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[CLOS] « Nous sommes réunis ce dimanche pour rendre un dernier hommage à Sir… » Ft Lady Crawley
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« Nous sommes réunis ce dimanche pour rendre un dernier hommage à Sir John… »

Vincent ne s’attendait pas à se retrouver en cette matinée pluvieuse à l’oraison funèbre de Sir John Estate, Bt. Il connaissait le baronet de longue date, leurs enfants avaient essuyé les mêmes bancs au collège d’Édimbourg. Cette mort si soudaine le bouleverse. Voilà pourquoi il se retrouve ici, sur cette colline, sous une pluie battante, à peine protégé malgré son imposant parapluie.

Un tabloïd avait fait ses choux gras de ce fait divers plutôt déconcertant, survenu jeudi dernier. Un 4x4 avait percuté la limousine du noble. Son chauffeur fut tué sur le coup, mais Sir John Estate n’avait pas été touché. Pourtant, il décéda quelques secondes après avoir ouvert la portière. D’après le journal, il aurait succombé à une crise de panique. Les quolibets ne manquaient pas dans le tabloïd toujours plus “trash”. Quant aux occupants de l’énorme Range Rover, ils n’avaient écouté que leur courage et pris la fuite. Ce drame étant survenu dans la nuit, peu avant la mise sous presse, le tabloïd s’était empressé de rédiger cet article sans vraiment avoir vérifié les informations. Sur les réseaux sociaux, beaucoup critiquent le manque de sérieux de l’article. D’ailleurs, Vincent se demande encore quelle part de l’histoire est réelle et quelle part a été brodée par ce journaliste peu scrupuleux. Les articles les plus récents évoquent une crise cardiaque. À 48 ans ! Déconcertant !

À côté du cercueil, les témoignages se succèdent, la pluie s’est arrêtée et Vincent referme son parapluie. Il le retourne pour l’égoutter et plante sa pointe dans le sol avant de poser ses mains gantées sur la crosse. Il reste ainsi, debout, immobile dans son complet noir. Il a évidemment choisi la plus grande sobriété en ce moment de recueillement. Il tente de ne pas trop piétiner sur place pour ne pas mettre plus de boue sur ses chaussures. Selon les dernières volontés du défunt, l’enterrement a lieu au sommet d’une petite colline de ses terres, une colline exposée aux intempéries. Seuls le cercueil et l’autel improvisé sont abrités par un imposant chêne. Le public tente de survivre au climat, mais aussi à la boue qui pourrait faire chuter tout un chacun.

Vincent connaissait bien Sir John Estate, il connaît les raisons de ce lieu, de cette dernière volonté plutôt loufoque. Il évite d’y penser pour ne pas rire en regardant l’assistance, trempée. Pour détourner son attention, il tourne la tête et cherche du regard le fils de John. Il parvient à le distinguer malgré les trois rangs qui les séparent. Courageux, le jeune homme enlace un instant sa mère qui ne parvient plus à retenir ses larmes. Il éprouve beaucoup de tristesse pour cet enfant qui perd un parent alors qu’il n’aborde que la vingtaine.

Évidemment, Vincent ne peut que faire le parallèle avec sa fille. Certes, c’est elle qui a coupé les ponts, mais comment surmonte-t-elle l’absence de son père ?

Vincent parcourt ensuite les premiers rangs. La famille évidemment et la noblesse d’Écosse ! D’ailleurs, il ne manque pas de remarquer l’élégante princesse de Hanovre. Quelle surprise de voir la Lady anglaise, en Écosse ! Cela fait une trotte depuis les terres de Crawley tout au sud de l’Angleterre ! Il se souvient avoir échangé avec elle à plusieurs reprises à propos du Brexit. Il l’apprécie beaucoup et il a toujours été surpris par son regard, parfois si triste. Elle a épousé Lord Edward de Crawley, un homme que Vincent n’apprécie pas, mais alors pas du tout. Comment apprécier ce suprémaciste blanc qui fait fortune dans la vente d’armes ?

Il allait le chercher du regard quand l’assistance émet un soudain brouhaha. Au premier rang, on se précipite ! Quelqu’un est allongé ! À même l’herbe ! Que se passe-t-il ? Vincent s’avance. Un petit pas. Puis deux. Il remarque la mère du défunt, allongée, à même l’herbe et la boue. Perdre un fils, ce doit être si difficile. La pauvre femme vient de faire un malaise et chacun tente de l’aider. Quelqu’un appelle un médecin. Un autre demande de l’espace autour d’elle. Le clerc agite sa bible comme un éventail. Pour une fois, ce livre ne fera pas de mal !

Finalement, l’enterrement aura été éprouvant. Bien sûr, la mère de John s’est remise tant bien que mal de ses émotions. Certains présents ont été conviés à un dernier buffet, selon les dernières volontés du défunt. Ils se dirigent tour à tour vers leurs voitures ou leurs limousines qui attendent en file indienne sur la minuscule route communale qui passe à une centaine de mètres. Mais Vincent est resté là. Les plus pressés partis, il s’est approché de la tombe et l’observe avec une certaine nostalgie.

À côté de lui, Vincent sent une présence. Il a pensé qu’il s’agissait de l'évêque.

— Une crise cardiaque à 48 ans… Il n’y a pas vraiment de justice devant la mort.

