Chère Rose, nous ne nous voyons pas aussi souvent que je l'aimerai. J’ai du mal à me dire que Dalia vient d’avoir deux ans. Il n’y a pas si longtemps, tu me donnais tes conseils pour la bercer et qu’elle s’endorme. Les enfants font cet effet, n’est-ce pas ? Marquer le temps qui passe. J’ai la sensation qu’Archi grandit entre chacune de nos séances. Il a perdu la rondeur de l’enfance. Je le vois qui gagne en assurance. Comme cela doit être déstabilisant de voir l’enfant qu’on a porté devenir autonome. Je suis déjà sidérée de voir ma Lili exiger sa paire de chaussures préférées et essayer de me tenir tête.
Mais j’aime l’observer évoluer et grandir. Elle réclame une adaptabilité constante. Je sais que j’ai été moins présente à l'hôpital ces dernières semaines. Je me suis concentrée sur elle et son père. Je ne veux pas retomber dans ces plannings surchargés par les activités. Ensuite, je me retournerai pour me rendre compte que je n’ai rien vu passer. Prem et moi avons aussi des projets pour nous. N’y a-t-il personne qui attire ta tendresse ?
Oh, j’entends un petit pas que je connais bien. -”Tiens tiens tiens…” Murmurais-je en vissant le capuchon sur la plume. Bien sûr, elle porte ses collants licorne. J’en ai commandé une seconde paire. -”Momy!” Elle tient sa broche douce et l’album “Bo et les animaux de la forêt”. Ni une ni deux, elle approche et pose la brosse sur ma cuisse et va s’assoir sur sa petit chaise. -”Momy brosse cheveux.” J’approche, alors qu’elle ouvre l’album sur ses genoux pour le “lire”.
-”On fait la couronne ?” Lili annone de la tête. Je dégage doucement ses cheveux. -”Je ne t’ai pas entendu.” Ses grandes billes noires quittent la page avec les renards rouges. -”Oui. Couronne.” Je contiens mon amusement dans un sourire. En ce moment, notre fleur n’aime pas qu’on la taquine. J’essaye de faire un peu plus attention. Le rouge-gorge sort de la pendule pour annoncer trois heures et demie. Le petit oiseau retourne dans sa cachette. Déjà à cette heure ? -”Tu te souviens Dalia. Qu’est-ce qu’on fait après le goûter ?” Nous nous préparons depuis hier soir à ce projet. Je fais cela quand je veux qu’elle retienne. -”Les jouets rangés.” Il faut en passer par là si on veut pouvoir continuer à circuler dans cette chambre.
La porte claqua dans le fond. Immédiatement, Dalia suspend sa lecture. Elle lève les yeux. Je la sens qui guette l’entrée du salon. J’essaye de la faire tenir jusqu’à ce que je termine la tresse. A l’instant où son père apparaît sur le seuil, c'est trop tard. Elle laisse l’album et décampe pour aller dans ses jambes. -”Dada!” Je reste plantée avec la brosse. -”Lili ta coiffure… ” Je ramasse le livre et le pose sur la table basse, avant de sourir à Prem.
La lumière d’automne baisse brutalement. Il fait sombre d’un coup. Je vais allumer le plafonnier. côté mon portable vibre. *Bonjour Mme Hanovre, ici le laboratoire blood tests london. Les résultats de votre test sont arrivés Votre taux de bêta HCG indique que vous êtes enceinte de deux semaines. Prenez contact avec un gynécologue pour une consultation. Vous avez une carence en fer nous vous envoyons la prescription par email. Bonne journée. * Bien sûr Dalia passe à une autre idée. La balançoire… Mais, la pluie ne s’est pas arrêtée depuis ce matin. Il vaut mieux qu’on l’occupe au chaud ici. Cela demande une bonne dose d’imagination je dois dire.
Je passe près d’eux et j’en profite pour poser ma main sur la poitrine de mon chéri et aller lui voler un baiser. J’attends un bouquin depuis trois jours. Il vient d’Ecosse. Je veux m’en servir pour élaborer un nouveau type de séance. -”Mon colis est arrivé ?” Je lui dégage le front d’une mèche brune bouclée, comme je le fais avec Dalia. Ils se ressemblent. Je le vois chaque jour. -”Dada fait balançoire!” Je regarde vers le jardin. L’averse est continue. On serait trempés en deux minutes. Dans ces cas-là, il faut tenter une diversion. Je tends une main dans sa direction. -”D’abord on fait le goûter pour papa, maman et Dalia.” Maintenant, elle comprend très bien tout ça. La perspective d’un lait chaud chocolaté lui fait oublier le reste. C’est gagné pour cette fois. Lili prend les devants. Elle attrape la porte du frigo de toutes ses forces pour ouvrir.
-”Darling, tu veux un thé ? Tiens tu peux me dire qui a appelé ?” Leonor a encore une bronchiolite. Je prends des nouvelles régulièrement. Les poumons sont toujours fragiles chez les petits. Je suis un peu inquiète pour la petite. -”Iris ?” J’attrape au vol la bouteille de lait avant que notre chipie se la fasse tomber sur la tête. C’était moins une. Heureusement que mon coeur a un peu plus de pratique depuis que je connais son père. Téméraire comme un Hadid sans aucun doute!
En entrant dans la maison, Prem eu tout juste le temps de reposer son parapluie et le colis de Violet avant que Dalia ne l'accueille en courant de son pas tambourinant. «Mere chota phula», dit-il avant de la soulever, et l’embrasser sur la joue. La voir porter encore ses collants licorne le fit sourire. Elle ne s’en lasserait pas avant longtemps visiblement. «J’ai un cadeau pour toi, de la part de Joy, la fille de Zenon et Amélia». «Enon et Mamélia?» «C’est ça. Regarde, un livre remplies d’histoires. Si tu es sage, on en liras une ensemble, ce soir, d’accord?» La petite fleur au collant de licorne fit oui de la tête, et Prem la déposa, ainsi que le livre, dans le salon. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’il eut le temps de retirer son manteau, son foulard, et… ses bottes pleines de boue. «Merde».
«Merde!»
«Non! Non Dalia, c’est un gros mot, on ne doit pas dire des choses pareilles!», dit-il, en se retenant de pouffer de rire. «Papa aurait dû dire Zut!» «Zut!» «Voilà, c’est ça». Prem put enfin poser son sac, et embrasser Violet. «Bonsoir mon amour. Désolé pour la boue, et le zut… Il faut vraiment faire gaffe à ce qu’on dit maintenant, autour de la petite». Enfin, il se doutait bien que Violet ne devait pas avoir ce problème de langage. Un langage qu’elle n’employait à peu près jamais. C’était lui qui devait faire le plus attention à ce qu’il disait, car à cet âge, Dalia était une vraie petite éponge. «Ton colis est arrivé oui, je suis aller le chercher au bureau de poste. Joy m’a aussi fait un cadeau», dit-il en désignant le livre sur les grandes monarchies européennes. «Je vais nettoyer le plancher et je t'aiderai avec le goûter».
Au fond du couloir, Prem ouvrit le placard à balai pour en sortir la serpillère. Après l’avoir passée sous l’eau, il retourna à l’entrée pour nettoyer les taches de boue sur le plancher. «Je veux bien un thé oui», répondit-il, avant de retrouver le téléphone de Violet. «Je te dis ça tout de suite» Dans tout le chaos, il n’avait même pas entendu sonner. Violet avait peut-être une ouïe plus fine que lui. Il essora la serpillière, jeta l’eau sale à l’extérieur, rangea la serpillère, et finalement, souleva le téléphone de Violet pour regarder de qui venait l’appel manqué.
