Il faisait particulièrement beau en cette fin d’après-midi. Rose attendait ses invités. Elle n’avait pas tout à fait l’esprit tranquille… Elle avait voulu faire bouger les choses, mais finalement, tout était resté dans le même état. Le nom des Connington était de nouveau sali par celui d’Eokeus. Et quand à Steve… La marquise ne savait plus comment agir. Elle était démunie. La noble gardait tout de même un œil sur son neveu, mais celui-ci était interné en hôpital psy et ne semblait plus jamais pouvoir en ressortir. Rose avait tenté de rentrer en contact avec lui, mais le jeune homme était devenu violent et extrêmement virulent envers elle. Il la détestait et désignait comme responsable de toute ce qui avait pu lui arriver. Rose était dans une impasse.

C’était donc un véritablement soulagement lorsque l’agent de police avait pris contact avec elle. Rose avait décidé de répondre favorablement à cette demande. Peut-être que les choses allaient pouvoir évolué… Bien que la noble n’eût que peu d’espoir. Il fallait que le drame arriver pour que l’état puisse enfin véritablement intervenir.

Bien habillé, les cheveux coiffé, élégante et stricte, Rose était prête à accueillir ses hôtes. Du thé était prêt dans le petit salon. Elle posa son regard sur sa montre. La marquise n’appréciait pas les gens en retard.

Lady Connington répondit calmement « Je vous en prie, asseyez-vous. ». Calme, elle fit taire l’agacement sous-jacente. La réalité était qu’elle était mise à mal par le sujet et que tout devenait plus difficile à gérer. Rose était une membre de la noblesse et cela transpirait à travers tout les ports de sa peau. Avec des gestes mesurées, elle suivit les règles ancestrales de cette cérémonie du thé. Elle servit une tasse, puis tendit la précieuse boisson à son interlocuteur. La céramique était belle et fragile. Rose savait que l’agent de police n’était pas venu de loin, alors elle ne l’intérogea pas sur ses déplacements.

Bien plus direct que les autres nobles, la rousse démarra l’entretien. « Je vous ai invité à venir car je souhaite échanger avec vous sur Eokeus. » Sur cette secte, sur ce parasite rampant et violent qui dévoraient le plus faibles. Rose les haïssait. Si la rousse n’était pas quelqu’un de cruelle, elle souhaitait tout le malheur du monde au dirigeant de ce groupe. Elle voulait qu’il souffre… et cela finirait par arriver d’une manière ou d’une autre.

Consciente qu’il fallait mettre de l’eau dans son vin, Rose expliqua « Mon neveu, Steve Connington, a été hospitalisé, puis interné à l’hôpital psychiatrique de Londres. ». C’était une véritable déchéance pour la famille Connington. Heureusement l’information était restée secrète… du moins, tout le monde faisait semblent de ne pas savoir. Rose n’était pas dupe. « Pour le reste, il n’y a eu aucun mouvement du groupe du moins les derniers événements. » Pauvre Violet, Rose en avait encore mal au cœur. Elle se demandait s’il fallait qu’elle se retire de toute mondanité pour éviter d’en arriver là. La marquise était devenue de plus en plus discrète avec le temps. Eokeus lui pourrissait la vie.

Rose posa sa tasse de thé sur la table, puis donna un regard franc envers Daniel. « L’enquête a-t-elle pu avancer ? Est-ce qu’il est possible de faire quelque chose contre ce groupe ? » La marquise avait l’impression de faire tout ce qu’elle pouvait… mais ce n’était vraiment pas suffisant.

Rose avait posé sa tasse thé et écoutait attentivement son interlocuteur. Pragmatique, elle faisait attention à toutes les informations que pouvait lui donner l’agent de police. L’enquête avancée déjà un petit peu, c’était un premier pas en avant. La marquise comprenait pourtant clairement qu’ils étaient encore dans une phase d’immobilisme. Elle eut un moment de silence, puis prit le temps de ramener la tasse jusqu’à ses lèvres. Que leur restaient ils comme solution ? La rousse prenait le temps d’évaluer toutes les possibilités.

Elle répondit « Malheureusement, je ne suis pas certaine que les choses puissent évoluer positivement. » Elle demanda, franche « Pensez-vous qu’il est encore possible pour les membres de la secte de retrouver une vie normale ? » Rose posa la tasse. « Pour ma part, je ne pense pas que cela soit le cas. » Elle avait fait un deuil pour arriver à penser ça. Il était difficile de perdre ses proches, encore plus lorsque ce n’était pas une véritable mort qui les attrapait.

La marquise questionna Daniel West « Que comptez-vous faire désormais ? » Il y avait-il d’autres possibilités qu’elle n’avait pas encore exploré ? Ce n’était pas impossible. La noble ne pouvait pas tout savoir. Elle expliqua « Pour ma part, je suis allée voir mon neveu a plusieurs reprises. » Elle avait essayé, par principe plus que par conviction. Elle avait avancée doucement et avait tout fait pour ne pas le brusquer, mais Steve était tout sauf communicatif. C’était un garçon qui était devenu encore plus renfermé qu’auparavant. Rose avait honte de ressentir de telle chose, mais elle avait un puissant sentiment de malaise en sa présence. Cet enfant était angoissant. « Peut-être que vous pourriez aller le voir ? Steve a peut-être des informations intéressantes. » Elle argumenta « D’autant plus qu’il semble être assez proche du Gourou. » Elle avait presque craché les derniers mots. Qu’elle haïssait cet homme. Cet individu méritait de mourir et de souffrir atrocement.