Vincent s'attend à ce que l'évêque lui réponde une banalité, comme « les voies du Seigneur sont impénétrables », mais ce n'est pas lui qui se tient à ses côtés. Vincent fait un pas en arrière, pour découvrir qui s'attardait devant la tombe.
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04.06.21 22:14
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Violet Hanovre Hadid


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Ft Vincent MacAskill


Tyrgan, mon ami, je ne t’ai poiint donné de nouvelles avant, j’espère que cette lettre ne te trouvera pas plein de rancœur à mon égard. Je t’aurais écrit plus tôt si j’en avais trouvé le temps. Tu sais comme cela est, toi. Le temps fil, plus vite que son ombre, lorsque l’on est à quelque-chose que l’on aime. Je ne vois pas les journées passer. Pourtant, elles sont d’une intensité rare ! Je ne m’étais pas sentie aussi imprégnée depuis ma première année d’université. Quelle joie de pouvoir enfin passer du temps avec des chevaux. J’étais enchantée. Malgré la situation, je crois que j’avais bien fait de maintenir ce stage.

C’est un sujet beaucoup moins heureux qui m’amène à t’écrire. Sans doute as-tu appris le funeste accident qui a coûté la vie à Lord Estate, Bt ? Je n’en savais rien moi-même, car j’essaie de ne pas me faire happer par les turpitudes du monde. Ma mère m’a écrit vendredi dernier me commandant expressément de me rendre aux funérailles de cet infortuné Baron. Je t’avoue, sans détour, que je ne comptais pas y aller. J’apprécie d’être ici incognito. C’est d’ailleurs ce qu’il faut tant que je suis la Baronne de Crawley. Mais, j’ai reçu une invitation officielle dans la même journée. Je ne pouvais pas refuser cela à sa pauvre veuve. Elle méritait mon attention et mon effort. Sais-tu qu’il n’avait pas encore cinquante ans ! Comme c’est jeune pour mourir d’un infarctus! Pauvre lady Estate, pour peu qu’elle apprécie son mari.

Je n’avais pas emmené de tenue appropriée. Je n’aurais pas pensé me rendre à des funérailles ici. J’ai donc demandé à Poppy d’aller en boutique, pour trouver une robe, qui aille aux circonstances. Surtout qui cache mon secret. Nous allions au premier rendez-vous médial dans quelques jours. J’avais hâte. J’ai bien entendu fait livrer, une composition florale, sur le lieu de la cérémonie. Ce serait plus simple. Il n’y a pas de personnel dans mon logis. J’y réside dans la plus stricte sobriété. Je pense que cela est une bonne façon pour moi de savoir à quoi ressemble une vie… simple. Pour l’instant, j’appréciais l’expérience.

J'emprunte un parapluie à ma logeuse et son mari accepta de me conduire sur le lieu de la cérémonie. Le site, le cadre, tout renforçait la tristesse de l'événement. Tu te doutes bien qu’en tant que Princesse d’Hannovre j’ai assisté à de nombreux enterrements. Cela ne m’aide pas à les affronter. Je n’aime pas cela. En pensant à la mort brutale de cet homme, je songeais à la façon dont j’avais failli perdre le père de mon futur enfant. Je pouvais me mettre à la place de cette famille. C’était si pénible. Je me fis discrète. J’étais là par respect pour les endeuillés. Mais je ne voulais pas que l’on me remarque. Jusqu’ici j’avais réussi à ce que ma présence ne soit pas trop connue. C’était le mieux.

Je sentis que l’assistante fut prise d’une émotion. Je n’en compris la raison qu’en voyant l’amas d’hommes qui fit cercle autour de la vieille femme. Je reculais de côté pour qu’elle puisse avancer en étant soutenue. Je reconnue le jeune homme à sa droite. Je me souvenais que nous avions eu quelques bals ensemble. Il avait toujours été aimable. Il est plus jeune qu’Iris et orphelin de père, déjà. Quelle tristesse… Je lui adressais mon regard le plus compatissant possible. Ils m’avaient confié au repas. Je ne pensais pas m’y rendre. C’était imprudent.

Pour autant, je ne voulais pas repartir sans avoir glissé un mot au Sir disparu. Maintenant que la foule quittait les lieux, j’avais un peu de latitude. Je profitais de ne pas être totalement frigorifiée encore pour avancer. Je passais par l’extérieur du cercle, allant à contresens du flux de circulation. Je restais à petite distance de l’homme qui se recueillait devant le cercueil. Sa silhouette ne m’était pas tout à fait étrangère. Mais je n’arrivais pas à me souvenir. Les émotions avaient tendance à me couper du reste du monde, comme toujours. Je débutais une prière par habitude.

La voix écorchée de l’Ecossais me parvint. Lorsqu’il recula à ma hauteur je pu voir son visage. M. MacAskill. Je ne l’avais pas revu depuis quelques années maintenant. Je n’étais pas encore fiancée à Edward la dernière fois que nous avions échangé. Je sentais qu’il était vraiment touché par la mort de cet homme. Sans doute se connaissaient-ils ? Le connaissais-tu personnellement ?

-“ Non, c’est vrai. Mais il y a de l’égalité. ” Je lui adressais un respectueux signe de la tête. Je détournais mon regard de son profil pour contempler cette boîte en bois. Nous étions si peu de choses. “ La mort ne fait pas de différence. ” Peut-être que ce n’était pas une mauvaise chose de se confronter aux lois naturelles. Là où il n’y avait ni noble, ni pauvre, ni homme, ni femme. Nous pouvions tous être arrachés au monde quelque soit notre origine. Quelque part, je trouvais cela réconfortant. Cependant, je n’allais pas le dire tout haut.

-“Toutes mes condoléances lord MacAskill. ” Lui soufflais-je pudique. Je ne savais jamais comment amener les choses. Je ne voulais pas être envahissante. Je ne voulais pas non plus être impolie. Je ne savais pas si je pouvais lui sourire. Si je devais au contraire éviter. -“ Vous le connaissiez bien ? ” Lui demandais-je à voix basse. S’il n’avait pas l’envie de me parler je m’éclipserais sans attendre. En revanche, un peu de compagnie pourrait peut-être aider dans un moment aussi difficile ?

