The infant and the judge

J’attrape la serviette de bain pour sécher ma tignasse. Je change d’avis une semaine sur deux. Mais cette fois, je vais prendre rendez-vous pour les couper. Ce sera plus simple. Je balance la serviette sur le lit et file voir où en est Phil. Il dort encore. Merveilleux. Maintenant je dois trouver une tenue qui fasse honneur à Caleb. Étant donné l’état de mon corps actuellement, ce n’est pas gagné. J’élimine déjà tout ce qui est près du corps. - “Titi … tu sais où j’ai mis la robe noir ? celle avec les fleurs ? ” Val passe la tête par la porte de la salle de bain. Tellement mimi avec sa coupe en pétard. - “Je ne l’ai pas encore repassée. ” Mains sur les hanches de scrute la penderie. C’est vraiment le chaos là dedans. J’attrape la bleue à pois blancs. Oui le col colette, classique, ce sera très bien pour Parrain.

Un peu d'anti cernes pour cacher le manque de sommeil. Philip s’agite dans le berceau mais dort encore. Je vais en profiter pour aller préparer la pâte à gâteau. Au moins je suis plus libre dans mes mouvements. J’ai hâte de reprendre la natation. Le médecin m’a recommandé d’attendre deux semaines pour les points. Les choses vont se mettre en place. - “Mmm. On fait quel thé ? ” Lequel ? Lequel ? Lequel ? Je peux éliminer les saveurs indiennes. Le japonais ? Non… en fait du classique. Caleb aime le classique.

Bon pour le salon… Méthode Zac. J’attrape tout ce qui traîne…. Les habits, les magazines, les tubes de crèmes… Oh tiens je la cherchais partout celle-ci. On ne dit pas assez aux mères de prendre soin de leurs tétons pendant l'allaitement. Gosh… bénie soit ma Valentine. Je transfère tout dans la chambre d’amis du bas. On verra plus tard! - “Sa femme vient ? Je ne sais plus ce que tu as dit ? ” Mince… Je ne sais plus non plus. Le rire de Val me rappelle que ce n’est pas bien grave. On s’adaptera! - “Elle te va bien cette couleur… ” Je me coule vers elle. Elle m’embrasse ou je l’embrasse ? Notre intimité aussi doit reprendre ses marques. Rien qu’à sentir sa main descendre sur mon sein, je rêve de retourner au lit. C’est elle qui arrive à nous faire ralentir.

Philip se réveille pour de bon. Au moins, il dira bonjour à Caleb. Je me dépêche de mettre la pâte au four. C’est ma recette méga rapide. Valentine arrive avec Phil. Ils sont à fondre. Non. Il faut que j’arrête avec les photos… Mais quand même… La sonnette retentit un peu plus tard. J’enfile vite fait mes sandales. Je passe dans le couloir. On peut déjà voir sa silhouette à travers la vitre de la porte. Je lui souris.

Il est seul. C’est plus simple. - “Bonjour. ” Je me décale pour qu’il passe tout de suite. L’entrée n’est pas très grande. - “Avançons. On sera plus à l’aise. Bienvenue! ” Lentement je longe le couloir pour entrer dans notre salon. Valentine est vers le piano à queue avec Phil. Ils sont beaux tous les deux. Le donneur ressemble un peu à Val. On a fait au mieux. - “Je prends ton menteau tu permets ? ” Je me charge de lui retirer. Je le suspend et reviens. Valentine s’approche tranquillement de lui. - “Bonjour. Vous allez bien ? ” Je frotte le dos de Caleb, pose un baiser sur sa joue. Mon parrain n’est pas aussi exubérant que celui de Zac. Mais sa place dans le coeur de papa le rend spécial. Je l’aime. - “Installe-toi confortablement. … ” Je rapproche des coussins pour qu’il puisse caler son dos s’il veut. Une habitude qu’on a pris avec papa. - “Philip vient de se réveiller. ” Il est si si petit dans sa barboteuse de marin. Bien sûr, maman n’a pas résisté au clin d’oeil!