Prem relit au moins trois fois le message que le laboratoire d’analyse sanguine avait laissé à Violet. Chaque fois, ce qu’il lisait faisait battre son coeur un peu plus vite. Violet était enceinte? Prem se sentit transporté vers le passé, lorsque Violet lui avait annoncé être enceinte de Dalia. Il se sentit tout aussi inondé de joie qu’à ce moment-là, mais tout aussi saisi de la même peur. Pourquoi? Pourtant, leur situation aujourd’hui était bien différente de celle où ils avaient conçu Dalia.
Peut-être parce qu’il pensait aussi à ce qui lui était arrivé après. Son hospitalisation. Dire qu’aujourd’hui, il avait avoué à Joy que les enquêtes risquées lui manquaient… À quoi pensait-il? Il ne pouvait pas remettre les pieds là-dedans. Il ne pouvait pas exposer sa famille à ça.
Après avoir demeuré muet durant plusieurs longues secondes, Prem sortit de sa torpeur. «Ce n’était pas Iris, c’était…» Il s’arrêta au milieu de sa phrase. Combien de mari pouvait annoncer à leur femme qu’elle était enceinte? Ça ne devait arriver que rarement, se dit-il. Il hésita à tout lui dire dès maintenant. Après tout, il ne savait pas garder un secret. Malgré tout, il avait envie de faire quelque chose de spécial. «C’était un sondage téléphonique», répondit-il finalement, en déposant le téléphone. Il rejoignit finalement sa femme et sa fille à la cuisine. «Comment je peux vous aider? Ça vous dit de manger un curry de pois chiches et d'épinards? Question de refaire le plein de fer, mh?» Ce n’était pas le légume préféré de Dalia, mais mélanger avec la sauce et le riz, elle n’y verrait que du feu. Prem reporta son attention sur Violet. Tout sourire, il lui demanda : «Passé une bonne journée? Pas trop fatiguée? Si c’est le cas, va te reposer si tu veux, je peux prendre le relais…»
Je déposa un baiser sur la barbe de Prem, sous le regard curieux de notre Dalia. -”Ce qu’on dit et ce que l’on fait.” Confirmais-je en lui désignant notre petite observatrice. J’afficha un sourire taquin en la regardant. Le langage n’était pas le seul mode de communication entre nous. Je savais qu’elle comprenait autant mes émotions par ma voix que par mes gestes. Sa présence m’encourageait à prendre davantage sur moi, à conserver l’esprit au calme. Maintenant, il m’arrive de revisiter mon enfance d’une autre façon. Je pouvais mieux comprendre certains souvenirs. -”C’est gentil de sa part. Donc, elle n’est pas fâchée… ” Fais-je remarquer pour apaiser les doutes qu’il avait exprimés la vieille. Tout allait bien.
Je m’occupa donc de sortir une tasse pour chacun de nous. Nous n’avions pas de service à thé. Non, chacun avait sa tasse préférée. Finalement, j’aimais assez cet aspect bigarré que cela donnait à la table. Lili tendit les mains. Je plia les genoux pour l’attraper et la caler dans le rehausseur. -”Une compote ?” Nous n’avons pas encore de vergé pour en avoir de la faite main. Mais la comtesse nous fournissait de temps en temps en pot. C’était une autre attention de la part de ce couple protecteur.
Je leva la tête. -”Encore l’un de ces sondages… Mh. D’accord.” Ces temps-ci le gouvernement aimait sonder la population. Je n’y avais jamais prêté attention par le passé. Aujourd’hui, je me sentais tout de même plus concernée par tout ce qui se disait et se décidait. Sans doute parce que cela affectait mon quotidien. -”Je l’appellerai ce soir.” Ce serait l’occasion de lui demander comment s’était passé son entretien avec le roi. Elle était assez nerveuse sur le sujet.
Que manquait-il à notre jolie table ? -”Mh attrape le miel.” Le miel était meilleur que le sucre. J’essayais de donner l’habitude à Dalia de toutes ces petites choses. Doucement, je glissais le bavoir autour du cou de notre princesse. Je lui tendais la cuillère en bois. -”Rappelle-toi, dou-ce-ment. Sinon tu vas te fâcher et tout mettre à côté.” Son expression me fit rire. Elle était si expressive. Impossible de ne pas réagir. -”C’est une bonne idée de faire le plein de fer. ” De quoi emmagasiner des bonnes choses avant que l’hiver arrive. Les jours raccourcissent. Nous allions vers la période la moins facile de l’année.
Je posais le bocal à biscuits pour les mouiller dans le thé.-”Ca a été oui. Nous avons fait les devoirs. On a dansé. Dalia a fait une bonne sieste. ” C’était une journée de repos ordinaire. Je n’avais pas fait tout ce qu’il fallait. Mais je rattraperais plus tard. Elle et moi avions besoin de lever un peu le pied. Je gardais un œil sur Lili, qu’elle ne renverse pas tout. Elle apprenait la dextérité. Je trouvais que c’était mieux de jour en jour. Elle apprenait vite. Je souris à son père. -”Tout à l’heure on range sa chambre.” Je souffla sur l’infusion pour la faire refroidir un peu plus vite. Le parfum bondit à mes narines. J’étais étrangement sensible aux odeurs ces jours-ci.
-”Je veux bien que tu m’aides à rentrer le foin. ” Les chevaux ne donnaient pas de leçon aujourd’hui. Le dimanche était le jour où je pouvais prendre un peu plus soin d’eux. Il était important qu’ils soient en bonne santé et épanouis. Si la deuxième année se passait bien je pourrais peut-être envisager d’employer quelqu’un. Un contrat de quelques heures pour m'aider. Ce ne serait pas mal. -”J’ai rendez-vous avec le banquier mardi.” Nos crédits allaient bien. Notre situation était stable. C’était le moment pour commencer à épargner pour Dalia. Elle n’aurait pas accès au patrimoine des Hanovre. Je me suis fait une raison sur ça. Mais, il était hors de question que je ne lui laisse rien.
Je tirai le bouquin vers moi. Je l’ouvrais pour découvrir les premières pages. Je tournais doucement les pages. La mise en page était plus moderne que mes livres d’histoires. La banque iconographique était riche. Je m’arrêtais devant la reproduction d’un banquet. La légende me confirma ce que je pensais. Je scruta l’image jusqu’à trouver ce que je cherchais. -”Là.” Je leva le livre pour que Lili et Prem puissent bien regarder. -”Ton arrière-grand-père, Dalia. Josef Hanovre.” La photo avait été prise quelques mois après la fin de la Seconde Guerre mondiale. L’homme aux cheveux blonds et aux yeux clairs était jeune, beau, souriant. Il avait eu une place très importante dans l’armée allemande.