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Violet Hanovre Hadid
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08.06.21 11:50
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Vincent s’attendait à entendre une réponse de l’évêque. Cette voix féminine le surprend, mais pas autant que les mots qu’elle porte.

— De l’égalité… il répétait ces trois mots si fort en sens.

Le timbre de la voix de la Princesse de Hanovre a changé. Non la voix en elle-même, mais une réserve, une retenue que Vincent ne connaît pas.

— La mort ne fait pas de différence, précise-t-elle face au silence de l’Écossais.

Il a toujours apprécié discuter avec la Princesse pour ce genre de paroles imprévisibles et si riches. L’étiquette se rappelle finalement à la mémoire de Vincent. Même si les Anglais s’accoutument à la rudesse écossaise, il ne souhaite pas se montrer désinvolte avec la princesse allemande, d’autant qu’il l’appréciait beaucoup.

— Princesse de Hanovre…

Il incline légèrement la tête et attend une seconde ou deux afin de marquer sa déférence. Il n’ajoute pas d’autres mots, il n’entreprend ni baise-main ni autre salutation devant le cercueil. L’Écossais a bien choisi son titre, témoignant par ce sens qu’il accorde plus de mérite au titre de princesse qu’à celui de son mari. Une pensée lui traverse l’esprit. Est-ce que cette voix a changé à cause de son mari ? Il ne l’a pas croisée depuis son mariage. Cette pensée fugace s’efface avec la question sur leur relation :

— Toutes mes condoléances, lord MacAskill, vous le connaissiez bien ?

Vincent inspire profondément comme si la réponse méritait réflexion.

— Oui et non…

La franchise de sa propre réponse l’étonne.

— Nos enfants ont fréquenté le même collège. C’est grâce à eux que nous nous sommes rencontrés. Nous avons passé quelques journées chez eux, chez nous, mais je ne le connaissais pas si bien.

Sa voix éraillée s’étrangle presque, la main de Vincent se crispe un peu sur la crosse de son parapluie et trahit sa peine à retenir cette colère qui le traverse.

— En tout cas, j’en sais suffisamment pour témoigner qu’il ne méritait pas ce que ce tabloïd a écrit sur lui. C’était un travailleur acharné et courageux…

L’article prétend que la noblesse naît avec une cuillère en argent dans la bouche et que la première difficulté peut avoir raison d’eux. Prétendre que l’accident de voiture avait provoqué la crise de panique puis l’infarctus démontre un manque total d’égard envers le défunt et sa famille. Le tabloïd aime la polémique, elle fait vendre, alors il en use et en abuse.

— J’exagère un peu en disant ne pas si bien le connaître. Certes, je ne vais pas déranger sa famille pendant leur réception, mais je connaissais quelques uns de ses secrets. Par exemple, la raison pour laquelle il a choisi ce lieu !

Vincent porte un regard insistant sur ses chaussures pleines de boue puis sur le bas de la robe de la Princesse.

— Il avait un humour que j’appréciais beaucoup. Par exemple, il détestait les obligations dues à son rang. Il m’a avoué un jour qu’il choisirait cette colline pour se faire enterrer, parce qu’il y pleut tout le temps, parce qu’elle est exposée au vent. Il espérait, je le cite, y voir la noblesse les souliers crottés.

Vincent a fortement accentué son accent écossais. Ainsi, pendant un bref instant, sa voix a ressemblé à s’y méprendre à celle du baronnet.

— Je ne devrais peut-être pas vous le révéler, mais nous avions déjà beaucoup bu quand il m’a fait cette confidence. En tout cas, j’étais loin de penser qu’il allait coucher cette dernière volonté sur son testament.

Vincent adresse un dernier regard au cercueil. Athé convaincu, il ne se signe pas, ne prononce pas la moindre prière avant de faire demi-tour.

— Permettez que je vous raccompagne !

Il accompagnait ces mots d’un geste pour offrir son bras à la Princesse sur ce sol particulièrement glissant.

— Alors dites-moi, pourquoi la Princesse de Hanovre vient-elle nous honorer de sa présence en nos belles terres d’Écosse ?

Vincent se doute qu’une Princesse de la famille Hanovre n’aura pas fait le déplacement pour Sir Estate. Si le baronnet avait eu un quelconque lien avec la famille Crawley, le baron aurait fait le déplacement, lui aussi. À moins que Lord Crawley mérite vraiment la mésestime que lui porte Vincent…
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10.06.21 20:57
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A peine débutions nous notre discussion que lord MacAskil me pris au dépourvu. Je ne m’attendais pas du tout à entendre mon titre de naissance. Je sais, que je ne fus pas assez rapide pour lui cacher mon émotion. Une émotion que je mis d’ailleurs quelques secondes à identifier comme étant de la joie. Car oui, j’étais secrètement heureuse d’être affiliée à mes racines plutôt qu’à mes épousailles. J’aurais pu en être perturbée, quelques mois plus tôt. Ce n’était plus le cas. Un autre signe, s’il en fallu, que j’étais différente de celle qui s’était échinée à organiser un Gala de Bienfaisance. J’avais irrémédiablement changé.

Pour autant, l’affirmer dans ce contexte était malavisé. Tant que la situation n’était pas éclaircie, le plus prudent était de m’en tenir à l’étiquette. Chose que je pouvais faire. Ne voulant, cependant, pas trahir mes sentiments pour Prem, je ne repris pas mon interlocuteur sur son “erreur”. Je lui adressais un sourire, qu’il pourrait interpréter selon son bon vouloir.

Je baissais la tête devant le cercueil pour signifier mon respect au mort que nous citions, tout en écoutant le récit de Vincent. Je pouvais aisément entendre son aigreur envers les journalistes et la presse en général. Le portrait du gisant avait été très sombre.

