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Take me to church ft. Colin
Prem Hadid
Take me to church ft. Colin
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Prem avait promis à Violet de ne rien faire de stupide avec leur week-end ensemble. Est-ce stupide d’observer au loin des criminels transporter des caisses d’alcool jusque dans ce bar miteux? Sans doute, mais moins que s’il en avait été proche. Le sens du danger est relatif après tout. Pour le journaliste, l’amoncellement de tonneaux vides dont le bois commençait à moisir représentait un barrage sécuritaire suffisant entre lui et les hommes de mains armés. Dans ce genre de quartier, il fallait faire avec ce qu’on avait sous la main.

Ajustant l’objectif de sa caméra pour zoomer sur le contenu des caisses, Prem retenu son souffle pour appuyer sur le déclencheur. Parfait. La photo ne risquerait pas d’être floue. Personne ne douterait qu’il s’agissait de bouteilles d’alcool. Le propriétaire devançait les accords d’assouplissement du gouvernement, on dirait. En même temps, sa source était un béton. Alice venait manger presque tous les jours à la Gurdwara, et aimait beaucoup bavarder. Ça tombait bien, puisque lui aussi… La prostituée n’avait aucun client régulier que Prem pouvait considérer comme digne d’intérêt, comme un politicien, un magnat de la bourse, ou mieux, un aristocrate. Elle tenait cependant le propriétaire du Black Lady en haute estime. Un «bon p’tit gars» comme elle disait, chez qui elle pouvait «se rincer le gosier».

Il n’en fallut pas plus pour piquer l’intérêt de Prem. Après avoir passé toute la campagne électorale à réaliser interview sur interview, il tardait au journaliste de retrouver l’enquête de terrain. Au pire, ça ne donnerait rien, mais c’était toujours mieux que d’être torturé par les anecdotes insignifiantes de son collègue Rodrigo sur son ulcère à l’estomac.

Plus qu’un dernier cliché, se dit-il, en pointant sa mire sur le propriétaire, qui devait environ être du même âge que lui. Au moment d’appuyer sur l’objectif, un crissement de pneus le fit sursauter. Prem poussa un juron, avant d’apercevoir la voiture de patrouille, et entendre le bruit maintenant familier des coups de feu.

Les flics!

S'ensuivit un véritable chaos. Les yeux arrondis par la panique, Prem bondit sur ses pieds. Il se mit à courir vers l’extérieur de la ruelle, puis dans la rue. La peur au ventre, le journaliste jeta un œil derrière lui. Si les flics le trouvaient là, il n’avait pas le moindre doute sur le sort qu’il lui réserverait. Trop de fois Prem avait été malmené par les Forces de l’ordre pour leur accorder la moindre confiance. Les bruits de pas derrière lui n’étaient heureusement que ceux du pauvre propriétaire du Black Lady.

Putain… pourquoi il le suivait? Les flics étaient probablement à sa recherche! Il faudrait trouver une planque, et une très bonne cette fois. En entrant dans une nouvelle ruelle, Prem aperçu d’autres policiers en pleine arrestation. Le quartier subissait bel et bien une descente! Il prit ses jambes à son cou pour faire demi-tour, puis, devant lui, une solution divine apparut : une église en reconstruction. À cette heure de la nuit, aucune âme n’y serait. Jouant de flexibilité pour se frayer un chemin au travers de l’échafaudage, Prem y grimpa pour accéder enfin à l’intérieur, non sans donner un coup de main au jeune tenancier.

« Merde! » lâcha-t-il finalement, avant de glisser contre le mur pour reprendre son souffle. « Tu as de la chance que je n’ai pas réussi à te photographier correctement, parce que je te jure que si les flics viennent te chercher jusqu’ici, je me serai assuré que ta tête soit en première page demain matin! ». Bien que seul l’éditeur en chef possédait le droit de veto sur le sujet de la Une, et que Prem était bien loin d’avoir une telle autorité au New Herald, cela faisait tout de même beaucoup de bien à dire. Néanmoins, le défoulement devrait attendre. Dieu seul savait combien de temps ils devraient rester planqués ici, dans cette église. C’était d’ailleurs la première fois que Prem entrait dans le lieu de culte des chrétiens.

Inspirant par le nez pour retrouver son sang froid, Prem finit par pousser un soupir. « Désolé. Je n’aime pas les flics », dit-il avant de tendre la main à son compagnon d’infortune. « Prem Hadid, reporter au New Herald. Je connais l’une de vos habitués. Alice. Une pipelette. Ça vous parle? »
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Prem Hadid
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LONDON PEOPLE
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Etat Civil : En couple (Violet Crawley)
14.03.21 4:58
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[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Take me to ChurchPrem et Colin

Il avait marché, le long des trottoirs mal famés, sous les réverbères à la lumière sale. Il avait vu, perçu, entendu, la misère des femmes qui se vendent, des pauvres qui mendient, des humains qui courent derrière quelques pennys et sans soleil.