Prem était content que Violet s’intéresse à la vie politique de leur pays, mais ce soir, il espérait qu’elle ne serait pas trop pressée de répondre à ce sondage : il ne voulait pas qu’elle aperçoive l’autre message, et se rende compte de sa supercherie. «Si tu le souhaites. J’avoue que je ne les rappelle jamais, moi. Surtout quand c’est un robot à l’autre bout du fil. Si l’avis de la population les intéresse tant, qu’ils fassent un effort!», lança-t-il en s’asseyant à la table, en face de Violet. Puis, en tant que journaliste, participer à ses questionnaires pouvait être risqué, même si dans son cas, le choix de son allégeance n'était un secret pour personne.
Il laissa ses mains en coupe autour de sa tasse pour les réchauffer. Un thé était parfait pour une journée pluvieuse comme celle-ci. Tout comme Violet, il ajouta une larme de miel dans son thé, et juste une touche de cannelle. Il avait la dent sucrée, et sa fille semblait en avoir hérité. Il restait tout de même déterminé à lui faire aimer les légumes. «Je couperai les épinards en petits morceaux, elle ne se rendra même pas compte qu’elle en mange», dit-il, avec un sourire, en regardant Dalia, concentrée à manger sa compote. «Mh. Je me demande si Zenon et Amélia la gâtent autant en sucreries que mes parents quand elle est seule avec eux». Quand il était petit, c’était Jasmeet qui le nourrissait de jalebi en cachette après les messes. Le problème était que Noor et Aziz étaient si fous de leur petite fille qu’ils ne lui refusaient rien. «Tes grands-parents étaient comme ça aussi, avec toi? Josef Hanovre, c’est ça?», demanda-t-il à sa femme. Prem soupçonnait que Violet avait aussi dû charmer ses grand-parents, adorable future princesse qu’elle avait été.
Parfois, Prem avait le sentiment d’être le seul à avoir assez de fermeté pour lui dire non, à part Violet. Ils ne pouvaient quand même pas se laisser mener par le bout du nez par une enfant de deux ans! Heureusement, Dalia avait bon caractère, la plupart du temps, comme en témoignait le résumé de la journée que sa mère et elle avaient passée. Il approuva d’un signe de tête. Demain, c’était lui qui prendrait le relais. «Je voulais l’emmener avec moi à la Gurdwara demain, si ça ne te dérange pas. Il y a l’heure du compte, et je pense que ça lui plairait. J’ai plutôt hâte de la voir interagir avec d’autres enfants de son âge». Il était surtout curieux. Dalia n’avait malheureusement pas beaucoup d'occasions de côtoyer des amis de son âge, et son père espérait que cela ne lui causerait pas de tort plus tard.
À vrai dire, l’idée de la confier à d’autres qu’eux… Eh bien, il n’aimait pas ça. Cette seule pensée le rendait anxieux. Cependant, il se demandait si ça pourrait être une bonne idée. Avant de poser sa question, il gratta sa barbe. «Que penses-tu de trouver une place à la crèche pour Dalia? Disons… quand on aura notre deuxième? Juste pour tester? Peut-être qu’elle s’y plaira plus qu’ici…», suggéra-t-il, bien que peu convaincu lui-même par son idée. Cependant, il ne le suggérait pas pour rien. «Ça nous laissera peut-être plus de temps pour souffler quand le deuxième arrivera. S’il arrive. Enfin… tu comprends ce que je veux dire? Les deux en même temps à la maison, même avec l’aide de Poppy, j’ai peur que ça fasse beaucoup».
Après tout, ils travaillent tous les deux maintenant. Même si Prem pouvait travailler à la maison de temps en temps, et que Violet avait son haras et son école ici, ils ne pouvaient pas s’occuper de deux enfants en même temps de travailler. Surtout pas un nourrisson. Il leur faudrait peut-être faire des choix.
Prem acquiesça à la requête de sa femme pour mettre le foin dans la mangeoir des chevaux. «Je m’en charge après avoir mis Dalia au lit. Peut-être que d’ici là, la pluie aura cessé», espéra-t-il, après avoir pris une autre gorgée de thé. «Pourquoi tu dois aller voir le banquier déjà?»
Depuis qu’ils avaient discuté plus amplement de leur situation financière, Violet semblait en être beaucoup plus consciente qu’avant, et Dalia avait une garde-robe tout aussi bien garnie! Il suffisait juste de dépenser intelligemment, et selon leur budget. D’ailleurs, Prem ne critiquait plus du tout les dépenses de sa femme. Il lui faisait tout à fait confiance.
Le livre que Joy lui avait donné attira l’attention de Violet. Prem la suivit des yeux, et elle montra une des pages à Dalia, celle où il y avait son arrière-grand père maternel. Dans les traits de cet homme d’air distingué, il reconnu des airs de famille avec ceux de sa femme. «Un vrai gentleman», commenta Prem avec un sourire. «Il faudrait que je demande à mes parents s’ils sont de vieilles photos de leur famille». Il savait que Noor et Aziz n’avaient pas quitté l’Inde en bon terme avec leur famille, mais ils avaient peut-être ramené des souvenirs de leur ancienne vie, qui sait?
J’esquissa un petit sourire. Ce petit ton vindicatif me plaît toujours quand c’est lui. -”C’est vrai… Ils ne sont pas aussi près des travailleurs que ce qu’ils disent.” Quelle est la différence entre nos partis d’origine ? En fin de compte ? Je n’ai pas oublié les débats télévisés pendant la dernière campagne. Je revois Peterson qui prend la parole pour défendre une “solidarité britannique”. Les problématiques de fond sont sans réponses concrètes pour les petits-gens.
Parfois, j’aimerai être une petite souris pour voir ce qui se passe quand Dalia n’est pas avec nous. -”Je ne sais pas… Tu crois ? J’ai l’intuition que la comtesse n’est pas de celles qui font l’impasse sur l’équilibre ? ” J’ai peu de souvenirs d’Amélia de Lascelle. Ils faisaient rarement le voyage pour Londres, avant leur retour. Nous les voyons peu. Cependant, je me souviens très clairement d’un “Non” devant son fils, Zac. Nous avions neuf ans, peut-être un peu moins ? Je crois que Mère et elle ont la rigueur en commun. Au fond, je crois qu’elles sont bien plus semblables qu’elles ne le reconnaîtront jamais.
-”Grand-Pa oui.” Josef était un cœur mou et tendre. Il était tout le temps gentil avec nous. Je pense qu’il aurait apprécié une vie simple de roturier s’il avait eu le choix. Quand notre grand-mère est décédée, il avait changé. Il s’était refermé. Notre mère en avait souffert. Dire que maintenant… tout se répétait. Était-ce une malédiction ? -”Il était gentil.” Leur dis-je.
-”Allez-y. Tu me raconteras.” J’aurai aimé voir ça aussi! Mais c’était cela une vie de femme de la ville. Je ne peux pas organiser mes journées comme j’en ai envie. Je dois rester au travail. Je trouve que c’est dur. Élever et éduquer nos enfants n’était-ce pas une mission d’ordre national ? Ne fallait-il pas y mettre tous nos moyens ? Je pensais pas forcément comme cela avant d’avoir Dalia. Mais maintenant que je l’observe vivre c’est autre chose.