-“ Ils savent tordre le réel. ” Lui répondis-je pour témoigner de ma conscience, tout comme d’un soutien direct. Je ne m'aventurerais pas plus loin sur ce sujet. J’avais tout de même eu le chic de tomber amoureuse d’un journaliste, qui plus est d’un travailliste. Prem avait une posture très claire concernant l’aristocratie. Pour autant, il ne s’abaisserai pas à un ramassie d’inépsie tel que nous avions eu dans la presse locale ces derniers jours.

-“ Vraiment! ? Quelle est-elle cette raison ? ” Puisqu’en effet, je m’étais posée la question en apprenant le lieu de la cérémonie. C’était tout à fait atypique. Sentant le regard de l’Ecossais sur les chaussures crottées par la boue. -“ Il n’y a rien de mal à revenir à la terre. ” J’attendis qu’il releva le nez pour lui sourire. -“ Souvenons-nous de l’essentiel. ” J’eu un bon rire franc en entendant la citation du mort. -“ Eh bien! Il a réussi! ” Je me demandais alors si mon cher Parrain -Zenon De Lascelle- avait pris des dispositions de ce type pour ses funérailles ? Je ne connaissais pas la réponse. Il était lui aussi une sorte de rebelle, pour ne pas dire un révolutionnaire, dans sa propre caste. J’avais longtemps été mal à l’aise à ce sujet. Aujourd’hui, je commençais à comprendre ces petits actes de rébellion individuels. -“ Cela me fait plaisir de connaître cette histoire. Merci à vous pour la confiance. Elle sera bien gardée. ” C’était tout ce que je pouvais répondre, sans trahir mes propres opinions.

Nous nous éloignâmes tous deux de l’autel de fortune. Je réhaussais le parapluie, au-dessus de ma tête, pour la préserver de la pluie. Ce n’était pas tant l’eau, mais la position statique qui devenait pénible. J’avais besoin de bouger pour réchauffer mes muscles. Touchée par la prévenance de mon aîné, je venais lui prendre le bas. -“Merci, lord MacAskill.

-“ Je suis venue étudier. ” A trente ans, c’était peu commun qu’une femme de mon extraction sociale soit encore en étude. Nous n’étions pas attendues sur les bancs des facultés, mais sur les terres à régenter. Je n’aurais pu retourner en apprentissage sans être mariée. J’avais obtenu un diplôme de base en commerce mais jamais il n’avait été envisageable que je poursuive. -“Je m'intéresse de près à l’équithérapie. ” Il était de notoriété publique les nobles faisaient de l’équitation, ne serait-ce que pour la chasse. J’avais concouru plus jeune. Te souviens-tu ? J’étais douée d’ailleurs. Mais là encore on considérait que ce n’était pas ma place ou mon rôle. -“ C’est une médecine alternative qui relie le cheval et le patient. Je trouve cela très intéressant. Le but étant à la fin de pouvoir ouvrir une petit école d’équitation pour des femmes en souffrance. Enfin, c’est ce à quoi j’aspire. ” Allais-je y arriver ? Je n’en étais pas certaine. Néanmoins, être ici était la meilleure décision, étant donné ma situation. -“Qu'en est-il vous concernant ? Depuis tout ce temps! Dites-moi un peu ce que j'ai manqué ? ” L'encourageais-je toute ouïe. Autant prendre le bon côté de ces funestes circonstances. D'autant que j'étais curieuse.

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19.06.21 16:25
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— Exactement ! À trop tordre le réel, on fait élire des populistes, on gagne un Brexit, on gagne un no-deal, on fait passer des hommes courageux et ouverts d’esprits pour des nobliaux à la petite semaine…

À l’évidence, Vincent ne portait pas les tabloïds dans son cœur. Alors, ils avaient tous deux rapidement changer de sujet pour évoquer d’un ton plus légers des souliers crottés. Le rire de Violet lui fit un bien fou. Aussi étrange que cela puisse paraître, il n’avait pas entendu rire une femme depuis longtemps. Quant aux hommes, c’étaient souvent les rires gras accompagnant les blagues graveleuses lors des réunions du cercle des entrepreneurs londoniens. Rien de comparable. Alors, ce rire-là lui insufflait autant d’énergie qu’une fontaine de jouvence. Il rappelait à Vincent de bons souvenirs familiaux. Vincent réalisait combien son travail l’éloignait des choses importantes de la vie. Finalement, le décès de Lord Estate allait le secouer, il allait marquer un grand tournant dans sa vie.

Violet lui expliqua être venue étudier. Il lui jeta un coup d’œil, un sourcil relevé. Étonnant. Il la laissa commenter et entendit pour la première fois le mot « équithérapie ». Même s’il savait reconstituer le mot par étymologie, son incompréhension avait dû se lire sur son visage, alors Violet le lui définit avec sa courtoisie habituelle : une médecine alternative qui relie le cheval et le patient.

Vincent était d’ailleurs un bien mauvais cavalier, mais il savait combien la symbiose entre l’Homme et l’animal pouvait être bienfaitrice, curative même. Il comprit alors tous les enjeux de santé mentale, un bénéfice, tant pour le cheval que pour la cavalière en l’occurrence.

— C’est un projet passionnant. Et je suis sûr que cela sera bénéfique tant pour ces femmes que pour les chevaux. L’équitation sert bien trop souvent à la chasse et je ne suis pas sûr que ses tireurs fous prennent tous soin de leurs montures.

Vincent n’aimait pas la chasse et ne s’en était jamais caché. Son franc-parler lui attirait les foudres d’opposants, mais il ne comptait pas faire de politique. Il n’avait personne à caresser dans le sens du poil. À son tour, Violet demanda de ses nouvelles. Un moment que n’aimait guère Vincent durant les retrouvailles. Il soupira de dépit.