Colin est un artiste des planches, un acteur de rideau à moitié baissé, à la fleur de cœur qui se fane, qui se grisaille, quand il se souvient que l’être humain n’est qu’une indigence de plus que l’univers a créée sans s’en soucier. Certaines nuits sont plus denses de ces souvenirs flétrissants, plus chargées d’odeurs de la réalité percutante, plus pénibles.
Cette nuit est l’une de celles-là.

Pour le « Drunken Fish », la dernière livraison s’était mal passée. Quelques tonneaux furent abimés lors du déchargement. Une perte sèche, pour le pub comme pour le petit trafic de Colin et de ses amis, s’était fait ressentir, dans le bois des tonneaux, dans la monnaie sonnante et trébuchante, dans les relations entre le Drunken Fish et le Black Lady.

Alors il est là, droit dans son manteau long et noir, rêveur sous ses longs cils velours, et il observe, tant bien que mal, le concret que les hommes ont arrangé à leur façon, afin de rendre les choses plus efficaces, plus rapides, plus délétères, aussi. Il y a quelque chose de crissant, de pourrissant, dans cette recherche d’efficience et de productivité que le propriétaire du Black Lady doit appliquer et qu’il applique, un peu malgré lui, malgré ses tripes, malgré sa peau. Qui se serrent, qui se contractent, qui se refroidissent, sous la pluie fine et le noir des heures de chats errants.

Un cri.

Les flics…

Pour qui ? Pourquoi ?

On ne sait. On ne veut pas savoir, pas tout de suite. On se sauve. On court. On se met à l’abri, on se pagaille et on déraille, des jambes, de l’esprit, des souffles. Souffles erratiques, souffles buées dans le froid, souffle court, pris de court, tout va trop vite.
Les pas, bam bam, tap tap, les courses rapides, moins rapides, les résonnances appuyées, sur les pavés sans fleur, des pas d’hommes, souvent. Des cris brefs, des mots durs, orduriers, sans or noble, que du gras, des injures morsures de la pauvreté, mordorure des caniveaux lancée à la gueule des flics.

Colin court une église abandonnée qu’on veut refaire. Relancer ? Reconstruire… Pour qui ? Pourquoi ?
La silhouette haute, longue, lance sa flèche vers les nuages. Les échafaudages sont des squelettes trop droits pour être aimables. Les monticules de gravats, de plâtre, de mortier, forment des barrages synthétiques qui salissent tout autour d’eux. La porte semble scellée. En hauteur, une fenêtre éventrée.

Un homme lui tend la main. Cette silhouette… Il l’a vue courir.

Le propriétaire du Black Lady prend la main tendue et se hisse vers la fenêtre ouverte à tous les vents.

- Merci…

Souffle-t-il dans un effort.

Les deux hommes se retrouvent à l’abri, un abri temporaire, en hauteur.
Le souffle froid contre leurs vêtements. L’humidité qui tombe, pas loin, et que la peau sent comme un parfum liquide, omniprésent, même si elle ne touche pas directement. Les voix, plus loin, plus bas, affaiblies par la distance.

L’autre homme se laisse glisser contre le mur.
Sa colère. Sa frustration. Lancées, comme ça, comme des balles contre les murs déplâtrés, écorchés, écornés… contre le sombre, contre l’isolement, contre le visage de Colin.

Il fronce les sourcils. Ne comprend pas tout de suite.

Puis…

Un revirement, chez cet homme.

Colin tend la main aussi, il serre.
Il sourit.

- Je m’appelle Colin.

Il s’assied à son tour.
Il est dans l’anxiété, celle que les policiers arrêtent le livreur, fassent parler le propriétaire du pub, découvrent l’adresse du Black Lady…
Il est dans l’amusement, celui de voir un reporter qui n’a pas pu avoir la photo de son jour, qui a l’impression de jouer aux gendarmes et aux voleurs…
Il est dans la curiosité, celle qui va vers les autres, tous les autres, même les monstres et les bébés, les reporters aussi…

Son cœur bat la chamade, son cœur tambour tonitruant, la cadence du stress contre ses côtes, contre ses tempes, l’anxiété assourdissante et qui ne veut cesser…

- Mmmh… je vois, pour Alice…

Il a un demi-sourire, pas très content.

« Alice, pipelette, va… » pense si fort le propriétaire du Black Lady que ses paupières se plissent pour former deux petits yeux horizontaux… Il lui en touchera deux mots, tout de même, à Alice.

Puis il soupire. Alice ne sait pas se taire, mais il doit bien le reconnaitre, il n’est pas toujours méfiant non plus…

Il a ce défaut, de ne guère jauger les gens avant de leur accorder de l’attention et de la tendresse. Il est avec les humains comme avec les chats : il se baisse vers eux sans trop réfléchir, il les caresse, il les papouille et il leur donne des mots gentils pour un ronronnement perdu ou des yeux cajoleurs tout jolis.

- J’espère tout de même qu’Alice va bien…

Et devant lui, il a l’impression floue que le reporter a encore un côté candide. Il ne saurait dire d’où vient cette impression, ce sentiment qui flotte autour de lui, qui lui tire les épaules en arrière, qui l’empêche de vouloir se défendre, qui lui murmure, au creux de l’oreille, que ce journaliste-là peut faire des dégâts par conviction sincère plus que par malice destructrice.