L’organisation de notre futur était une vraie question. Je ne voulais pas la mettre de côté. Depuis notre décision d'en faire un autre enfin, j’y pense aussi. Rose m’avait suggéré la crèche. Beaucoup de travailleurs choisissent cette option. Je comprenais pourquoi. Il y avait un aspect pratique. -”Je ne suis pas allée en crèche. C’est quelque-chose que je n’ai jamais envisagé.” Mais ce n’était plus un argument tenable aujourd’hui. Je suis mariée avec Prem. -”Je comprends pourquoi tu le proposes.” J’ai des réticences. Ces structures ont-elles assez de moyens ? Les gens qui y travaillent sont-ils neutres ? -”... peut-être un essai… oui… si tu veux.” Si ça ne se passait pas bien, nous en resterions là. Je prendrais sur mon temps de travail. Jamais il ne se fera au détriment de notre famille.
-”Pour l’épargne.” Lui répondis-je. Dalia Hadid ne serait peut-être pas l’héritière de ma famille…. Mais je lui céderais tout ce que j’aurais acquis en cette vie. Elle aurait tout. Mon petit trésor aurait de quoi se construire une belle vie. Et si… je devais quitter cette terre en premier… Prem aurait de quoi assurer leur avenir à tous les deux.
Je trouva que c’était une bonne idée de solliciter les Hadid. J’aimerai moi aussi en savoir plus sur leur histoire. Ils avaient un passé dramatique. Je savais que ça n’avait pas été facile. Ils avaient fait des choix difficiles et des sacrifices. La vie n’était-elle pas faite de ça ? -”Oui. Fais-le. ” Je passe ma main dans les cheveux de notre fille. Je déposais un baiser sur son crâne et humais ses cheveux. Mon bébé, ma petite fleur chérie, était le fruit de deux mondes. D’ailleurs, je devais me préoccuper des parents… tôt ou tard. Mais pas tout de suite. Je bus ensuite un peu de thé bien chaud. Il faisait du bien par ce temps.
Je les regardais l’une et l’autre. Leurs ressemblances étaient plus visibles. Lili se reconnaîtrait-elle en moi plus tard ? -”Mmm. ” J’écartais ça. Je ne devais pas m’inquiéter. Autant me focaliser sur le présent. Demain, je sortirais la jeune jument pour la monter. Cela nous ferait du bien de faire une balade avant qu’il ne fasse plus froid. -”Nous devons commencer à penser aux cadeaux pour la Noël.” Me dis-je tout haut. Je voulais trouver une belle idée pour les beaux-parents. Ils étaient si gentils avec moi. Ils étaient si accueillants. Je pencha la tête sur le côté avec un demi-sourire. -”Sais-tu ce qui te ferait plaisir ?” Je ne manque jamais d’idées pour lui. Mais maintenant je demande toujours.
Violet avait bien compris les critiques que Prem pouvait avoir envers les Travaillistes. Ils avaient peut-être déjà été plus à l’écoute de la population, mais il semblait de plus en plus que c’était de l’histoire ancienne. Cependant, ce ne serait pas ça qui le ferait voter pour les Conservateurs pour autant. «Oui. Ils s’amélioreront peut-être, mais si ce n’est pas le cas, ils auront cherché la défaite». Les élections n’étaient pas pour tout de suite, mais il y avait d’autres partis que ces deux-là.
En tout cas, le climat politique n’avait pas encore fait fuir vers l’Inde les DeLascelle, et c’était un plaisir de les voir plus souvent. «La comtesse, peut-être, mais je pense que Zenon est plus facile à amadouer», pensa-t-il à voix haute, avec un petit sourire. Étonnant de la part d’un ancien militaire, il faut dire. «Et puis, être parent et grand-parent sont des rôles bien différents. Les miens ne me gâtaient pas autant qu’ils gâtent Dalia». D’ailleurs, Prem leur laissait jouer ce rôle avec plaisir. Lui, avait peut-être été privé de grands-parents, mais il ne souhaitait pas la même chose pour sa fille. Ce serait à lui de lui dire «non» en temps et lieu.
Enfin, c’était déjà le cas, car Dalia avait son petit caractère. Ce n’était pas une enfant difficile, loin de là, elle avait seulement des petites «obsessions» ici et là. Elle n’aimait pas s’habiller pour l’hiver, ou ranger ses jouets, par exemple. Il n’y avait donc pas de raison pour qu’elle ne se plaise pas dans une crèche. «Je suis allé à la crèche de la Gurdwara. C’est Sohla, la femme de Jasmeet, qui s’occupait de nous. Je pense que c’est sa fille qui s’en occupe maintenant». Sohla et Jasmeet avaient eu cinq enfants, alors, un de plus, un de moins, quand Prem s’était greffé à eux, ils n’avaient pas vu de différences.Tout de même, la réticence dans le ton de Violet fit comprendre à Prem qu’elle n’était pas totalement convaincue. «Qu’est-ce qui te fais hésiter, ma chérie?», lui demanda-t-il, en prenant sa main dans la sienne. Prem ne voulait la persuader de rien qui la mettait mal à l'aise après tout.
Prem suivit le regard de sa femme, qui passa de lui, à leur fille, qui avait presque tout mangé son goûté. Son père s’empara d’une serviette pour essuyer le visage plus ou moins taché de Dalia. La petite s’était régalée. «Ah oui, tu as raison. Si tu tiens vraiment à offrir un cadeau à mes parents, cuisine leur quelque chose. Je pense que ça les rendra moins mal à l’aise». Puisqu’ils ne fêtaient pas Noël, ils ne s’attendaient pas à recevoir un cadeau, et encore moins à en faire. Quant à lui-même, Prem ne saura dire ce qu’il voulait. Il regarda pensivement Violet. «Hum, je ne sais pas, j’ai l’impression d’avoir tout ce que je veux», lui dit-il avec un sourire désolé. Il savait que, comme suggestion, il aurait pu faire mieux. «Peut-être un livre de partitions de sitar. Et toi, qu’est-ce qui te ferait plaisir?»
Prem était certain, lui, que Violet aurait déjà des idées. «Toi petite fleur, qu’est-ce que tu veux?». C’était facile de satisfaire Dalia. Un nouveau livre, une boîte de crayons à colorier… un petit tricycle et un casque. «Je sais, tu veux m’aider à préparer le dîner?» Depuis quelques temps, elle était curieuse en cuisine, et pour l’occuper et la garder loin du four, Prem lui donnait de petites tâches simples. Comme laver le riz ou verser de l’eau. Il la retira donc de sa chaise-haute, et commença à sortir se dont il avait besoin pour le dîner. «D’ailleurs, est-ce que tu as eu des nouvelles de ta mère? Ou de ta tante? Est-ce que son invitation à passer Noël à Hanovre était sérieuse?»
Le sujet avait été interrompu par leur départ précipité. Prem aurait été curieux d’y aller, mais il avait aussi constaté l’état d’Alexia, qui n’avait peut-être plus la force de recevoir des invités. Malgré leurs différences d’opinions, leur échange s’était beaucoup mieux passé que tous ceux qu’il avait eu avec le père de Violet, qui, depuis leur mariage, donnait peu de nouvelles.
Je détailla alors le visage de Prem. Il se métamorphose un peu chaque jour. Tout comme notre fille qui ne cesse de grandir. Mais les changements, chez les adultes sont peut-être plus lents ? Qu’ils concernent le corps ou l’esprit d’ailleurs. -”J’aimerai la protéger du monde et de ses violences aussi longtemps que possible. ” C’était une toute petite fille, adorable, curieuse, drôle. L’extérieur allait l’influencer. Elle allait s’endurcir pour faire face aux autres. En tant que femme je savais que c’était indispensable. Mais en tant que mère je ne voulais pas que ça ait lieu. -”Et puis, on ne saura rien de ce qu’elle fait, de ce qu’elle entend… de ce qu’elle comprend.”