À ce moment de la conversation, ils arrivaient sur la petite route qui reliait cette colline au village. Il ne faisait pas très beau, la pluie menaçait de redoubler à chaque instant, mais la marche rendait le climat moins frisquet. Trois voitures restaient alignées en file indienne sur l’étroite route, celle de l’évêque, celle de Violet et la voiture de location que Vincent avait récupérée à l’aéroport. Même la presse avait levé le camp pour interviewer quelques membres de la famille dans le village.

— C’est une longue histoire. Continuons ce retour à la terre et marchons un peu, s’il vous plaît. Nous y serons plus à l’aise qu’engoncés dans nos voitures !

Vincent avait le sentiment qu’ils seraient comme dans un hammam, avec leurs vêtements débordant d’humidité dans des voitures froides. Les vitres seraient rapidement embuées et le sentiment d’étouffement augmenterait. Le chauffeur de Violet les suivrait sans aucun doute et elle ne semblait pas gênée à l’idée de marcher.

Quoi qu’il en soit, Vincent allait révéler un passé déplaisant et un présent guère passionnant.

— Des échecs, une succession d’échecs, j’en ai bien peur. Le Brexit a bien failli me mettre sur la paille. Le No-Deal ensuite, j’ai dû choisir laquelle de mes deux nationalités abandonner. J’aime l’Écosse, mais cela reste un déchirement d’avoir quitté la France. Vous me comprenez sans doute mieux que quiconque, Princesse de Hanovre.

Vincent se demandait ce qu’il en était pour elle. Avait-elle dû, elle aussi faire un choix entre ses origines et le Royaume-Uni ? Avait-elle déjà fait ce choix en se mariant ?

— Et puis mon divorce. Un véritable coup de massue. S’il m’a permis d’ouvrir les yeux sur mon mariage, j’ai perdu de vue ma fille et, ça, je ne le souhaite à personne. Elle a préféré suivre sa mère que son père. À la lecture du jugement du divorce, j’aurai sans doute fait le même choix qu’elle. J’ai été accusé d’adultère.

Vincent ne voulait pas se justifier. Il avait le sentiment de s’enterrer en déclarant n’avoir jamais trompé sa femme. Se justifier, il l’avait fait au début. Il avait même redoublé d’efforts pour trouver des preuves de son innocence. Difficile de prouver que quelque chose n’existe pas ! Force est de constater qu’il argumentait mal. Personne ne le croyait. Mieux valait ne plus rien dire.

Comme une virgule dans la discussion, le vent s’était mis à souffler un peu plus fort et marqua ses annonces d’une pause.

— Cela va mieux néanmoins, mais je pense m’être trompé dans mes priorités. J’ai rebondi, créé de nouvelles entreprises. L’entrepreneuriat, c’est un peu comme les montagnes russes. J’ai eu le nez fin pour comprendre les conséquences du No-Deal. J’ai investi dans l’énergie. Le charbon permet au Royaume-Uni de s’éclairer, il m’a renfloué aussi. Mais en regardant devant moi, cette vallée, je réalise que je me trompe.

Face à eux, dans la combe s’alignaient une mine de charbon et la torchère d’un haut-fourneau. Des décennies plus tôt, elles avaient fermé pour le bien de la nature et voilà qu’on les rouvrait, faute d’énergie, faute d’échange avec l’Europe, faute de budget pour des énergies plus propres. D’ailleurs, les marges étaient si faibles que même Vincent ne pouvait investir seul. Il lui faudrait l’aide de Tyrgan Campbell, il le rencontrait mardi soir.

— J’aurais dû dépenser cette énergie à recoller les morceaux avec ma fille. J’ai renfloué le navire, mais le capitaine s’y sent un peu seul, Princesse. On devrait peut-être comparer nos expériences mutuelles, qu’est-ce qui est pire ? Laquelle est la pire ?

Vincent avait toujours cultivé ce défaut : un franc-parler qui frisait l’insolence. Il méprisait littéralement Lord Crawley pour ses positions extrémistes et il ne s’en cachait pas.

— N’y voyez pas d’offenses et ne vous sentez pas obligé de défendre votre époux, Princesse de Hanovre. L’insolence est une compagne qui ne m’a pas quitté, elle.

Il connaissait bien les usages de la noblesse. Les Écossais n’y accordent pas la même importance que les Anglais, pour meilleure preuve, en Écosse on peut acheter un titre de baronet, par exemple. Une hérésie pour les Anglais. Mais cette hérésie facilitait les mariages entre les roturiers et la noblesse. Le déchirement entre le Roi et son frère était le contre-exemple anglais par excellence. Bref, Vincent avait eu de la peine de lire que Violet de Hanovre allait épouser Lord Crawley. C’était un mariage arrangé, car il n’imaginait pas la générosité épouser l’obscurantisme nationaliste.

— Je vais vous faire une confidence. Professionnellement, les femmes sont discriminées, alors elles travaillent plus dur et elles n’hésitent pas à suivre leur cœur. Elles sont bien plus compétentes. Je suis convaincu que vous allez faire des merveilles pour ces femmes et ces chevaux. Me feriez-vous l’honneur de me laisser vous aider ?

Il tint à préciser ses propos :

— N’allez pas croire que je vais vous aider sur le cœur du sujet. Je dois faire honte à mes ancêtres quand je monte à cheval. Je serai sans aucun doute le pire conseiller que vous puissiez croiser en ce domaine. Non, en fait, je pensais à d’autres types de conseils. Ce serait un honneur et surtout un plaisir pour moi que vous acceptiez mon aide. Je tiens vraiment à vous éviter les écueils administratifs et financiers. Qu’en pensez-vous ?
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22.06.21 22:15
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Violet Hanovre Hadid


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Ft Vincent MacAskill


Oh oui, la presse avait une grande part de responsabilité dans le vote pour la sortie de l’Union Européenne. La presse a selon moi trop de pouvoir et d’influence sur les affaires du Royaume. C’est bien pour ça que je n’y faisais pas souvent appel. Je pense que c’est précisément pourquoi Edward, lui, veut tant y être présent. Nos avis divergent là-dessus. Comme sur tant d’autres points. Je n’allais pas ennuyer mon charmant interlocuteur avec ce genre d'exemples.