Il se trompe peut-être.

Il imagine les réactions de ses deux amis, Jacob et Kane, s’il leur demandait leurs avis.

Mais à Londres, tout le monde a un avis. Il y a autant d’avis que de londoniens.

Certes, ses amis ont sûrement un avis plus circonstancié…

- Au moins, vous savez pourquoi je fuis les policiers…

Glisse-t-il comme un aveu.

Ses yeux s’ouvrent plus grands, sur un regard surpris, dans une bruine légère qui tombe légèrement inclinée et qui les frôle du bout de ses gouttes minuscules.
Les cheveux de Colin se bouclent un peu, quelques mèches retombent devant son front et ses yeux.

- Pourquoi les policiers vous en voudraient ? Vous devez leur rendre service, en enquêtant sur des sujets comme l’alcool ?

La question pose la réponse en même temps.
Il y a des journalistes si curieux, si imprégnés de cette volonté de réussir ou de savoir, qu’ils en oublient certains instincts de survie… comme, par exemple, ne pas se mettre à dos celles et ceux qui pourraient les protéger, éventuellement, en cas de problèmes générés par leur profession peu confortable.

- A moins que vous n’ayez enquêté sur les policiers eux-mêmes ?

Du bout de son index, il tambourine ses lèvres qui rient déjà. Il imagine aisément la tête de certains enquêteurs enquêtés.

- On dit que c’est sauvage et rancunier, ces bêtes-là…

Il a un petit rire, comme une petite lame de scalpel, lancée dans la nuit.
Il ne déteste pas vraiment les policiers, mais devoir faire attention à toute heure, sentir ses nerfs crispés au moindre bruit rappelant la police, n’aide pas Colin à les ménager.

- … il faut leur donner de l’alcool et des femmes, pour les amadouer.






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06.04.21 2:18
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Prem Hadid
Take me to church ft. Colin
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À sa question au sujet de la santé d’Alice, Prem haussa les épaules. Il l’apercevait de temps en temps seulement, presque toujours lorsque les jalebis, pâtisseries typique de l’Inde, sucrées et frites dans l’huile, étaient au menu des langars. Le chef, Jasmeet, ne les ratait jamais, et aussi inévitablement qu’un poisson attiré par un appât, le point faible d’Alice, comme celui de beaucoup de gens, étaient les pâtisseries. Le souffle court et les joues rouges de Prem, essoufflé par sa course, trahissaient également une certaine tendance à la gourmandise. Il devait faire plus de sport…

Les yeux noirs du journaliste fixèrent la nef de l’église, les sourcils froncés en un pli curieux. Il baissa la voix, pour ne pas provoquer d’écho. « Je préfère passer inaperçu, quand je le peux. Je ne suis pas particulièrement apprécié à Scotland Yard. Toutefois, j’aimerai bien qu’ils puissent penser comme vous ». Après tout, Colin, puisque c’était son nom, n’avait pas totalement tort. Sans doute, dans un monde meilleur, journalistes et policiers auraient pu collaborer. Cependant, la police avait tout intérêt à garder toutes informations sensibles pour eux, et inversement, les journalistes souhaitaient la diffuser, pour le bien du public.

Colin releva un autre point intéressant. Quand la police elle-même est coupable de crime, alors qui peuvent les en tenir responsables? Une enquête sur les policiers corrompus… Prem en eut des étoiles dans les yeux. « Ohohoh… de l'alcool et des femmes, hein? » répéta-t-il, sourire en coin. « Vous semblez drôlement savoir de quoi vous parler. C’est donc ce que vous faites, au Black Lady? Vous amadouez les policiers de cette façon pour qu’ils vous laissent tranquille? » Finalement, si le tenancier continuait d’être aussi bavard, son enquête ne serait peut-être pas totalement à l’eau. Peut être pourrait-il simplement… changer son sujet d’enquête. La corruption policière était certainement possible, par les temps qui courent. S’attaquer aux Forces de l’Ordre était presque aussi dangereux que de s’attaquer aux mafias, mais cela valait bien la peine que le New Herald expose ce genre de lacunes au public.

Prem avança plus profondément dans la nef. Tout de ce lieu de culte était différent du sien. Les tapis de prière étaient remplacés par de longs bancs en bois ouvragé et vernis. D’impressionnantes colonnes de pierres sculptés, dorés, retenaient une balustrade faisant tout le tour de l’église, composée de plusieurs autres bancs, et d’un gigantesque orgue. Tout était dans la démesure, la grandiosité. Les fenêtres de la nef et du choeur de l’église illustraient en leur vitrail des scènes, sans doute tirées de la bible. En dessous, trônait le Christ, cloué à sa croix. « Je n’étais jamais entré dans une église auparavant. C’est impressionnant. À quoi sert ceci? » demanda-t-il en désignant le bénitier. Il assumait que les fidèles devaient s’y laver les mains, avant d’entrer. Les sikhs avaient le même principe, excepté qu’ils se lavaient les pieds. « Excusez-moi, vous n’êtes peut-être pas croyant…? »

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Prem Hadid
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09.04.21 23:15
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