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Je suis reporter de formation. On m’a appris comment calibrer mon discours afin d’atteindre la “bonne” cible. A mes débuts, je ne me posais pas plus de questions que cela sur le procédé, l’important était d’atteindre le lecteur. Point. Depuis que j’ai fait mon coming out ma vision a changé. Je me suis rendue compte que je le faisais tout le temps, éludants des informations selon mon interlocutrice ou l’interlocuteur. Un procédé qui me frappe là, maintenant, quand je me retrouve à devoir répondre à mon parrain et qu’en moi même, je me dis “Nan Joy tu ne vas pas causer douleur pelvienne avec un homme de soixante berges. - “A part que je ne sais plus ni quand, ni où je vis la majorité du temps… ” Que j’ai la sensation d’un un robinet à lait maternel. “Ca va. On est deux. On se relaie. C’est une vraie chance. ” Comment font les femmes dont les mecs retournent bosser après une semaine ?

Valentine tend le bras pour attraper le sac de Caleb. “On est contente de ne pas en avoir eu deux d’un coup! ” C’est une plaisanterie entre nous. Parce que maintenant, que l’on mesure toute l’implication d’une naissance… On se demande ! Ma mère n’a jamais évoqué sa maternité de façon super précise. Mais, j’imagine l’état de son corps en plein mois d'août en Inde… Heureusement que papa n’était pas en mission à ce moment. “C’est gentil. Merci à vous deux. On enverra une carte à la maison.” Val me tend le sac et j’ouvre pour regarder le contenu rapidement. “Whaou Titi… On va avoir de quoi faire. C’est super. ”

Le thé doit avoir terminé d’infuser. Je me charge d’aller chercher la théière. C’est un des premiers cadeaux de Zac quand j’ai quitté la maison. Je m’en suis pas séparée depuis. J’y tiens, même si elle en a vu de toutes les couleurs. “Parce que c’est un joli prénom ?” L'intéressé est bien réveillé maintenant. Valentine l’approche tranquillement pour proposer un portage au comte. Il a une petite-fille cette année. Du coin de l'œil je vois les billes de mon poussin s’ouvrir en grand, ses mains s’agiter et il sourit. Je me concentre le temps de finir d’amener le plateau du thé et de le stabiliser.

“ Parce que… je voulais un prénom qui ait du sens. ” “Jefferson” ne plaisait pas à Valentine. Mais, elle n’était pas contre le principe. Caleb n’ignorait pas que Zac et moi n’avons pas eu de contact avec la génération d’au-dessus entre les silences et les décès. “Ca vous plaît ? ” Bien sûr, Violet était l’héritière nommée et c’était très clair. Ce petit bonhomme verrait avec la dame. Elles avaient le temps de voir venir. “On va lui parler de toutes nos facettes.”

Valentine venait du milieu militaire. C’est un pan dont on parlera. Même si j’espère qu’on aura un fils pacifique. Je me chargea de verser le thé. Philip gazouille et bave en regardant Parrain. A ce stade c’était tout ce qu’il lui fallait. “Léonor va bien ? Vous êtes content ? ” Lui aussi ne devait pas être loin de la fin de carrière non ? Qu’allait-il faire de son temps disponible ? Lui qui travaillait tant.

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J’espère qu’il ne va pas lever les yeux. Il y a des toiles d'araignées. -”Parce que vous auriez voulu?” Une question que je me suis posée quand la FIV a fonctionné. D’autant qu’on nous a prévenu que les grossesse gémellaires ne sont pas rares, voire communes, quand on a cette assistance. - “Pendant une petite période. Oui. ” Depuis, j’ai clairement changé d’avis. Je me demande comment ma mère a fait. Je me sens plus clémente et plus douce envers elle et mon père aujourd’hui. Il y a des choses que je comprends maintenant. Comme ce besoin surréaliste que Philip aille bien, qu’il ne manque de rien, qu’il soit épanoui. Je vais leur dire.