-“Je le crois aussi !” Je ne faisais pas ce stage par fantaisie, comme l’avait résumé ma mère, ou pour perdre mon temps, comme le signifiait mon mari. Leurs réactions, même si j’avais pu les anticiper, m’avaient blessées. Même dans ce domaine, ils ne voulaient faire aucun compromis, aucune projection. Mère savait pourtant combien l’équitation était importante à mes yeux. Combien, elle m’avait aidée aussi. Moi. Enfin, je devais me concentrer sur les personnes qui me soutenaient, toi Rose, Prem… et visiblement Vincent. -“ Mes formateurs sont confiants. J’apprends énormément. Nous verrons ce qui pourra en ressortir ensuite. J’ai envie d’être optimiste.” Lui résumais-je donc en montrant mon entrain.

Moi aussi je posais mon regard sur les véhicules. Je fais un signe de la main à mon logeur pour lui demander un peu plus de temps. Il inclina du menton derrière le pare-brise. J'ai pu raffermir ma prise autour du bras de l’Ecossais. -“Bien sûre. Je vous suis. Marchons.” Lui dis-je en le suivant. Je l’écoutais avec beaucoup d’attention et de compassion. Je savais que le refus de bi-nationalité avait provoqué ce genre de déchirement. Ma main pressa doucement la sienne en signe de soutien. Ma famille était, elle aussi affiliée. Monaco, la France, l’Allemagne, nous avions des parents partout. J’y étais moins attaché que mon père. Mais, je savais combien il souffrait.

L’annonce de l'adultère me prit de court. Je m’arrêtais. Je détournais le visage le temps d’effacer mon émotion. Lord MacAskill ne pouvait savoir quel écho il faisait chez moi. J’étais une épouse adultère, ce depuis des mois. J’étais enceinte de mon amant. Je prévoyais de divorcer en bataillant. Mais c’était difficile d’entre un homme qui subissait les conséquences d’une histoire similaire. -“ Je suis vraiment navrée pour votre fille. ” Je scrutais son profil, avançant à l’aveugle. J’avais du mal à croire qu’il eût pu tromper son épouse. Un homme qui m’avait semblé droit et honnête. -“ Elle reviendra vers vous. Rien n’est statique. ” Lui soufflais-je pour donner un peu d’espoir. -“ Vous verrez.

Il attira mon attention sur la vue d’ensemble. C’était étrange de voir ces volutes de fumée noire dans la pluie. Cela appartenait au passé. Je retrouvais les photographies en noir et blanc des albums de mes grands-parents. N’était-ce pas un triste retour en arrière ? Je ne m’attendais pas à ce qu’il m’incorpore dans son exposé d’une grande tristesse. Selon le grand public Edward et moi formions un couple, jeune “glamour”, prometteur. Une image qui plaisait beaucoup. Comment Vincent pouvait-il savoir que tout n’était pas aussi chatoyant ?

Je me retrouvais une fois encore à partager. Préserver les apparences ? Ou bien profiter de cette épaule bienveillante ? Ce fut lui qui me vint en secours, en donnant un avis arrêté. Cela fini par me convaincre que j’étais bel et bien en présence, sinon d’un allié, au moins d’un adversaire d’Edward. Une bonne nouvelle, ce d’autant plus que je ne l’attendais pas. Je ne m’étais encore jamais servie de mon réseau contre les Crawley. Mais, les choses avaient changé. J’attendais mon premier enfant.

-“Monsieur, je ne me permettrais jamais d’aller contredire un de mes aînés. ” Je ne pouvais pas lui dire que j’étais totalement d’accord avec lui. C’était trop tôt. Mais je savais à présent que je pourrais un jour lui demander son concours. Cela me donnait un peu de courage pour avancer dans les défis des mois à venir. -“ Edward est loin de faire l’unanimité. Je peux comprendre votre… assentiment à son égard. ” Je n’attendais qu’une chose à présent, pouvoir me libérer de ses serres. Vivre avec Prem dans un couple heureux et harmonieux. Nous goutions au bonheur sur cette terre d’asil. Je savourais chaque jour et chaque nuit avec lui. -“ Ici votre insolence est en sécurité. Ne vous en faites pas et surtout parlez librement.

Eh bien, j’allais de surprise en surprise dans cette discussion. Il prenait position contre le Baron et maintenant Pour moi. Je resta estomaquée, le temps de me rendre compte. J’étais venue donner mes respects. -“ Vous voudriez m’aider ? Vraiment ? ” Même Tyrgan ne m’avait pas fait une proposition aussi directe. Il y avait quelque chose de vraiment généreux chez le peuple écossais. Plus je les découvrais et plus je les aimais. J’avais très envie d’accepter sa proposition. Mais en avais-je le droit ? Le faisait-il parce que j’étais une femme de la haute noblesse ?

Je lui sourais doucement. -“Lord MacAskill… Vincent, je suis vraiment contente que l’on se soit retrouvé. ” Je nous stoppais pour de bon. Le clapotis de la pluie pour unique perturbation. Il me donnait l’impression d’être très sincère. Je plongeais mon regard dans le sien. J’y cherchais un signe de duplicité, que je ne trouvais pas. Il avait raison de dire que les femmes agissaient plus avec leur coeur. C’était précisément ce que je m’apprêtais à faire. -“ Et oui, j’accepte volontiers. Je serai honorée que vous puissiez mettre vos compétences dans mon… dans ce projet. ” Lord Leicester et Parrain aidaient pour les chevaux, Peter pour le droit et avec le talent de l’Ecossais… -“Accepteriez-vous de venir prendre le thé ? Disons lundi ? Je pourrais vous parler du projet dans un endroit tranquille. ” Cela me permettrait de lui parler de l’ensemble posément. Accessoirement d’en parler avec Prem aussi, car son avis m’aidait toujours.