-”Cuisiner à tes parents… Moi ? Ils sont bien trop bons à cela pour que j’ose quoique ce soit.” Ma pudeur ne pouvait pas aller dans son sens. Prem ne se rend peut-être pas compte qu’il a des parents pourvus de dons. Ils étaient très différents des parents avec lesquels j’ai grandi. Ils étaient si débrouillards… si eux ?
Pour autant, j’étais contente que Prem fasse l’effort de me donner une piste. Cela allait m'aiguiller. Je faisais moins de présents depuis que j’avais divorcé d’Edward. C’était aussi lié à ma nouvelle situation économique. Je le sais. Mais j’adore faire des cadeaux aux autres. Je trouve que c’est une bonne façon de s’exprimer sans dire un mot. -”Je voudrais qu’on danse. ” C’était une de mes activités les plus régulières par le passé. Cela me manquait. J’avais eu envie de lui proposer de nous inscrire à un groupe de danses de salon. Mais, je n’étais pas certaine que ce serait de son goût. Et puis, cela me paraissait un peu compliqué à mettre en place pour le moment. L’école prenait beaucoup de temps. -”Ou sinon j’aimerai que tu m'emmènes voir un Bollywood sur scène. ” Ca au moins j’étais plus sûre que l’on partage le plaisir.
Je dégageais la voie pour que Dalia se déplace sans prendre de risque. Prem avait raison. Elle serait mieux de faire la cuisine avec lui. Je préférais qu’elle fasse cela. -”Katerina m’en a parlé au téléphone oui. Elle était sérieuse. ” Nous nous parlons régulièrement au téléphone toutes les deux. Kat a pris la place d’intermédiaire. Cela se ressent surtout maintenant que Mère vit en Allemagne avec Hans. Je pense que sans nous le dire nous savons que les choses sont plus simples de cette façon. -”Visiblement maman va bien. Elle a toujours aimé l’hiver. ” Maintenant qu’elle était sur ses terres avec l’homme de sa vie, c'était sans doute une belle période.
Je poussais les chaises contre la table. Puis, j’entrepris de regrouper les effets de miss Hadid pour les amener au bon endroit. Poppy et son efficacité me manquaient chaque jour! Elle avait rangé derrière nous et particulièrement derrière moi, pendant de nombreuses années. Je me rendais compte que j’étais plutôt éparpillée, distraite. Je mettais vite en désordre quand je n’y prenais pas garde. -”Kat a proposé de nous offrir les billets d’avion.” Continuais-je sur le sujet. J’ai du mal à ne pas y voir une sorte de charité. Mais nous avions en effet besoin de cette générosité. -”Elle pense qu’il faut profiter que ma mère… qu’elle soit là. ” Je pliais un pull sans réfléchir. -”Qu’en penses-tu ?” Je n’étais pas fixée. J’étais partagée. Cela m’arrangeait s’il tranchait pour nous trois.
Je me relevai un peu trop vite. J’eu un instant de déséquilibre. Étais-je plus fatiguée que ce que je pensais ? Je me repris rapidement et j’attrapa le panier en osier pour le caler contre ma hanche. Pareille aux tableaux du XVII qui mettaient en scène des lavandières. -”As-tu des choses à remettre dans la chambre ? ” Autant ne faire qu’un voyage!
Les inquiétudes de Violet concernant l’entrée potentielle de Dalia à la crèche étaient valides. Il fallait faire entièrement confiance à quelqu’un pour veiller sur son enfant à sa place, et Prem aussi, avait dû mal imaginer Dalia entre les mains de quelqu’un d’autre que leur famille proche. Et puis, comment allait réagir Dalia en interagissant avec les autres enfants? «Je comprends», dit-il en sentant sa conviction fléchir. «C’est peut-être encore un peu tôt, mais il faudra y repenser. Je ne veux pas qu’elle soit surprotégée. La faire jouer avec d’autres enfants de son âge ne pourra qu’être bénéfique, à mon avis». Ce n’est qu’avec les autres qu’elle pourra apprendre à partager, à socialiser, et à se défendre, si besoin…
En attendant, ses parents étaient toujours heureux de pouvoir garder la petite de temps en temps. Contrairement à ce que Violet pouvait croire, Aziz et Noor n’oseraient jamais critiquer sa cuisine. De toute façon, selon Prem, il n’y avait rien à critiquer. Il laissa échapper un rire indulgent, avant de répondre : «Tu cuisines parfaitement bien et ils seront ravis. On peut se mettre à deux si tu veux. Ça leur fera plaisir que, pour une fois, ce ne soient pas eux qui cuisinent». Ses parents aimaient cuisiner pour les autres. La bouffe, c’est culturel après tout. Donner à manger, c’est aimer son prochain. Ils ne pourraient qu’apprécier le geste.
Avec Violet, il y avait bien plus que ça entre eux pour exprimer leur amour l’un de l’autre. La danse en faisait partie. «Mmh. C’est vrai, ça fait un moment que l’on n’a pas dansé». Elle était meilleure danseuse que lui, mais l’accompagner était toujours un plaisir, tant qu’il ne lui écrasait pas les pieds. Quoi qu’il en soit, il prit bonne note de ses suggestions.
Prem fit asseoir Dalia sur le comptoir de la cuisine, près de lui, et lui demanda de verser dou-ce-ment l’huile dans la poêle froide et la félicita quand elle en mit juste comme il faut. Il la chargea ensuite de détacher les feuilles d’épinards de leur tige, tandis qu’il procédait à la suite. «Tant mieux, je suis content de savoir que ta mère va bien». Voir en temps réel l’effet de la maladie dont était affligée Lady Hanovre l’avait saisi, mais aussi beaucoup réfléchir. Malgré leur opinion divergente, Prem ressentait de la pitié pour cette femme. Voir cela lui avait rappelé qu’il fallait profiter du présent, car on se sait jamais les malheurs que demain peut apporter. Elle s’est montrée compréhensive, et à l’écoute, malgré tout. Et puis, contrairement aux DeLascelle, Prem avait moins de scrupules à accepter un cadeau de la part des Hanovre. Ils étaient beaucoup plus rares… «Je pense que ta tante a raison. Allons-y. Je m’en veux encore d’avoir accaparé tout le temps qu’avait ta mère la dernière fois. Sais-tu si Iris sera là? Dalia pourra peut-être enfin rencontrer sa cousine! Tu te souviens de tante Iris, ma fleur? La soeur de maman».
«Oui!»
«Et de grand-maman Alexia?»
«Grand-maman Amélia?»
«Alexia», la corrigea Prem avec un sourire tendu. Les deux prénoms se ressemblaient, mais Prem se doutait que sa fille ne s’était pas trompée qu’à cause de ça. Dalia avait vu bien plus souvent Amélia qu’Alexia. Malheureusement, à part Iris, le côté Hanovre lui était peu connu. Prem retenu un soupir, et répondit à Violet. «Non merci Violet. Le dîner sera prêt dans 10 minutes».