-”- Ce n'est pas grand-chose, juste de quoi vous permettre de ne pas avoir à chercher ce que vous allez manger ces prochains jours.” C’est spécifiquement ce dont on a besoin. Je n’ai pas du tout la foi pour cuisiner. Titi a de nombreuses qualités. Mais la cuisine… Disons que c’est moi qui m’en occupe. J’ai pris ça de Papa. -“ La cuisinière de la famille c’est elle. Je pense qu’elle en a marre de mon chili. ” L’autodérision est l’une de ses forces. J’adore son petit sourire quand elle sait qu’elle fait de l’humour sans savoir si ça va marcher.

Phil va facilement dans les bras des autres. Je tiens à ce qu’il soit habitué. La coparentalité est un concept qui me parle beaucoup. Dans l’idéal, je voudrais que chacun contribue à son éducation. Je profite qu’il soit entre bonne main pour manger un des biscuits.

C’est plaisant d’en parler avec un proche qui a du recul. Il n’y a pas beaucoup de témoins de l’histoire de mes parents. -” Je vois oui. Ou une envie de réconcilier un peu les générations?” Je pense que Parrain a été dans les premières loges au moment du conflit. Zac et moi n'avons eu que des bribes. On ne parlait pas de “ça” à la maison. C’est tout. Il ne fallait pas donner de l’importance à ces personnes… - “C’est ça. ” Que mon grand-père paternel méprise ma mère n’a rien à voir avec mon bébé.

-”C'est un bon raisonnement, mieux vaut ne pas lui cacher des choses.” Surtout quand on sait les dégâts que cela peut faire sur le long terme. Aujourd’hui, je sais que les parents ont fait ce qu’ils ont pu. J’ai travaillé dessus. Je ne leur en veux plus. - “De toute façon le secret ça ne marche pas. ” Nous en étions la preuve. La plus grande partie de mon adolescence avait été une quête vers mes racines américaines… - “Puis, je suis la preuve que le mélange des cultures donne de bons résultats. ”

Je connais mal les filles Hanovre. Mais je connais encore moins Iris. Elle était plus jeune que nous. Par contre, j’ai tout le temps apprécié le fils de Caleb. Il était sympa avec moi quand on se retrouvait pour des journées d’été. Cela faisait plaisir de savoir que leur vie avance paisiblement. - “Philip est un de Lascelle. Mais il ne sera pas comte. ” Je sais que Parrain est au courant. Ne serait-ce que parce que Papa a certainement demandé son avis. - “Violet sera une parfaite comtesse. ” Valentine reprend le petit. A sa bouille, il ne va pas tarder à s’assoupir.

Philip baille tel un ange. J’essaie de ne pas craquer. -“- Et vous deux, comment allez-vous vous organiser?” Très bonne question. Ça fait deux ans qu’on a préparé le terrain. Parce que pour elle comme pour moi hors de question de faire subir des absences à notre fils et à notre couple. Non. J’en ai trop souffert enfant. - “ Je reprends en septembre. J’ai obtenu une affectation sur Londres à la R.A.F. ” Nous avions tout préparé. Martin a pas mal aidé pour préparer sa candidature. - “ J’aurais des horaires fixes. ” C’est mieux.

- “J’ai repris contact avec le New Herald. Ils ont un départ en retraite et ils cherchent quelqu’un. ” Rien à voir avec la géopolitique internationale. Je ne vais plus faire de reportage en zone de guerre. Nous nous cédentarisons. L’idée a fait son chemin. C’est la peur de perdre papa par balle qui m’a convaincu d’avoir une vie plus sécurisée. Val est d’accord. - “Plus tard peut-être l’Inde. ” Je lance un souris entendu à Parrain. - “ Je n’ai pas envie qu’ils se retrouvent seuls.” Ce n’est pas pour tout de suite. Mais ça n’empêche pas d’y penser. Je ne vois pas maman masser son mari jusqu’à quatre-vingt ans. Il a son dos. Elle a ses genoux. Ce n’est pas sur Zac que je vais compter pour l’avenir de nos anciens…