-“J’ajoute que vous avez raison. Les femmes sont négligées dans le monde du travail et ailleurs. Cela doit changer. N’est-ce pas ? ” Voila qui me faisait de nouveau penser à ma cadette et à mon fameux dossier qui attendait encore d’être envoyé. J’étais d’accord avec lui. Notre société avait besoin d’évoluer.

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Violet Hanovre Hadid
Violet Hanovre Hadid
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03.07.21 15:38
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Depuis trop longtemps, Vincent refuse d’évoquer sa vie privée, pour ne pas affronter le regard de tous et le jugement de certains. Repousser n’avait fait que compliquer la situation. Les nouvelles s’accumulaient, les mauvaises surtout. D’abord le divorce, ensuite la séparation avec sa fille, puis la perte totale de contact. Et il venait de découvrir, bien tard, qu’il ne retrouverait pas le bonheur grâce à ses entreprises. Vincent soupira en pensant à Vittoria. Il posa inconsciemment sa main sur son sternum, cette douleur à l’estomac revenait. Palier ce manque était au-delà de ses forces, il s’en voulait de ne pas avoir encore agi. Il devait prendre contact avec cette détective dès son retour.

Heureusement, la Princesse sut ne pas insister sur ce sujet douloureux. Elle le fit même sourire quand elle donna carte blanche à son insolence. Il voulut en plaisanter, mais il réalisa ensuite qu’elle ne protégeait pas a minima son mari. Il se doutait qu’il s’agissât d’un mariage arrangé, mais il restait loin de comprendre ce qui se jouait réellement dans ce couple. Il prit cela pour de la politesse aristocrate.

Quand elle lui demanda une forme de confirmation, il répondit avec conviction :

— Oui, tout-à-fait. Vous pouvez compter sur mon aide.

Vincent ne faisait jamais de promesse en l’air. Son éternelle compagne, l’insolence, ne se gênait pas pour envoyer bouler l’opportuniste qui demandait de l’aide. Si Vincent ne voulait pas perdre son temps avec certains projets, il y en avait d’autres qui l'enchantaient. Il ne trouvait pas de critères à ses choix, si ce n’est son instinct. Certaines œuvres caritatives ne l’intéressait pas du tout, d’autres au contraire l’intéressait, sans raison apparente. Quoi que, le sexe du porteur de projet jouait. Cela ne plaidait pas en sa faveur, car les rumeurs autour d’un homme qui avait tout perdu dans un divorce allait bon train, surtout quand on les associait à celles qu’il aidait plus volontiers. Cela le blessait, mais Vincent feignait de n'en avoir cure.

Vincent releva cette hésitation sur “son” projet.

— C’est votre idée, n’est-ce pas ? Alors, c’est votre projet !

Avec une certaine impolitesse, il pointa Violet du doigt pour accentuer la force de son projet.

— N’hésitez jamais, portez-le avec fierté.

Et bien sûr, Vincent accepta avec plaisir d’aller prendre le thé avec la Princesse de Hanovre. Il discuta avec elle des détails pour le lieu avant qu’elle ne reparle de la cause féminine.

— Oui, cela doit changer, mais les mots ne suffisent pas. Entre Margaret Tatcher et Theresa May, je pensais notre pays en avance, mais elles restent de trop rares exceptions. Combien de fois les hommes leur coupent la parole quand ils ne leur coupent pas l’herbe sous le pied ? Et s’il n’y avait que ça...

Vincent détourna ses yeux de ceux de Violet pour observer l’horizon, il glissa ses mains dans les poches.

— Chaque être humain est doté de sa propre créativité. En écarter un seul nous prive d’un potentiel incroyable. Alors en écartant les femmes, l’humanité se prive de 50% (ou 51, je ne sais plus) de la créativité mondiale. Ça peut paraître cynique, mais je me demande où on en serait sans cette discrimination. En tant que mâle, protestant, blanc, riche, je ne mesure pas vraiment combien la discrimination sape les gens, et avant Vittoria, je faisais sûrement parti des vieux cons, quand bien même j’étais jeune. J’ai pourtant reçu une bonne éducation.

Sans raison apparente, il sauta à pied joint dans une flaque d’eau, comme l’aurait fait un enfant mal élevé.

— L’éducation nous invite à rester dans les clous, à nous conformer. Je me souviens de mon père, un homme plutôt autoritaire, au sourire bien rare, il me disputait quand je sautais dans les flaques d’eau. Ma mère lui a répondu de me laisser m’exprimer et je m’attendais à ce qu’il la rembarre poliment. Il ne l’a pas fait, au contraire, il a sauté dans une autre flaque d’eau. J’en garde un beau souvenir. Bref, si vous ne vous lassez pas des conseils d’un garnement insolent, je serai là, comptez sur moi. C’est vraiment le genre de cause que j’aime, même si je préfère agir en amont qu’en aval.

La pluie avançait vers eux. Le front de l’averse remontait la pente devant eux. Ce spectacle arracha un autre sourire à Vincent, une image de carte postale — l’usine effacée avec photoshop — à ne pas manquer notamment avec le soleil derrière eux qui faisait apparaître un discret arc-en-ciel. Vincent regarda derrière la Princesse, le long de la route et il fit un signe à son logeur de s’approcher avec sa voiture. Il ouvrit la portière, rappelant ainsi qu’on peut être galant sans être sexiste. Avant de la refermer, il ajouta deux derniers conseils :

— Vous ne devriez vraiment pas donner carte blanche à mon insolence. Sinon, elle va vous conseiller d’arrêter les interviews et les séances photos avec votre mari. Son regard sonne aussi juste que celui de Charles sur Diana.

