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Pour la beauté du geste ( Andrew P.)
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Pour la beauté du geste
Eva & Andrew

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Le doux bruit du moteur de la Mustang mit Eva d’excellente humeur. Première sortie de l’année de cette jolie bête de compétition, dont elle avait faire modifier le moteur. Le soleil couchant donne à sa parure rouge une belle couleur. Deux semaines déjà que l’Italienne patientait pour lui faire prendre l’air. Elle choisit donc le plus long des itinéraires pour avoir le plaisir de la prendre en main. Elle sentit les regards se retourner sur leur passage et en conçut une petite satisfaction orgueilleuse. Le printemps Anglais était de ses favoris.
Une paire de solaire Dior protége ses yeux clairs. Un foulard vaporeux YSL recouvre sa gorge blanche. La robe noire a un charmant col bateau révèle le haut de ses épaules. Cadeau d'un ami de la haute couture qu'elle porte, autant pour lui faire de la publicité, que pour charmer le conservateur de la Galerie où elle se rend ce soir. Eva aime faire référence aux stars hollywoodiennes des années 50. Celles pour qui elle a voué une vraie passion adolescente. Ce ne furent certes pas les seules à nourrir ses fantasmes de jeunesse.
Tout en roulant, la vendeuse repensa à sa dernière conversation avec Sìne. C'est Charlotte qui les avait présenté, quelques mois plus tôt. Professeur d’Histoire de l’art à Brighton, cette esprit est d'une acuité tout à fait délicieuse pour une amatrice. Le dernier déjeuner passé ensemble avait d'ailleurs débouché sur un accord de principe. La Castelli participerait à la rédaction du prochain livre sur les Arts Incas. Ce projet l'excitait beaucoup. Elle a même commencé à organisé un voyage pour se rendre sur le terrain de recherche pendant l'été.
Sachant, que le trafic est toujours compliqué à cette heure de la journée, Eva trouva un parking souterrain à deux kilomètres de l'entrée. Le créneau parfait augmenta un peu plus sa bonne humeur. Elle rangea ses lunettes dans leur étui de cuir. Puis, elle vérifie la tenue de son maquillage dans le miroir. La bouche carmin et le léger fond de teint dissimulent les signes physiques de fatigue. Cela faisait à peine deux jours qu'elle était rentrée de Paris. Un voyage qui s'était révélé... chargé en émotion.
Elle quitta le véhicule avec l'aisance d'une sportive. Une petite pointe de douleur de le bas du dos lui signala qu'elle allait devoir retourner nager rapidement. Depuis sa réminiscence, Eva devait s'astreindre à des exercices physiques régulier pour se maintenir en forme. Une contrepartie tout à fait raisonnable au regard du type de soin qu'elle avait été forcé de suivre pendant la maladie. En plus, elle aime se dépenser. Il faut seulement qu'elle trouve le temps. Le bouton de la veste cintrée fermé elle sortie à la conquête de sa ville principale.
Elle en profita pour regarder l'ambiance générale. C'était un bon indicateur pour ses affaires... nocturnes. Les gens achètent moins lorsqu'ils sont moribonds. Elle passa devant deux affiches du Globes, et se souvenue alors qu'elle avait réservé des places au Coward, pour la semaine suivante. Il lui arrive régulièrement de prendre ainsi des places sur un coup de tête. Pour le simple plaisir d'aller au théâtre et de voir ce que l'Art vivant a à proposer. Sa main tira sur la poignée de la porte d'entrée avec énergie. Elle salua les deux vigiles d'un sourire enjôleur.
Le carton d'invitation glissé entre ses doigts Eva s'avança dans le hall pour retrouver son cavalier. Andrew n'était pas encore arrivé. Elle baissa les yeux sur la montre-poignée. Un léger sourire se peignit sur ses traits. L'homme était tout juste en retard. Elle alla au comptoir pour attraper une brochure. Elle prit la version Italienne qu'elle parcourue en déambulant dans le hall. Elle sourit en apprenant que Sisley avait été un ami de Ruel. Paul Durant-Ruel Marchand d'Art Parisien avait été une sommité de son époque, dans le milieu. Le regard de la belle tomba nez à nez avec une reprographie de l'un des tableau de l'Impressionniste. Elle se statufie et amusée détailla l'oeuvre reproduite sur papier glacé. Une bouffée de chaleur lui arriva dessus. D’un geste automatique elle dénoua le foulard et le glissa dans son sac-à-main Chanel. Une intuition la poussa à regarder sur sa gauche. Elle croisa les yeux du psychologue et sourit amusée.  « Le charme des Paddington. » Murmura-t-elle tout en se tournant dans la direction du grand brun. Eva fit un pas vers lui. Elle ne cacha rien de la petite malice que lui inspira son allure. Le sourire se mua pour une dérision complice alors qu’elle arriva à sa hauteur. « Charmant. » Elle glissa le prospectus dans son sac et se tourna vers l’entrée de l’exposition. “ Sisley et son siécle”.  « Connaissez-vous un peu la France Andrew ? » Ce que Castelli n’a pas préciser dans leurs petits échanges c’était que ce cher Alfred était certes Anglais mais aussi un expatrié. C’est ce qui donnait à son regard de peintre tout un intérêt.
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30.03.19 20:41
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Andrew partait déjà avec du retard. Le dernier patient qui était venu le voir en fin de journée avait pris du temps à arriver, le métier des feux bleus étant si aléatoires sur les capacités de ponctualité. La ligne avait demandé à ce que cet entretien se fasse au sein du service de la police, car il s’agissait de troubles personnels hors du cadre professionnel qui avaient amenés le sergent de police à sa porte. En effet ce dernier était en plein deuil de son père qui malgré qu’il respirait encore, n’en n’avait plus pour longtemps, au terme d’une courte et violente bataille contre un cancer du foie devenu discrètement métastatique. Alors ce premier entretien avait été plus compliqué que prévu, le service des ressources humaines étant avares d’informations, voulant laisser libre champ au patient. Les RH, une espèce étrange aux yeux d’Andrew. Trop souvent peu inclinés vers leur ressource première, l’humain.

