c’est de continuer. Maintenant je l’ai compris. Le temps ça aide quand même. Tu vas voir. … Elle a un suivi psy ? Je sais que c’est une question personnelle. Mais dans ce genre de cas faut oser. Sinon je ne peux pas aider. J’en connais des sympas. Je suis sûre qu’ils trouveraient un moyen pour l’argent. Ils l’ont bien fait pour moi au début. Parce que c’est pas avec la petite pension d’ancien combattant qu’on peut se payer tous les soins. C’est un autre débat.

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Louisa écouta attentivement les réponses de Sean. Lorsqu’il expliqua que les jeux vidéos lui permettaient de conserver ses réflexes, elle ne comprit pas que c’était lié au fait qu’il fait l’armé. En réalité, la blonde n’imaginait pas une seule seconde qu’elle était face à un ancien militaire. Elle pensait que c’était pour garder ses réflexes de jeune adulte, et non finir comme des vieux. Louisa commenta devant l’explication de Sean. « Ha ouais, ça doit être cool ! ». Tester des jeux vidéos en avance, ça devait être sympas.

Par rapport à la musique, Louisa répondit « Non, mais j’arreterai jamais vraiment de jouer. Si ça m’arrivai… ch’ais pas. Ca serait comme si j’étais morte. ». l’adolescente parlait franchement, sur-utilisant les mots. Mais la musique c’était ce qui la rendait vraiment heureuse. Parfois, elle avait des coup de blouses, à se dire qu’elle avait tout de même une petite vie minable. Mais la musiques, lorsqu’elle jouait, chantait, c’était ce qui la rendait vivante. C’était ce qu’elle créait, c’était à elle et c’était unique. Dans ces moments-là, elle savait qu’elle n’était pas totalement perdu.

Devant la proposition de Sean, Louisa répondit « Donne moi tes dates, je viendrai peut-être vous voir. ». Le tout était dans le peut-être. « Mais ça dépendra de comment je m’organise. Ch’ais pas trop. J’aime pas me balader toute seule la nuit… Et puis Emily voudra pas venir avec moi. ». Voir Sean en concert allait forcément l’énerver. Louisa ne voulait pas encore se disputer avec elle. La rousse lui faisait peur par moment. Mais derrière la colère et la peur, Louisa savait qu’il y avait toujours Emily. Elle finirait par revenir, un jour.

Alors que Sean expliquait qu’il était lui aussi passé par de moments difficiles, Louisa répondit spontanément « Mais t’es vivant. ». Entier et bien dans sa peau, en apparence du moins. L’adolescente se repris aussitôt. « Pardon c’était pas ce que je voulais dire. J’ai parlé trop vite. ». La blonde continua, essayant de se justifier « Je veux dire… ça à l’air d’aller. T’as l’air normal. ». Louisa n’arrivait pas à s’exprimer. Elle ne voulait vraiment pas être méchante. Elle le regarda longuement. Qu’est-ce qu’avait pu traverser Sean pour avoir de ce « genre de trouble » ? Et puis, est-ce que ça voulait dire qu’il pouvait retomber ? Et dans ce cas, comment ça se passait ? Emily était du genre à changer du tout au tout en quelques secondes. Est-ce que Sean pourrait faire pareil ? Louisa commençait à se sentir mal à l’aise, ne sachant clairement plus quoi penser ou quoi faire.

C’était clairement positif le fait que Sean reconnaisse le fait que Louisa pouvait aussi être en difficulté. C’était rassurent pour elle. La blonde se sentait plus normal. A la réflexion sur le temps, l’adolescente répondit « J’espère. ». Elle eut un petit moment de silence, puis continua « Non. Elle voit pas de psy... Elle voit pas grand monde en fait. Sauf par moment, où elle s’en va je sais pas trop où. ». Emily avait des activités légales. Des choses auxquelles elle refusait de mêler Louisa. La blonde n’avait pas insisté. Mais elle avait peur. Emily n’était pas rentré une fois. Elle avait peur que ça recommence. Emily marchait au bord du gouffre, se rapprochant toujours plus de l’abime. « T’as des noms ? Enfin, un psy qui pourrait l’aider ? Faut que ça soit une femme. » Emily ne pourrait jamais parler de tout ça à un homme. Et si Louisa avait des tendances misandres par moment, ce n’était rien par rapport à son amie. Emily les haïssait. Louisa termina « Pour l’argent, on se débrouillera. ». Elle trouverait une solution. Si ça permettait à Emily de se stabiliser, alors cela valait le coup de faire des sacrifices.

Louisa termina par demande « Tu sais, la dernière fois, t’avais dit que tu pourrais m’apprendre à tirer. Je voudrai que tu m’apprennes. ». L’adolescente avait encore le son des coups de feu qui résonnait dans ses tympans par moment. Mais elle voulait apprendre pour dompter sa peur. Et surtout, Louisa ne voulait plus être la proie. La prochaine fois qu’elle se retrouverait dans une affaire comme celle-ci, elle voulait être de l’autre côté de la barrière. Cela serait eux qui allaient être marqué, pas elle.