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On dit que "bon sang ne saurait mentir." Aujourd'hui, j'accepte que ce soit une réalité. J'en suis même contente. -” Mmm... oui vous avez pris le meilleur des deux.” Cela prête à un sourire ! C’est complètement le genre de compliment délicat dont vous êtes capable. - “JOY: A ce qu’il paraît!” Si cela tient au fait que j’ai fais moins de bêtise que Zac… Oui. Je me demande ce qui se serait passé s’il avait rejoint la NAVY, comme papa. Enfin, pas comme papa du coup. Mais, s’il avait été dans l’armée comme tous ces cousins d’Amérique. Ça l'aurait sûrement cadré. Il ne serait pas tombé dans toute cette … - “On ne peut pas nier ses racines. ” Le peu de fois où je suis allée rendre visite à Marraine, j’ai vue! Les Sanders sont bien plus caractériels que les de Lascelle. Maman paraît presque tempérée en comparaison.

Nous tombons souvent d’accord parrain. Je me retrouve dans vos avis bien plus souvent que je ne le dit. Je sens souvent qu’il vaut mieux que je n’en parle pas devant maman. Mais, j’en discute avec papa. Oui, papa est forcément tiraillé. -”Je connais votre père, Joy.... je pense qu'il doit se sentir tiraillé. Vous devriez en parler un peu avec lui. A moins que vous ne souhaitiez définitivement pas entendre parler de ce titre... qui lui reviendrait de droit. ” Que dire de tout ça ? Nous créons notre famille pour nous. Val accepte toute la complexité de notre famille. Ce que je trouve déjà génial. - “VALENTINE: Moi je suis là en soutien. Quelque soit leur décision. Je ne cherche pas à avoir le patrimoine, juste la fille.” Nous n’avons aucun besoin financier. Ce n’est pas sur ce plan que les choses se jouent du tout. - “JOY: C’est une situation qui n’est pas simple pour Papa.” Nous ne lui avons pas simplifié les choses. Nous émanciper nous a fait du bien. Je ne le regrette pas. Il fallait bien qu’on affirme notre double appartenance. - “J’aimerai que Philip ait le choix. Mais, je ne m’opposerai pas à Papa. ” Mais, je lui parlerai dès qu’on aura un moment en tête à tête.

C’était un sujet de longue date. Le fait que gand-papa rejette maman nous avait choqué. On avait fait ce qui nous paraissait le plus juste. Un peu comme ce que papa avait fait lui fin de compte. -“JOY: Qu’en penses-tu parrain ?” Je n’ai jamais entendu ton point de vue réel. Est-ce que tu as trouvé notre marque de loyauté stupide ? Je suis assez adulte pour l’entendre maintenant! Ton regard m'apporte à chaque fois de quoi réfléchir.

-” Cela ne va pas vous manquer, le terrain? A toutes les deux? Bonne et vraie question. Perso, je sais où j’en suis. Je ne veux plus être loin de ma meute comme avant. C’est terminé. La simple pensée de… Non vraiment les armes, la violence, la misère… J’ai eu assez pour une vie. - “VALENTINE: Aucune idée. On verra ?” Je sens une main qui prend la mienne et je souris. - “Pour l’instant, j’ai envie de construire.” C’est un projet raccord. Je ne me serai pas lancée toute seule dans tout ça. - “JOY: Un peu de paix ça ne peut pas nous faire de mal. ” Même s’il ne connaît pas l’histoire de Sharma, papa lui a parlé de l’attaque terroriste.

Nous rions toutes les deux. A peu près tout le monde à la même réaction quand on parle de Bellary. Ils trouvent ça trop éloigné, trop précaire. Je ne vois pas en quoi. Mais, ils ne connaissent pas le pays comme nous. -”Je ne crois pas qu'ils vous en voudraient, si vous décidiez de rester ici. Pensez à votre fils, aussi.” Je te souris. -“JPapa non. Maman… c’est moins sûre.” Elle ne nous demandera jamais de rentrer en Inde. Jamais. Non. Mais, je sens qu’elle aimerait bien. Ceci dit, ce n'est pas ce qui fera pencher la balance. Même si j’adore les parents… Oui. Philip passe avant tous les autres c’est sûr. Lui qui a l’air si tranquille là entre nous.