Prem fit en sorte de faire un curry pas trop épicé, mais il ajouta du yaourt nature et beaucoup de tomates pour la sauce, des pois chiches, du tofu, des épinards, sans oublier le riz à la vapeur. Avec habileté, Prem façonna les boules de riz avec ses mains. Pour inciter Dalia à ne pas faire la fine bouche, mais aussi pour l’amuser, il avait pris l’habitude de décorer ses boules de riz. Avec des morceaux d’épinards découpés, il mit deux yeux et une bouche à chacune, censés représenter toute la famille.
Contrairement aux autres soirs, il n’y avait pas trois petits visages. Il y en avait quatre.
En espérant que Violet comprendrait, Prem posa les assiettes sur la table, incapable de cacher son sourire. «Viens dîner ma chérie. Tu me diras ce que tu penses de ma présentation…», lui dit-il, trépignant d’impatience, en asseyant Dalia dans sa chaise-haute. Il ne voulait rien manquer de sa réaction.
J'obtiens un compromis avec Prem. Je ne vous cache pas que j’en fus ravie et soulagée. Je ne voyais pas ma fille astreinte à suivre la cadence urbaine. A son âge ? Elle était petite. C’était notre bébé. Je souris et inclina le chef sans en parler davantage, car je voulais rester sur cette décision!
-”Faisons-le à deux.” Approuvais-je tout de suite. Je voulais de l’aide de Prem. Oui. Mais, aussi, j’aimais beaucoup quand on cuisinait ensemble. C’était un moment de partage. Cela me rapprochait de lui. Je lui offrais un petit sourire complice. -”On peut le faire demain.” Maintenant, le dimanche est le meilleur moment de la semaine pour avoir des activités en famille. Je ne me laisse pas de les voir cuisiner tous les deux. Ils ont l’air en harmonie. Chose que je n’avais pas ressenti avec mes parents. J’ai beau chercher en moi, je n’ai pas de souvenir de ce type.
Enfin, la Noël allait être une occasion de se créer des souvenirs différents, mais des souvenirs en famille. Puisque Prem était déterminé à aller à Hanovre, je me rangea à son avis. Il faudrait l’annoncer à ma mère, à Hans et la famille. Devrais-je aussi en parler à mon père ? Je ne savais pas du tout s’il serait là ? Les connaissants de mes oncles et tantes avaient dû s’arranger pour que la cohabitation soit… possible. -”Il me semble que oui ? J’appellerai ma tante demain pour en savoir plus. Elle me donnera tous les détails.” Katarina était une dame très bavarde. Je n’avais aucun doute qu’elle allait tout me raconter.
La confusion de notre fille n’aurait pas dû me surprendre. Mère ne faisait pas réellement partie de sa vie. Le mariage avait eu lieu au printemps. Lili était encore plus jeune à ce moment. Je ne pouvais pas m’étonner du résultat. Même si j’en étais attristée, je savais que je ne pouvais pas faire plus pour que les liens se renforcent. Les parents nous ont fait beaucoup de mal. Maintenant, je suis prudente et je ne vais pas m’en excuser.
Je m’occupe de débarrasser le salon pendant qu’ils terminent la préparation. Je rangeais un peu la chambre de Dalia pour que l’on y voit plus clair tout de même. La lumière du jour baissait déjà. Je n’en revenais pas que le temps passe aussi vite. La journée était passée comme un éclair. Je commençais à avoir faim. Je vins à la table, leur souriant, à tous les deux. Les parfums me donnaient encore plus faim. -”Ta présentation est trè-” La symétrie des boules de riz me perturba sur le coup. Ce n’était pas comme d’habitude. -”Tu en as fait quatre.” Avait-il plus faim ? Je m’approcha de Dalia pour lui nouer le bavoir. Elle savait très bien ce que cela voulait dire. Je lui souris. -”Merci d’avoir cuisiné ma chérie.” Je ne résiste pas à poser un baiser sur sa joue.
Je laissais Prem nous servir chacun notre tour. -”On partage la dernière ? J’ai faim.” Pendant qu’il le fit, j’aida Dalia à remplir sa cuillère pour sa première bouchée. Le geste était dans sa mémoire. Bientôt, je sais qu’elle n'aurait plus besoin de nous. Les enfants étaient… prodigieux. On se rend pas compte, avant d’en avoir, comme ils apprennent vite. J’entama ensuite la portion. -”Mmm!” Les saveurs me caressent le palais. C’était un plaisir à chaque bouchée. Moi qui n’était pas particulièrement gourmande… je me sentais avide.
-”Quel plat plaira à tes parents ?” Demandais-je, tout en me régalant. Prem connaissait leurs goûts. Autant, faire ce qui allait les réjouir. Comme ce bon petit plat me réjouissait moi-même.
Finalement, l’idée de donner en cadeau un plat cuisiné à ses parents convaincu Violet. «D’accord, je te donnerai un coup de main. Je sais qu’ils aiment le baingan bharta. Ce n’est pas la recette la plus facile à faire, mais c’est excellent. Puis, je t’aiderai», lui promit-il. Faire la cuisine lui plaisait depuis toujours, surtout grâce à sa mère, et il voulait que ce soit la même chose pour sa fille. Les recettes de famille lui rappelait toujours de beaux souvenirs, surtout des Diwali passées avec ses parents. Un jour, peut-être même que ce sera Dalia qui cuisinera pour lui les plats de son enfance, et il en serait choyé. Mais pas tout de suite. Prem trouvait chaque jour qu’elle grandissait trop vite.
Noël était une autre occasion pour elle de créer de beaux souvenirs, surtout avec la famille de Violet, que Dalia ne voyait pas souvent. Prem aurait pu trouver cela dommage, s’il n’avait pas eu autant de rancoeur envers eux. Les ponts étaient fragiles, mais recollés pour le moment. Il devait se raccrocher aux quelques personnes qui l’appréciait parmi les Hanovre, et bien sûr, à sa femme, qui arrivait mieux à se détacher de la situation. Après tout, c’était Dalia, leur priorité, et personne d’autre.
Dalia, et sa future petite sœur ou petit frère. Cependant, Prem fit tout pour ne rien laisser paraître de sa déception lorsque l’intention réelle de sa petite mise en scène passa sous le nez de Violet. «J’en ai fait quatre, oui…», confirma-t-il, cherchant dans les yeux de sa chérie l’étincelle de compréhension qu’il attendait avec impatience. En servant les plats, Prem se rendit à l’évidence : il n’avait pas été assez clair. Au moins, le curry aux épinards était un succès auprès de la fille autant que la mère, car elles mangeaient avec appétit. «Tant mieux si tu aimes, il en restera suffisamment pour demain midi», dit-il en regardant, attendrit, Dalia manger presque sans aide.
Il restait également la dernière boule de riz, la plus petite, décorée de son petit sourire en épinard. À l’aide de ses pinces, Prem la posa dans l’assiette de Violet. «Je te la laisse, ma chérie. Après tout, tu manges pour deux…» dit-il, avant de présenter à Violet le message laissé sur son téléphone. Elle n’aurait pas le choix de comprendre, cette fois, et sa mise en scène ne serait pas totalement perdue. Prem glissa sa main dans la sienne, ses yeux posés sur son visage, avec l’anticipation de celui qui ne voulait rien rater de sa réaction.
Je souris, à mon mari attentionné, contente d’avoir une deuxième portion. Il cuisinait très bien. J’avais faim, très faim. Sa remarque me fit tiquer. Pourquoi dire que je mangeais pour deux au juste ? Devais-je comprendre que “Je mangeais pour deux” ? Par réflexe, je tourna la tête en direction de Lili. Mais, une petite fille de deux ans ne pouvait pas me venir en aide… C’était idiot. Elle me tendit sa cuillère en m’appelant. -”Tout le monde me nourrit ce soir!”
