L'enquête sur l’attentat de l’ambassade de Serbie était en cours. Ils n’avaient pas encore remonté jusqu’à la cellule terroriste. D’anciens anarchistes avaient été mis sur écoute. Pour le moment, cela n'a donné aucun résultat.

A la suite de l’attentat de King le gouvernement anglais avait conçu un deuxième groupe antiterroriste pour la capitale. Le bureau se devait de bosser en bonne intelligence avec le M15. Pour ce qui est de la maréchaussée, c'est Wachevski qu’on est venu trouver. A présent détachée à une nouvelle affectation, elle n’en reste pas moins un excellent agent de terrain. Sa connaissance de la cité et de ses malfaiteurs fait d’elle une source de renseignement précieuse. Son ancien patron l’a donc réquisitionnée pour une mission un peu spéciale..

La veille, W. a rencontré un jeune avocat du parquet londonien. Ils avaient eu une longue conversation pour élaborer la stratégie. Tout devait être fait selon la loi pour que les informations obtenues soient utilisables au moment du procès. Ils avaient une liste de suspects. Ils avaient aussi une liste d’indicateurs. Maintenant, ils devaient convaincre l’un d’entre eux de travailler à leur compte.

Trois individu.es étaient identifiés et surveillés depuis maintenant un mois. Olivia est entrée en contact avec l’un d’entre eux. Maintenant, elle s’attelait à approcher la numéro deux: Louisa Lorca.

Cette jeune femme avait un historique et elle correspondait au profil. En recoupant différents points de vue, ils avaient établi un lien direct entre cette jeune fille et l’un des suspects. Ils s’étaient rencontrés plusieurs fois. Par ailleurs, Lorca était aussi reliée à un certain Jean-Baptiste Lemoine. Une enquête était en cours sur lui et son équipe d’intervention soupçonnée de faire leurs affaires sur le dos de la loi.

Que ce soit sur son amant ou sur son père d’adoption, Louisa pourrait les aider à avancer. Elle était une cible parfaite. W. allait entrer en contact au moment de sa remise de diplôme. Elle s’était arrangée pour être sur les lieux un peu avant le lancement de la cérémonie. Assise à la terrasse d’un petit café, elle gardait un œil sur l’étudiante. Elle quitta la table pour remonter dans sa direction.

-”Bonjour Louisa. Vous avez du feu ? ” Oliva montra sa cigarette éteinte à la jeune femme. Elle ménagea un petit silence. -” Je veux seulement parler. … Pour le bien de votre ami Jean-Baptiste, je vous encourage à rester attentive. ” Le moyen de pression n’avait pas été très difficile à trouver. La fragilité émotionnelle de Lorca la rendait aisément manipulable. Olivia n’aimait pas se servir des civils de cette façon. Mais, ils devaient mettre la main sur le leader de ces Anarchistes avant une nouvelle attaque. -”Nous avons besoin de votre aide. L’homme avec qui vous êtes est soupçonné d’appartenir à une cellule terroriste. Nous devons nous en assurer et le cas échéant la démanteler. ” Olivia ne bougeait pas. Elle patienta le temps que son interlocutrice comprenne ce qui était en jeu. -”Vous allez l’espionner pour nous. ”

Wachevski a pu voir que cette jeune fille était prise par surprise. Ce qui ne l'émeut pas plus que cela. Quelqu’un capable de protéger un terroriste ne pouvait pas réveiller son empathie. Qui a dans la tête de faire ça si ce n’est quelqu’un qui a peu d’intérêt pour le bien commun en elle ?

L’effet de sidération pouvait être tiré à leur avantage. Tout comme la peur est un bon outil de manipulation. Olivia ne fait donc absolument rien pour apaiser son interlocutrice. Au contraire, elle la laissa gamberger. Tout ce qu’elle venait de lui dire était clair. Lorca n’avait pas tellement d’autre choix que d’obéir aux autorités de ce pays. Bien entendu, avec tout le reste, il y avait souvent ce moment de dénie. Ils n’acceptaient jamais spontanément de s’être fait pris la main dans le sac.

C’est pour ça, qu’il y a toujours une preuve à l’appui. Un petit truc pour les faire craquer. L’Agent W attrape l’enveloppe dans la poche intérieure de son manteau. Elle la tend à la jeune fille. Gold et Lorca ont été vus ensemble plusieurs fois. L’agent en filature a saisi quelques moments éloquents de la vie du jeune couple.

Une fois un moment passé, la policière tend une seconde enveloppe. Celle-ci est plus grande et plus épaisse. Un téléphone portable de la Maison. -” Gardez-le sur vous jusqu’à ce que l’on vous contacte. ” Ce ne serait pas elle qui serait l’agent de liaison pour la suite. Ils devaient être prudents. Chacun maillon faisait son travail pour un résultat collectif. -” Nous savons où est votre péniche Louisa. Un conseil… n’essayez pas de jouer à la plus maligne avec le Gouvernement. ” Ceux qui avaient essayé n’étaient plus de ce monde pour s’en vanter.

-” Faites ce que l’on vous dit et tout se passera bien.” C’était davantage un ordre qu’une recommandation. Olivia ne faisait pas de mystère sur la réalité. Le bien commun donnait le droit d’agir de façon… persuasive avec tout récalcitrant.

Sans grande surprise, Olivia regarde la jeune fille se débattre avec la réalité. Ils le font tous et toutes. Ils ont l’espoir, jusqu’à la fin, d’être celui qui arrivera à échapper à la Règle. Sauf que ce n’est pas le cas. Non. Ce n’est pas vrai du tout. Ils finissent par faire ce qu’on leur dit.

-” Des garanties. ” Le truc c’est qu’elles ne sont pas en train de mettre en place un contrat de travail, une mission en intérim, ou quelque autre arrangement à l’amiable. Ce n’est pas cela du tout. Ce qui se passe c’est que l’Etat a tous les droits quand il s’agit de la sécurité intérieure. -” Votre garantie c’est que ces photos n’ont pas encore été transférées. ” Wachevski n’est pas en mesure de proposer autre chose. En fin de compte, elle aussi, elle n’est qu’un pion dans une partie à grande échelle. Seulement, elle s’est portée volontaire. C’est ce qui les différencie.

Doucement, elle pose l’appareil de communication dans la main de la jeune fille. -” Allez. ” L’Agent conserve un faciès neutre. C’est ainsi qu’il faut faire lorsque l’on est face aux tiraillements éthiques d’une fille. -” Vous allez être contactée d’ici 48h. Restez attentive. ” Point barre.

Maintenant que l’ordre de mission a été remis, la Polonaise peut passer à la suite. Juste par acquis de conscience, elle fait semblant d’attendre encore un peu.