Je passe mon index le long de sa joue ronde. Il a un bâillement de lionceau absolument adorable. Avant de rencontrer Valentine, je n’aurai pas pensé à fonder une famille c’est vrai. -“JOY: Parrain… tu lui apprendra à être un garçon droit et honnête avec moi ?” Mes repères moraux et éthiques je les dois à toi et papa surtout. J’espère que notre enfant sera une personne honnête et fiable. En tous les cas plus que nous. - “VALENTINE: Est-ce que je prends une photo de vous trois ? Pour la postérité ?” Je ne sais pas trop si c’est un truc pour toi. Mais, l’album de grossesse a été un petit plaisir et maintenant on continue!

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Nous savons que Papa a de nobles motivations dans tout ce qu’il entreprend. Il est droit et il fait attention aux autres. Ce n’est pas pour rien qu’il a été doublement recruté par le gouvernement britannique et par sa majesté. Quelqu’un d’à peu près ordinaire voit vite que c’est homme de valeurs.

J’aime le calme et la sagesse des plus vieux que nous. C’est reposant. -”CALEB: Ce que j'en pense...Qu'il y a beaucoup de gâchis dans cette histoire. Mais comme me l'a fait remarquer votre mère. Cela ne me regarde pas.” Entendre mon Parrain dire ça me fait toujours un pincement au cœur. Je regrette que la relation soit aussi compliquée entre maman et lui. Mais, il faut bien avouer que maman n’est pas facile parfois. Quand elle a pris une décision… Aucun d’eux ne m’a vraiment expliqué l’origine de leur désaccord. -“JOY: Mh. Tu es un des amis de papa les plus chers. Ton avis compte. ” Ce qui est vraiment dommage c’est que nous voulons tous que les choses se passent au mieux. Alors pourquoi est-ce aussi compliqué ?

-”- Ah votre mère... ” Je ne peux pas me retenir de rire doucement, parce que papa peut avoir la même réaction concernant sa comtesse adorée. Je sais ce que c’est avec un frère aussi borné. -“VALENTINE: On n’a pas vraiment envie d’aller contre elle, ça! ” Titi est plus intimidée par papa que par maman. D’habitude c’était le contraire. Je crois que c’est parce qu’elle adore les femmes qui ont du caractère. Mais enfin qui dit caractère… -” Vous verrez bien comment avancerons les choses. Ne précipitez rien.” Nous sommes d’accord. Pour le moment tout le monde est en Angleterre. Pour dieu sait combien de temps encore. -“JOY: Un jour vous me raconterez votre rencontre avec maman ?” Au fond ça m’intrigue.

-”Enfin, je verrai ce que je pourrai faire pour lui.” Tant mieux. Même si mon père est un lord de naissance, je ne l’ai quasiment pas vue dans son rôle. A Bellary personne ne faisait réellement attention à son titre. Il n’y avait pas la même présence de la royauté là-bas. J’avais très peu connu grand-maman Catherine. Avec le recul, je trouvais triste de ne pas lui avoir davantage parlé. J’aurai voulu lui poser des questions aujourd’hui. Je voulais savoir si elle nous avait quand même aimé, nous ses petits-enfants. -“JOY: Est-ce que tu crois que… ma grand-mère nous a apprécié ? ” Il n’y a personne dans ma famille pour me le dire. Mais, Parrain vit ici depuis toujours. La comtesse d’Avon était peut-être une femme remplie de regret? -“Maintenant que la nouvelle génération est là, je pense plus souvent à celle d’au-dessus. ” Les photos feront plaisir à papa. Je sais que maman aussi dans le fond.