Prem quitta la table. Je le regardais faire et amener mon téléphone portable. C’était inhabituel. Nous étions d’accord pour laisser ces outils loin du temps de famille et encore plus le temps du repas. Mais, j’acceptais de le prendre en main. -”Qu’est-ce-” En voyant l’expéditeur je me tue. Je lis le message. J’étais… -”Je suis enceinte … ” Je suis enceinte! Je lâche le téléphone. -”Je suis enceinte !!” Oui, maintenant tout était clair. Les sourires, la boule de riz, que je n’avais pas encore touché. Notre futur enfant était déjà dans la tête de son père. Je porte la main sur mon bas-ventre pour saluer cette vie à l’intérieur de moi.
-”Ca y est ?” C’était donc ça la fatigue des derniers jours. L’appétit débordant. Je repoussa la chaise pour me lever. Dalia me fixait étonnée. J’encouragea son père à se lever aussi. Tranquillement, je libéra les mains de notre fille pour l’extraire de la chaise-haute et la caler contre ma hanche. Je voulais que l’on ait un câlin… tous les quatre. Dalia s’agitait un peu. Ce qui était normal. Doucement, je la couvrais de baisers sur la tête, respirais le parfum de ses cheveux. Une joie merveilleuse s’emparait de moi. Je souris à Prem, avant de tendre le cou, pour venir échanger un baiser avec lui. Il avait su. -”Tu es adorable.” Comme c’était mignon d’avoir pris soin d’amener la nouvelle. Même si je n’étais pas très fine! Je souris de mon aveuglement. -”Je t’aime.” Lui dis-je, heureuse. Le père de Nos enfants. Je pose un doux baiser sur la joue de Dalia. -”La famille s'agrandit.” Je n’allais pas les empêcher non plus de terminer le repas.
Nous retournions donc à table. Je mangeais volontiers le riz, avec d’autant plus de plaisir, maintenant que je savais que cela nous nourissait. -”J’appelerai la sage-femme demain.” Nous pouvions faire une vio-consultation ensemble. Même si elle ne pouvait pas suivre ma grossesse, je tenais à l'informer de notre réussite. Je reprenais la main de Prem dans la mienne. Je sentais que cette nouvelle me faisait flotter. Ce n’était pas les mêmes circonstances que la première fois. Nous étions mieux armés.
-”Je suis tellement heureuse.” Maintenant, je pouvais me projeter, de manière concrète. J’avais un bébé à venir. J’en riais doucement de bonheur. La fin du repas était étrangement euphorique. Même le reste de la soirée que nous débutons. C’était comme si j’étais dans les nuages. Prem s’occupait de Dalia pour le bain et le couché. Je préparais une bonne tisane avec une douceur pour l’accompagner. Personne n’était menacé, personne n’était à l'hôpital cette fois. C’était comme je l’avais toujours rêvé. Je ferais en sorte que cette gestation soit la plus paisible au monde. Cet enfant aurait le calme et la paix. C’était le centre et ma priorité absolue. Je passais par la chambre de Dalia pour un gros câlin de “bonne nuit” et un tas de baisers. Mon trésor chéri allait apprendre à partager.
Guillerette, je laissais ma chemise de nuit actuelle pour un pyjama complet et chaud. Je coiffais mes cheveux avec soin, mis de la crème, tout pour une bonne nuit de sommeil. -”Mon petit bébé, tu vas voir, je vais te dorloter. ” Avec un plaisir non dissimulé, je me lova dans notre lit. Je calais les coussins pour être bien. Doucement, je m’approchais de Prem à son entrée sous les draps. Il me rendait si heureuse. Cet homme comblait mes espérances. Il m’offrait une famille. Je pris sa main tiède pour la coller contre mon bas-ventre, qu’il salue notre création. -”Cette fois-ci tu ne manquera rien. Je me reposerai. On fera tout ensemble.” Lui dis-je, ravie. Le reste n’avait pas autant d’importance que ce projet commun.
Lorsque Violet comprit enfin où il voulait en venir, Prem se leva à son tour pour la serrer dans ses bras, avant d’en faire de même avec Dalia, et les embrasser toutes les deux. «Tu te rends comptes Dalia? Tu vas devenir grande soeur! Comme maman avec Iris». Elle ne comprendrait sans doute que plus tard, l’important était qu’elle sache que c’était une bonne nouvelle. D’ailleurs, il n’aurait pas pu espérer une meilleure réaction de la part de Violet! Heureux que Violet puisse finalement partager son bonheur, Prem l’embrassa. «J’ai vu le message tout à l’heure, en rentrant. Je ne pouvais pas garder ça pour moi plus longtemps!», dit-il, le sourire aux lèvres. «Tout de même, je suis curieux. Si tu avais lu le message avant moi, comment m’aurais-tu annoncé la nouvelle?» Son idée aurait peut-être été plus claire que la sienne! Malgré tout, Prem était content que Violet en ait eu la surprise.
«Je t’aime aussi». Il l’embrassa sur la joue. Avant que le dîner ne soit froid, la famille se remit à table. Déjà, Violet planifiait une rencontre avec la sage-femme, l’Écossaise qui avait suivie Violet lors de sa première grossesse. Prem n’oublierait jamais sa discrétion à leur égard, car lors de leurs visites, leur relation était encore secrète. Violet l’avait adoré également. Qu’elle soit si loin était vraiment le seul inconvénient. «D’accord. Quand tu la verras, tu pourrais lui demander des références pour des collègues qui sont dans la région?».
Bien sûr, Prem aurait eu beaucoup d’autres choses à dire, mais il avait appris à garder ses inquiétudes pour plus tard. Il n’avait pas l’intention de gâcher le moment, et ils auraient le temps de penser à tout ça plus tard. Pour l’instant, il était aux anges, et rien ne l’empêcherait de célébrer la bonne nouvelle dans la bonne humeur. Voir Violet aussi enjouée le comblait, tout comme devenir père une deuxième fois.
Dire qu’avant de rencontrer Violet, Prem avait abandonné l’idée d’avoir des enfants un jour. En fait, Dalia avait été une surprise. Une très heureuse surprise. Il en avait pleuré de joie en l’apprenant! Aujourd’hui, il ne pouvait s’imaginer vivre sans elle.
En lui donnant son bain, il répondit à toutes ses questions sur ce qu’étaient les petites soeurs et les petits frère, puis, il la borda dans son lit, et lut un conte du livre offert par Joy. Il prit sa douche, laissant la mère et la fille se souhaiter bonne nuit, et il rejoignit Violet, déjà coiffée, crémée, et habillée pour dormir. Prem examina le visage luisant de sa femme avec un sourire. «J’aime bien ta crème de nuit. On dirait que tu brilles», murmura-t-il, en posant un baiser sur sa joue.