L’eau commençait à tomber drue sur le visage de Vincent, elle commençait à plaquer ses cheveux sur son crâne, il leva néanmoins l’index pour avertir d’une autre insolence.

— A propos de Diana, vous vous souvenez de cet enfant séropositif qu’elle a embrassé dans le Bronx. Elle a développé une aura extraordinaire. Épargnez à votre mari ces interviews, foncez seule. Vous allez rayonner ! La presse va vous aimer et avoir le soutien des britanniques ne sera pas de trop pour aider votre projet à se construire. Allez, à lundi, Princesse de Hanovre et merci d’avoir accepté mon aide.
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17.07.21 15:07
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Violet Hanovre Hadid


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Ft Vincent MacAskill


Je connaissais la réputation de Lord MacAskill avant son divorce. Je savais qu’il était bon dans son domaine. Cependant, je ne m’attendais pas à tant de passion! Sa familiarité, autant que son audace, étaient rafraîchissantes. En particulier pour une telle journée. C’était sans doute très inconvenant de rire dans le sillage d’un mort. Mais que voulais-tu ? Cet homme me donnait bien envie de rire!

-“Avec fierté. Très bien! ” Il y avait beaucoup de choses dont j’étais fière. Mais, je n’étais pas sûre que ce projet soit en haut de liste. Il m’apparaissait plus comme une douce folie. Un peu comme tout ce qui faisait ma vie depuis mars.

J’avais toujours eu énormément de respect pour les femmes politiques de notre royaume. Plus jeune, je m’insurgeais en voyant comment les journalistes tordaient les faits et ne les mettaient pas du tout en valeur. Un point sur lequel je m’étais confié à ma sœur. C’est elle qui avait trouvé des motivations pour que nous fassions ce courrier à la chambre des lords. -“ Je crois que les femmes font peur. ” J’écoutais Vincent. La première pensée qui me vint fut qu’il s’entendrait avec Prem. Qu’ils auraient certainement des choses à se dire tous les deux. Je me retenais de trop sourire. De toute façon, c’était absurde. Prem était là incognito. Il ne pouvait pas prendre le thé avec un Duc Ecossais… -“ On ne peut comprendre ce dont on est épargné, Vincent. Ne vous blâmez pas. Vous en parlez. C’est déjà beaucoup plus que beaucoup de gens. ” Si je n’étais pas tombée amoureuse d’un indien, aurais-je ouvert mes yeux ? Aurais-je vue toute la discrimination enracinée dans notre société ?

-“ J’ai l’impression que les lignes bougent. ” Il n’y avait qu’à observer ma propre cadette. Iris était plus jeune de quelques années. Elle était très différente de moi. Beaucoup plus féministe, je crois. -“ Je crois que la génération qui arrive va tout bousculer. ” Vincent me prenait de surprise par un comportement totalement imprévisible. Je l’observais sauter dans la boue comme un grand enfant. Quand j’étais plus jeune, c’était ce que je faisais chaque fois qu’il pleuvait. On m’avait appris à être sage. Mais, je dois te dire que sa petite histoire de famille me parlait beaucoup. Sans prévenir, je l’imitais et sautais dans la flaque d’eau boueuse suivante. Le bas de ma robe fut instantanément noirci. Je sentais un grand rire remonter dans ma poitrine. Comme cela faisait du bien. -“ Votre mère a l’air d’une dame très sensée! ” J’avais la sensation d’être revenue dix ans en arrière. Je me sentais légère.

Je remarquais, après coup, la présence du véhicule. Je saluais le conducteur d’un sourire. J’aimais les chauffeurs. C’était généralement des personnes patientes, discrètes et très à l’écoute. Tommy me manquait ici. -“ Oh… Vraiment ? ” Bien entendu tout le monde connaissait les rumeurs sur le fabuleux couple royal. Je ne pensais pas que nous étions aussi mauvais que cela. Personne ne m’en avait fait le retour jusqu’ici. -“Ce n’est pourtant pas faute de vouloir disparaître des médias. Croyez-moi. Mon mari tient à utiliser ces outils. ” Quel enfer m’avait-il fait pendant toute sa campagne électorale. Il m’avait épuisé.

Je l’écoutais avec attention. Oui, je me souviens de ce formidable retournement. Je n’étais qu’une petite fille. Plus tard, j’avais compris le pouvoir de cet acte solitaire. Je me sentais flattée par l’association d'idées. Je souris. -“Vous n’êtes pas le premier à me le dire. ” Toi tu m’en avais parlé, Swan et même Tyrgan. Le plus convaincu de tous était Prem. Voilà que Vincent allait dans leur sens. Cela voulait bien dire quelque-chose. -“ Je … vais y réfléchir. ” Il fallait que je pose mes idées. Je savais que chacune de mes actions dans ce domaine devait être pensée. Il y avait de lourdes conséquences dans ce genre de cas.

J’approuvais avec un grand sourire. -“ A lundi ! ” Je lui fis un signe de la main. Il me donnait envie d’être chaleureuse. Tout de suite, je bifurquais, afin d’ouvrir moi-même la porte arrière de la voiture. Je plongeais tout de suite dans l’habitacle. Tout de suite, je me redressais, pour aller à la fenêtre fait un dernier signe à Vincent. Je le regardais avancer pendant encore quelques mètres. Puis, je me plongeais sous la couverture qui attendais à ma droite. Maintenant que j’étais immobile, je n’avais qu’une seule envie: un bain chaud. Pendant tout le trajet jusqu’au cottage je repensais à cette conversation.

Nous avions enterré un homme. Mais, les idées de mourraient pas, elles !

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19.07.21 15:00
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