Phil réagit dès que sa mère approche pour nous montrer l’écran de l’appareil photo. On échange pour qu’elle le prenne à bras. -“VALENTINE: Est-ce que vous viendrez à notre mariage ? ” Oui on tient à ce que ce soit là où les de Lascelle ont grandi! C’est pour ça qu’on s’y ait pris en avance pour annoncer la nouvelle. J’espère vraiment que Mallory et lui seront là. Ils font partie des proches. Même si Parrain n’en a peut-être pas autant l’impression que moi ? -“Nous avons réservé deux Haciendas pour les familles anglaises pour le moment. Iris et Arthur envisagent de prolonger le séjour sur place. ” Qui sait combien de voyages de ce genre nous aurons ensuite ? Je crois vraiment qu’il faut célébrer tant qu’on le peut!

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La sagesse d’un juge est difficile à mettre en cause. Quand je dis que son regard a de la valeur. -“VALENTINE: M. B… je veux dire lord Blackmore a raison chérie. Le présent avant tout. ” Bien entendu entre cartésiens vous vous y retrouvez l’un et l’autre. J’avais l’intuition que Titi se sentirait à son aise avec mon Parrain. La preuve en image. C’est chouette. Je préfère largement quand il y a une entente globale.

Il y a des situations de rêves qui n’arriveront jamais. Je pense qu’aujourd’hui chacun s’est fait une raison. Je trouve dommage la réserve entre Caleb et maman c’est vrai. Malheureusement, aucun de nous ne peut y faire grand-chose. C’est entre eux. -“VALENTINE:Merci du conseil. Je ne court pas après les coups de griffes.” Ma chérie a un superbe instinct de survie. Elle a la tête au clair et elle sait prioriser sans remords. C’est un savoir-faire que je n’ai jamais eu naturellement. Cela me fait du bien de l’avoir près de moi quand je doute de la conduite à tenir. -“JOY: Ce qui est intéressant c’est que les deux personnes sur cette Terre qui adore Papa se … détestent tant. ” Papa non plus n’en disait rien. Mais c’était tout de même curieux.

Ce n’était pas le seul point de curiosité. Maintenant que je me penchais davantage sur l’histoire de notre famille, je me heurtais à une forte omerta. -“JOY: Mh, moi qui pensais qu’il y avait prescription. ” Mais, je commence à me dire que seule la mort sonnera la fin de ce silence générationnel. Franchement, je trouve cela un peu idiot de ne pas parler des choses plus simplement. Mais, je ne vais pas aller froisser mon cher Parrain!

-”Peut-être est-il normal de penser aux anciens, mais encore une fois, ils n'ont pas à avoir trop de poids sur votre esprit. La meilleure personne pour répondre à cette question, reste votre père.” Bon sûr ce point nous sommes tous les deux d’accord. Le comte d’Avon était le mieux placé pour me raconter tout cela. Mais, je ne sais pas. Ca n’a jamais éta facile d’aborder ces sujets à la maison. Il faut peut-être que je compte sur une absence de maman. Quand elle est là tout est retenu. -“JOY: C’’était mon prochain témoin justement. ” Mon enquête historique ne va pas s’arrêter à cause de quelques résistances. Mon âme de journaliste est stimulée par toute cette retenue.

Je n’aurai pas les clefs du passé aujourd’hui. Soit! Je nous tournais donc vers le futur. Nos épousailles étaient un sujet heureux. C’était agréable de se projeter mariées. C’était l’attaque Birman qui m’avait décidée à lui demander sa main. Je ne voulais pas partir sans avoir partagé tout cela avec cette femme extraordinaire. -“JOY: Nous les guiderons pour découvrir tous les charmes de cette terre. ” Ce sera un plaisir de faire découvrir les beautés de l’Inde. Surtout si les gens sont curieux.

