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Ne Obliviscaris [solo]
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- Qu’est-ce que tu veux?

Kenneth gloussa, et secoua la tête. Il croisa ses mains dans son dos. Il avança vers son frère, Tyrgan, de sa démarche féline. Il n’y avait pas qu’eux dans le petit salon du château; leurs ancêtres les regardaient de haut, le regard figé, silencieux et immortels. Kenneth fera de leurs portraits son public.

- C’est là une manière bien froide de saluer ton cadet, cher frère.

Le sourire fin sur le visage de Ken avait ce don pour provoquer l’ire de Tyrgan, et le premier en était parfaitement au courant. Habillé d’un col roulé en cachemire, de pantalons de tweed motif tartan et de souliers de cuir reluisants, Tyrgan avait peut-être l’air d’un duc, mais cette façade froide et digne continuait de lui aller très mal, alors que chez Kenneth, elle était toute naturelle. Tyrgan rougit de colère, et répéta :

- Qu’est-ce que tu veux?

Kenneth leva les yeux au plafond, et poussa un soupir.

- Malgré mes efforts, il est impossible d’avoir une conversation agréable avec toi. Ce n’est pas étonnant que tu n’aies pas encore de femme.

- Viens-en aux faits, avant que je perde patience et que décroche un glaive de l'armurerie pour te fendre le crâne avec.

Le cadet esquissa un sourire en coin et prit place dans le salon, tandis que l’aîné le fixait, le regard noir.

- C'est à propos des finances familiales.

- Si c’est pour demander une augmentation sur ta pension, oublie ça. À 28 ans tu ne devrais même pas être aux crochets de qui que ce soit.

- C’est facile à dire pour quelqu’un dont le job est assuré depuis sa naissance, mais ce n’est pas à propos de ma pension.

Tyrgan se frotta le visage, exaspéré, avant de regarder son frère dans les yeux.

- T’as du culot de dire ça Ken. J’ai beau être né de premier, je n’ai pas choisi mon job ni ma place. Tu avais la chance de pouvoir faire ce que tu voulais, mais t’as préféré devenir un boulet, enchaîner les scandales, et te cramer le cerveau.

- Même s’il ne me restait que la moitié de mes neurones, j’aurai toujours plus de cervelle que toi, cher frère.

Ce fut au tour de Tyrgan de s’esclaffer.

- Voyez-vous ça! Très bien, dis-moi ce qui t’ai passé par la tête dans ce cas. Qu’est-ce qui te préoccupe à propos de nos finances?

- Nous pouvons faire plus que notre production de whisky actuelle, et pourtant, tu refuses de l’augmenter. Tu me reproches mes scandales, mais s’il y a une chose que je sais d’après les nombreuses soirées où je suis allée, c’est que notre whisky et notre scotch sont très en demande.

- Tu ne me mets au courant de rien, rétorqua Tyrgan. L’accord conclu avec père et les employés des distilleries était qu’il y aurait de l’emploi pour chacun d’entre eux. Pas plus, pas moins. Je ne veux pas prendre le risque de collaborer avec qui que ce soit, surtout pas la mafia.

Pour la première fois depuis le début de leur conversation, Kenneth manifesta des signes d’impatience, sous forme de tics nerveux. Il renifla, et frotta son oeil droit, injecté de sang. La dose qu’il avait prise avant d’entrer au château commençait à faire effet.

- Depuis quand les Campbell ont la réputation d’être prudents, Tyrgan? Ce n’est pas en étant prudent que notre famille a acquis sa place au sein de la noblesse; la disparition des MacArthur, MacEwan, MacGergors, MacNabs, la bataille de Halidon Hill, le massacre de Glencoe! Si tu es à ta place en ce moment, c’est grâce à tout ça, que tu le veuilles ou non.

- Ah oui, le massacre de Glencoe, dit-il d’une voix neutre. Tuer des villageois dans leur sommeil et brûler leur maison… très courageux.

- Je ne te parle pas de courage! Je te parle de prendre des risques!

- Et pourquoi je ferais ça?

Kenneth se leva alors, pour approcher de son frère à nouveau, et posa sa main sur son épaule.

- Au cas où tu ne l’as pas remarqué, ce pays est sur le point d’imploser, et il faut se ranger du côté des gagnants, et en ce moment, c’est pas notre cher gouvernement. C’est le chaos total à Londres, et on doit en profiter au maximum, et faire le plus d’argent possible. Plus de whisky, plus de scotch, engager des gens, et mettre les bonnes personnes de notre côté. Vois la mafia comme n’importe quel autre partenaire d’affaires, et dis toi que c’est que du business. Elle cherche des opportunités, on cherche des opportunités, c’est gagnant-gagnant. Et si on nous mets des bâtons dans les roues, on répliquera comme seuls les Campbell savent le faire. Voilà comment on va redorer notre tartan.

Tyrgan scruta son frère un long moment, l’air impassible, avant de déclarer :

- Tu es fou, et tu n’es pas toi-même.

Alors que Tyrgan allait se lever, Kenneth, le front perlé de sueur froide et le regard trouble, se mit à parler avec une étrange douceur dans la voix.

- C’est toi qui n’es pas toi-même, duc. Tu joues un rôle, et ça te va très mal. Je sais que tu es malheureux d’être à ta place. Pourquoi tu t’obstines tant à rester duc, alors que tu es misérable? Tu n’aurais qu’à me donner les rênes, tu sais, ça serait si simple. Tu serais libre pour la première fois de ta vie. Tu pourrais devenir… prof ou joueur de rugby, ou peu importe ce que tu avais envie de faire. Tu pourrais te marier par amour, et pas par devoir. Tu n’aurais pas à faire subir à tes enfants ce que nous avons subi. Tu pourrais même changer de nom et tu n’aurais plus rien à voir avec les Campbell. Tu te dédouanes de tout, et je m’occuperai de tout.

Kenneth savait qu’il venait de tirer sur plusieurs cordes sensibles lorsqu’il vit le regard de son frère changer, et se mettre à fixer un point invisible dans l’espace. Il pouvait presque entendre le coeur de Tyrgan se déchirer en mille morceaux. Voir la souffrance exprimée si clairement sur le visage de son frère valait pour Kenneth le meilleur high de tous les temps. Pendant un instant, il crut presque que Tyrgan allait accepter. Puis, Tyrgan se leva finalement.

- Je préfère encore faire un boulot que je déteste, être marié à une femme pour qui je n’ai aucune affection, être détesté par mes enfants et être misérable toute ma vie plutôt que de te voir devenir duc d’Argyll.

Un silence pesant suivit la déclaration de Tyrgan. Kenneth, à nouveau, poussa un soupir.

- Soit. Je te souhaite une vie très courte dans ce cas, dit-il, sourire en coin. Adieu.
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08.06.20 4:43
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