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Louisa a une vocation pour la musique. Je comprends tout à fait ce qu’elle veut dire. Il y a une époque où j’ai pu dire la même chose qu’elle sur la vie militaire. Plutôt crever d’une balle que de faire autre chose de ma peau. Une amnésie plus tard et on passe de Captain de l’armée de terre de UK a bénévole pour la Croix-Rouge. Ca m’a pris au moins quatre ans pour passer à autre chose que la rage ou la dépression. Ca fait à peine un an que je ressasse moins. Mais, je ne pense pas qu’un jour j’aurais fait le deuil complet de ma première vie. C’est impossible. J’étais fait pour être un soldat.

_ Wep! De mémoire, on joue au 4 birds en octobre. C’est en début de soirée. Mais faut que je te te confirme ça. T’as le même numéro de téléphone ? Je veux juste savoir où envoyer les infos pour être sûre que ça lui arrive. Après j’ai bien compris que la miss n’est pas trop téléphone. J’ai bien tenté de prendre des nouvelles par ce biais. Mais j’insiste bah y en a pour qui ce n’est pas le truc. Je pourrais te redéposer chez toi après le concert. Y a aucun souci! Quand on me présente un souci moi je cherche une solution. C’est tout. Elle prend ou elle ne prend pas. Je ne vais pas me formaliser. Au moins, elle sait que cette option existe. Toute façon tu sais que si t’as besoin on s’arrange.

Houla. Je vois bien que la demoiselle s’enfonce toute seule dans le sable. Ce n’est pas un sujet facile qu’on aborde. Si j’ai évoqué ma vie c’est surtout pour l’aider à relativiser. Mais on dirait que ça lui complique plus les choses. Je ne pense pas que lui parler de mon passé va aider sur ce coup. Je n’y tiens pas particulièrement d’ailleurs. Va pour un petit mensonge par omission. C’est truc à la con qui font moins de mal que de bien.

_ C’est vrai que je vais mieux oui. Allez courage Lou. Je sais bien que là ça en a pas l’air. Mais il va y avoir des jours de bonheur. Des vrais. Ca prend le temps qu’il faut. Je ne m'attarde pas sur le comportement d'Emily. Chaque cas est unique. Pas de modèle. Je ne veux pas non plus qu'elle interpréte mal ce que je pourrais observer. Ce n'est pas à moi de faire des hypothèse. Je suis là pour elle, Louisa, avant tout.

_ T’inquiète pas pour ça non plus. L’isolement ça arrive souvent. Je lui souris parce que j’imagine les dizaines de questions qu’elle se pose à propos de son amie. Je ne suis pas un professionnel. Ceci dit, j’ai aussi vue d’autres cas. Malheureusement, les anciens militaires sont plus souvent des patients psy qu’on ne se l’imagine dans le civil. Personne n’est fait pour tuer, pour faire la guerre. Personne rentre sans séquelle. C’est un mythe ça. Une femme ouais. La seule qui m’a suivit ici dans le civil. Je prend mon téléphone pour avoir accès à la fiche contact. Je lui dicte : Catherine Kent. Le numéro et l’adresse du centre social où elle fait les permanences. C’est une vraie douce. Je dis que c'est la caractéristique principale de cette doc! Bon si je sens que ça s'y prête je la lui recommanderait à elle aussi.

Je range mon téléphone. Là Lou fait une demande que je n’attend pas. Je me souviens parfaitement de l’autre connard. Les potos du foot lui ont rendu une petite visite surprise cet hiver. J’ai entendu qu’il a pas pu poser le pied sur le sol pendant un moment. Oeil pour oeil dent pour dent.

_ D’accord. Alors deux options. Soit je lui propose d’aller dans un coin de forêt paumé pour faire de l’entraînement sous les radars. On serait libres de faire comme on veut. Soit je lui propose d’aller sur une base de tir avec tout le protocole et compagnie, les gens… potentiellement les anciens. Je ne sais pas ce qui est le mieux dans son cas. Stand de tir ou forêt ? L’un ou l’autre je me charge de l’orga et du matos. Juste, tu me dis. Autant que ce soit elle qui fasse le choix. Elle sait mieux moi dans quelles conditions elle sera à l’aise. Et tu me dis quand tu veux commencer. Allez, en trois quatre jours je peux trouver le matos. Si elle veut on peut commencer la semaine prochaine.

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Louisa répondit "Oui, j'ai le même numéro." Elle savait qu'elle ne l'utilisait pas assez, mais elle avait eut pas mal de soucis avec ces derniers temps. Elle comprenait bien la question de Sean. Ce dernier lui offrait plusieurs solutions et c'était chouette. Elle expliqua "Je vais voir comment je vais faire et je te dis. Merci en tout cas.". C'était vraiment un gentleman. Louisa eut un sourire. C'était simple en fait et cela faisait du bien que cela se passe de cette façon. Louisa avait son lot de péripéties avec Emily.