Nous voulons que ce soit un événement festif et réconciliateur. Mais, je ne sais pas si cela va fonctionner. -”Les réponses sont-elles plutôt positives pour le moment?” On savait que délocaliser la cérémonie là-bas aurait un effet dissuasif pour certains. Je sens tout de suite Valentine me regarder. Mais, je ne vois pas pourquoi cacher une vérité simple à Caleb. Cela ne va pas l’étonner non plus. Quoiqu’il en dise, il fait partie des témoins privilégiés de l’histoire. -“VALENTINE: Si ce n’est les Sanders… oui. Les gens viendront.” Les Porter se sont même organisés pour embarquer des amis de leur famille avec eux. Comme quoi ce n’est pas pareil selon les familles. Je suis contente pour Titi. Le reste, j’essaye de ne pas me sentir touchée. La combo mariage lesbien et Inde je sais que … ça a fait un tri. “JOY: Les plus importants seront là. ” Il faut philosopher.

“JOY: Nous sommes très heureuses que vous veniez.” Tranquille, je propose de resservir un peu de boisson chaude à tout le monde.

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Mon âme de journaliste se trouva tout à fait d’accord avec toi parrain. Le meilleur moyen pour avoir la bonne info c’est d’aller la chercher directement à la source. J’entrevis le sourire Val. La thématique de mes origines est récurrente depuis un an. Oui, depuis la conception de Philip. Je fais le lien évidement. -“JOY: Je ne voulais pas être intrusive sur votre passé. ” La pudeur britannique fait partie de moi aussi. Je sais que dans le milieu on ne s’expose pas. On parle uniquement quand il faut. Le silence de maman autour de sa jeunesse et de sa famille est tout aussi choquant.

-” Je pense qu'ils en seront heureux, ils sont plus aventureux que nous.” Je n’ai jamais réellement pris le temps de côtoyer les héritiers de la génération. Les choix des parents n’y sont pas pour rien. Mais, il n’y avait pas que ça. Je ne me suis jamais sentie appartenir à la noblesse non plus. C’est le fait que papa passe son titre à Violet, l’année dernière, qui m’a interpellée. -“VALENTINE: Vous n’avez pas l’âme au voyage ?” Il avait fait les classes avec papa et quelques autres.

-”On peut être surpris, vous verrez bien. ” Après tout, oui. Il n’avait pas tort. L’on avait bien vu des petits miracles se produire. Il n’y avait qu’à repenser au mariage de Prem avec Violet au printemps. Tout le monde avait été présents. Tout le monde c’était tenu. -“JOY: C’est vrai. ” Je pense aussi que cela ferait du bien à maman de retrouver un peu sa famille. Même si elle ne le dira pas. -”C'est une bonne façon de voir les choses.” J’aime voir le verre moitié plein dans la vie. C’est comme ça qu’on peut avancer. On a tellement de chances, au fond, d’être ici en vie, en paix. Beaucoup de monde ne peut pas en dire autant ici bas.

Val guettait le sommeil de notre bébé. Le cycle de sommeil est court. On n’aime pas qu’il se réveille en sursaut. C’est tout un défi de limiter l’angoisse d’un nourrisson. -”Mmmm... c'est bien parce que c'est vous.” Je ne doutais pas que c’était la stricte vérité! -“JOY: Je le sais Parrain. Et j’en suis vraiment touchée. ” Je céda à mon instinct et alla lui faire une courte embrassade. Parfois, les mots sont nuls pour exprimer une émotion. Mais l’effort dont il faisait preuve me rendait optimiste.

La suite se fit dans cette ambiance conciliante. Je me met en retrait afin que Titi puisse parler d’elle. Je l’écoute se présenter et je ne peux pas m’empêcher de sourire, en la voyant s’ouvrir tout doucement. Elle est belle. Ma fiancée… Je regarde aussi Caleb écouter avec politesse. Je sais comment il était à notre âge, j’ai vu des photos de maman. Je me demande comment les choses se sont passées pour lui ? Est-ce qu’il avait déjà été amoureux ? J’ai du mal à l’imaginer dans l’amour ou la séduction. Cela me rend curieuse. Mais, je demanderai plutôt à papa.