La marquise soupira légèrement « Vous êtes un homme, la communication se fera peut-être plus facilement. » Être femme dans cette société était toujours compliqué par moment, surtout pour ces individus qui s’obstinaient à conserver une pensée rétrograde.

Rose ravala un soupir. Ils avançaient certes, mais lentement, très lentement. Trop lentement en réalité. La marquise en avait marre. Elle avait du plus en plus de mal. La police enquêtait au moins. Rose se demandait ce qu’ils pourraient découvrir.

Les réponses de l’agent lui donnaient un peu d’espoir. Rose souhaitait qu’il ait raison. Elle se demandait seulement combien de temps cela pouvait prendre, un mois, une année, plus ? La marquise espérait que cela finirait par arriver. Il s’était déjà passé tellement de temps qu’elle n’était plus à une année près. La marquise voulait juste que ça s’arrête, qu’il n’y ait plus de nouvelles victimes et cela serait déjà un bon début. Pour le reste, Rose espérait pouvoir trouver quelque chose pour motiver sa famille à s’éloigner. Au niveau de son frère, elle doutait sérieusement qu’il soit récupérable. Pour Steve… Il y avait bien eu cette fille. Valentine ? Il n’en avait que très peu, mais assez pour que Rose en soit marqué. Son neveu lui paraissait totalement amorphe et sans émotion, mais avec cette fille, il se passait forcément quelque chose.

Rose répondit « Essayez, il n’y a plus rien à perdre désormais. » Que la Steve la haïsse ? C’était déjà le cas. Pour le reste, la marquise n’imaginait pas comment cela pouvait être pire.

La rousse expliqua simplement « Il est nécessaire d’appeler l’hôpital et de voir avec eux pour prendre un rendez-vous, cela doit pouvoir être fait rapidement. » Elle se leva et attrapa de quoi écrire. « Il vous faudra une autorisation de ma part. » De la part du tuteur légal, puisque Steve était encore rattaché à elle quelque part. D’une écriture fine, avec de grands déliés et sans faute, Rose écrivit rapidement une autorisation pour le policier. Elle lui tendit le document « Tenez, il sera aussi nécessaire de présenter ce document au personnel hospitalier. » La marquise marqua un temps et termina par dire « Je vous fait confiance. » Et lui demandait aussi de lui donner de l’espoir. Rose espérait que cette secte finirait bien par arrêter ses violences.

Elle demanda « Il y avait-il un autre point que vous vouliez aborder ? ». Rose était disponible et prêt à répondre à toutes les questions nécessaires.

La marquise répondit simplement « Je n’y manquerai pas. ». Elle voulait tout faire pour les choses avancent. Donner des nouvelles informations à la police était une bonne pratique pour elle. De cette manière, elle pourrait peut-être finir par avoir les forces de l’ordre de son côté. Du moins, elle l’espérait. « Je compte aussi sur vous pour faire la même chose. » La Rousse avait prononcé ses derniers en posant son regard droit dans celui de l’enquêteur. Il était un membre des forces de l’ordre, mais elle était de la famille Connington. La noble savait très bien qu’il n’était pas obligé de lui transmettre de telles informations, mais c’était du donnant donnant. Rose était une personne exigeante, sèvre au tant avec elle-même qu’envers les autres. Elle n’attendait que la réussite.

La marquise expliqua tout de même « J’ai fait de mon mieux pour donner toutes les informations que j’ai en ma possession. » Chose qui avait été un effort pour sa part. Les drames se réalisaient dans le silence et la solitude, pas sous au devant des projecteurs et sous le regard de la police. Madame Connington avait un effort conséquent, chose que les gens de petites naissances ne semblaient pas comprendre. Rose ne leur en voulait pas réellement, bien qu’elle trouvât cela irritant. Ils avaient leur propres problèmes de petites personnes. « J’ai été transparente. » Bien plus qu’elle ne l’aurait dû. Malgré son apparente tranquillité, Rose n’était pas sereine. Elle avait déjà reçu un avertissement. Quel serait la suite ? Après un œil animal, que pouvait-il bien arriver ? La marquise savait très bien que les limites de la décence avait déjà été moult fois dépassé par Eokeus, ils ne reculeraient devant rien.

La lady prit son thé et ne proposa pas de raccompagner l’agent. Le majordome allait le faire ou Daniel serait bien capable de se débrouiller par lui-même. Elle le salua néanmoins « Bonne journée Monsieur West, j’espère avoir de vos nouvelles rapidement. ». Que le silence ne soit pas le seul maitre mot. La peur devait changer de camps.