Louisa écouta attentivement ce que disait Sean, notant l'adresse de cette psy. Cela pourrait peut-être aidée Emily. Il fallait absolument tout tester. Louisa voulait l'aider, faire ce qu'elle pouvait. Elle était démunie. Louisa commenta "Je vais voir avec elle. Peut-être que ça pourra aider.". Elle ne savait pas réellement. Mais il fallait tout tenter. Déjà, le fait que cela soit une femme allait aider. La douceur était aussi ce dont avait besoin Emily. C’était compréhensible.

La blonde fut attentive aux réactions de Sean. Il était toujours d’accord pour lui apprendre à utiliser une arme à feu. Louisa trouvait cela important. Cela la rassurait. Elle avait été littéralement marqué par les évènements qu’elle avait traversé. La jeune femme voulait pouvoir répondre. Maitriser ces armes à feu lui permettrait aussi d’avoir moins peur… Et c’était aussi de dont elle avait besoin, se rassurer. La blonde prit le temps de réfléchir. Elle ne savait pas quoi donner comme réponse. Louisa n’était jamais aller en forêt. C’était un environnement qu’elle ne connaissait tout simplement pas. Louisa était une fille de la ville, ne sachant pas du tout se débrouiller dans un milieu qui n’était pas urbain. Elle répondit « Au stand tir, cela mieux. » C’était plus facile, plus rapide, plus accessible. Louisa pourrait y aller plus facilement, et il y avait moins de risque de transport.

La jeune femme répondit « La semaine prochaine ? Dis-moi la date, l’heure et l’endroit, je me débrouillerai. ». Louisa n’allait pas en parler à JB, ni à Emily. C’était son secret. Pour Louisa, il était évident que ses proches seraient contre cet apprentissage… Mais la blonde avait besoin de liberté. Les maintenir dans l’ignorance serait plus simple. « Envoie-moi un sms, cette fois je répondrai ». Elle avait été nulle à ce niveau, elle ne recommencerait pas. Malgré les vêtements humides, Louisa se sentait bien ici. Elle avait les mains autour de son mug. La blonde sentait que la conversation s’essoufflait d’elle-même. Elle n’avait rien de spéciale à dire, mais appréciait simplement la présence de Sean. Louisa n’en demandait pas tant que ça… Un sentiment de sécurité, le respect de ses besoins primaires et un peu de considération. Elle souffla, laissant ses nerfs se relâcher. Elle regarda Sean et fit un sourire simple « C’est cool. » Il n’y avait pas grand-chose à dire d’autre. Calme, Louisa était dans de bonnes conditions pour discuter. Mais elle comprenait bien qu’elle faisait parasite dans la journée de Sean, il avait d’autre choses à faire.

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Au moins je ne me fais pas envoyer dans les cordes. Un bon début pour qu’elle consente à accepter un chouilla plus de soutien. Je ne suis peut-être pas le gars qu’il faut pour ça. Mais faire un pas c’est une avancée. Kent est une femme qui sait mettre les autres en confiance. Je ne serais pas étonné qu’elle arrive à aider autant l’une que l’autre. La balle est dans le camp de Louisa. De ce côté je ne peux pas vraiment faire plus. Si ce n’est l’encourager.

Je lui fais signe que je note pour ce qui est de sa formation au tir d’arme. En stand le mieux ce sera qu’elle se prenne un forfait. Ce qui revient cher surtout pour une fille qui n’a pas de job fixe. Mais si on va dans celui de mon ancien officier chef y a bien moyen que je négocie un tarif exceptionnel. J’ai des arguments pour négocier.

_ Ca roule, j’te dis ça rapidement, miss. Oui avant de lui confirmer quoique ce soit, je vais bien préparer les choses. Autant lui épargner des complications. Elle a eu sa dose. Je vais faire en sorte qu’au moins pour ça ce soit facile pour elle.

Je vois qu’elle se décontracte un peu plus. C’est bien! Ca veut dire qu’elle se sent un peu plus en confiance. Je suis content de voir ça. Je lui rend un sourire. Elle a bien fait de revenir. C’est cool d’avoir quelqu’un d’autre sur qui veiller en fait.

_ C’est cool ouais! Je me sens un peu en mode grand frère. Je comprends ce qu’a pu ressentir Ethan pendant l’adolescence, et surtout la mienne. Je l’observe en me sentant un élan de tendresse pour elle. Je ne pense pas quon qu’on se connaisse encore assez pour qu’elle prenne ça sans se braquer. Je vais attendre. Et puis, dans ces cas là, y a les actes pour dire ce que l’on ressent. Je vais devoir retourner au comptoir. Ca te dit de venir me tenir compagnie ? Comme ça tu me donneras tes réf’ musicales que j’écoute ça! Ce n’est pas parce qu’elle n’est pas une bavarde que je ne vais pas la retenir au chaud encore un peu. Elle est mieux ici que dehors. Ou bien à supporter les pressions de sa pote.

Je laisse la panière là sur la table. Je prend ma tasse avec moi. C’est parti pour la migration. Je lui montre le tabouret qu’elle peut prendre sans souci. Je passe d’hier pour aller enfiler une charlotte propre et des gants. La clientèle ne manque pas. Jamais de vraie pause à la Croix Rouge.

Eden Memories