Il laissa Violet poser sa main contre son ventre, juste là où leur futur enfant grandissait. Avec un sourire, il pencha légèrement la tête pour le saluer. «Bonjour mon bébé. J’ai hâte de te voir», lui dit-il, en frictionnant lentement sa main contre le ventre encore plat de Violet dans un geste aimant. Lui aussi, voulait que tout se passe le plus calmement du monde, et il ne voulait rien manquer cette fois. «Je veillerais à être à la maison le plus souvent possible, et je tiens à venir à tous tes rendez-vous. Quitte à travailler moins, pour m’occuper des chevaux, et du reste. Je veux que tu sois apaisée…». C’était la moindre des choses, après tout ce qui s’était passé pendant qu’elle était enceinte de Dalia. Ils avaient vécus assez d’anxiété durant cette période pour le reste de leur vie. «Quand crois-tu que je pourrais l’annoncer à mes parents?» Elle était enceinte de deux semaines. C’était encore tôt, mais il n’y avait aucune raison d’être inquiet.
Nous avons évolué ensemble. Ce qui aurait dû être une aventure sans lendemain, une erreur, selon certains, était notre histoire. Prem prenait son “métier” de papa plus à coeur que ne l’aurait fait mon premier mari. S’il ne fallait qu’une seule raison d’en avoir changé, eh bien ce serait celle-ci. Les enfants sont des êtres innocents. Ils n’ont rien demandé. Nous leur devons au moins de les protéger et les aimer. Ne crois-tu pas ? -”Je n’aurai pas tenu non plus!” Lui dis-je. D’ailleurs, j’avais imaginé comment j’aurais annoncé la bonne nouvelle. J’avais finalement trouvé. -”Je te montre.” Je souris et fila dans la chambre de Dalia. J’y ai caché le t-shirt que j’ai trouvé en prévision. Lili aurait porté la bonne nouvelle au sens propre! Cela aurait été amusant m’étais-je dit.
Bien, cela voulait dire que j’allais modifier le calendrier. Je ne pensais pas qu’on y arriverait aussi vite. Enfin, la sage-femme avait dit que Prem et moi sommes deux fertiles. La preuve en est. -”Mh. Oui. Oui. Je vais commencer le cahier de grossesse et noter toutes les questions.” Cette fois, je ne me sentais pas inquiète. Nous avons l’expérience. Prem sera avec moi.
Je massa ma main sur sa barbe taillée. Il prenait soin de lui à sa manière. Je le trouvais bel homme. -”Je prends soin de moi comme la belle Chandra. ” Oui, je lisais un livre sur les religions de l’Inde. Je le lisais bien moins vite que ce dont j’avais l’habitude avant. Mais, j’avais beaucoup moins de temps libre. Je comprenais pourquoi les gens au travail avaient moins de temps à consacrer à la culture à présent. Il n’y avait pas assez d’heures dans une journée pour tout faire.
Prem était adorable. Sa tendresse paternelle me fait tout simplement fondre. Lui qui ne voulait pas d’enfant au départ. Il avait trouvé un rôle. Maintenant, j'ai tout aussi hâte de faire la connaissance de ce nouveau membre de la famille. Je calculais : -”Un bébé de l’été cette fois.” Ce sera bien pour faire découvrir la campagne fleurie et les animaux. Dalia serait plus grande et elle allait apprendre à cohabiter avec un autre. C’était très bien ainsi.
-”D’accord. Oui. Je tiens à ce que l’on s’organise pour vivre cette période ensemble.” Ce serait encore mieux que la première fois. Cette perspective me satisfaisait beaucoup. Économiquement, j’étais prête à discuter avec ma Mère si nous avions réellement une échéance. Elle avait les moyens de prendre soin de ses petits-enfants.
Je me posa la même question que Prem. Nous n'avons pas aller trop vite. -”Peut-être après la première échographie ?” C’était l’étape décisive dans le développement du bébé. Nous serions fixés sur l’avenir. Cela viendrait bien vite. Je malaxa le cuir chevelu brun en douceur. Dalia avait des cheveux moins fins et j'espérais secrètement qu’elle prenne de la nature de son père. Ils étaient si beaux. J’inspirais en songeant à la suite.
-”Que dirais-tu de Jasmin pour une fille ?” Proposais-je. Je me glissais davantage contre lui pour ne former qu’un.
Quand Violet lui montra le chandail préparé pour Dalia en prévision de l’annonce d’un nouvel enfant, Prem le prit entre ses mains, et afficha un sourire ému. «C’est adorable Violet. Je regrette presque de l’avoir appris moi-même!», dit-il en riant. Il replia soigneusement le petit chandail avec un soupçon de regret. Prem n’avait même pas songé à préparer quelque chose de particulier, considérant qu’il n’avait jamais imaginé connaître le résultat de l’analyse sanguine avant Violet. Alors, être trop dur avec lui-même ne servait à rien. Violet était aux anges, et c’est tout ce qui comptait. «On pourrait l’annoncer de cette façon à mes parents. Ils trouveront ça mignon».
En attendant, Prem remit le chandail dans la garde-robe de Dalia, qui justement, commençait à être un peu trop remplie. S’ils avaient une autre fille, Prem convaincrait Violet de réutiliser au moins quelques-uns des vêtements de Dalia devenus trop petits pour elle. Il essayait de ne pas trop regarder longtemps ce qu’il y avait à l’intérieur de cette garde-robe, car chaque fois qu’il trouvait un costume particulier porté une seule fois, comme cette robe de Noël de nouveau née, il était saisi de découragement. Dalia était la plus jolie petite fille du monde, mais elle avait vraiment trop de vêtements pour un bébé de deux ans.
Mais bon. Ça aussi, il en parlerait plus tard, car il n’avait rien de moins qu’une déesse dans son lit. La comparaison avec Chandra le fit sourire, et bien sûr, l’attendrit. Lui-même avait beaucoup appris des livres de contes hindous qu’il lisait à Dalia. Il y a tellement de Dieux et de Déesses dans l’Hindouisme qu’il était tout simplement impossible de tous les retenir, et les histoires pour enfants lui avaient rafraîchi la mémoire. «Belle comme Chandra, et rayonnante comme Sûrya, je ne peux que te vénérer, ma chérie». Un proverbe que l’un des auteurs de ces contes avait utilisé, et que Prem avait retenu, spécifiquement pour un moment comme celui-là. Avec un sourire, il posa un baiser sur son front.
Violet avait bien calculé. Normalement, leur deuxième enfant sera là au mois d’août, quand il fera chaud et beau. «Ça tombe bien, je serais en congé». En tout cas, ce serait plus facile de prendre des vacances pendant l’été. Ce n’était pas la période la plus active de l’actualité, ce qui lui laisserait donc le loisir de passer du temps avec sa famille. De plus, l’été était on ne peut plus approprié pour que leur enfant ait un nom fleuri, du moins, si c’était une fille. «Jasmin… En théorie, j’aime beaucoup. J’adore même. La fleur de jasmin est ma préférée. Je ne sais pas si ce serait juste, pour Dalia… De savoir que sa sœur ait le nom de ma fleur préférée». Inutile de créer de la compétition entre les deux soeurs, surtout pour une histoire de nom. Heureusement, ils ne manquaient pas d’options.
Surtout, ils avaient le temps d’y penser. Une étape à la fois, pensa-t-il, même si ce serait dur de garder cette bonne nouvelle pour eux. Prem entoura son bras autour de Violet pour mieux l’attirer contre lui et se lover sous leur drap. Il approcha son visage du sien, puis l’embrassa tendrement, heureux du futur qu’ils avaient devant eux. «Bonne nuit Violet, je t’aime».