Puisque la seule horloge du bureau montrait l’heure fixe et immuable de 4h50 – rappelant que l’heure du thé n’était jamais loin – Andrew ne prit conscience du retard qu’une fois la séance terminée et le policier reconduit à la sortie. Une fois assis, un œil à sa montre, puis à son calendrier, et il se cala au fond de son siège le temps de soupirer de s’être mis dans cette situation. Évidemment c’était en sachant pertinemment qu’il recommencerait autant de fois qu’il le faudrait, pour le bien-être et la guérison de ses patients. Si la séance devait s’étirer, elle s’étirait. Si du retard était à l’arrivée, alors soit.

La fenêtre se retrouva ouverte en grand, autant qu’elle pouvait l’être, et la chaise ne s’était pas remise du poids du docteur que déjà il se dirigeait vers les vestiaires, exploiter la douche quelques minutes, permettant à Andrew de se rafraîchir le visage. De retour à son bureau, une nouvelle chemise sur le dos, il ferma la fenêtre, et jeta un dernier coup d’œil à son bureau. Une fois remis en état, et aucun dossier ne trainant nulle part, il se permit de fermer le premier des deux boutons ornant sa veste d’un gris clair ; enfermant son gilet de deux tons plus foncés. Mécaniquement, sa main remonta ensuite le long de sa cravate noir orné de fines rayures argentées, jusqu’au col de sa chemise rose pâle, contrôlant ainsi l’état de son nœud windsor.

Ceci fait il disparut pour de bon de New Scotland Yard, et, grâce à ses talents insoupçonnés par le monde des mortels, il possédait déjà deux cigarettes roulées quasi identiques, le temps de passer le mémorial d’Afghanistan, deux de plus une fois le Whitehall gardens parc dépassé. La dernière échue directement entre ses lèvres, y restant inerte et éteinte jusqu’au pont de Waterloo. Seulement là, après consultation de sa montre, Andrew ralenti le temps de mettre le feu au papier et tabac. N’ayant aucune idée du temps qu’ils allaient passer dans la galerie, il semblait plus malin de fumer cette cigarette tard que tôt. Qui plus est, elle marquait définitivement la rupture avec le travail et le début de soirée de printemps. Soudain, à un jet de pierre de sa destination, une panique agrippa le psychologue, qui jeta sa main gauche son cœur. Cette dernière fut accueillie par les formes de ses lunettes, faisant taire le sentiment avec autant de vitesse qu’il était apparu, le laissant avec un sourire en coin, clope au bec, un air soulagé s’échappant brièvement de son nez. Malgré leur usage principal pour la lecture et l’utilisation d’écrans en tout genre, Andrew commençait à s’habituer à elles. Et pour profiter d’une peinture, il valait peut-être mieux les porter.

Enfin la galerie se présentait à lui, et il aperçut Eva. A nouveau son poignet présenta ses aiguilles, il avait quatre minutes de retard. Même avec son éternelle habitude de se donner de la marge de manœuvre, il était en retard. Rien de dramatique, vu que le ciel ne se déchaînait pas sur Londres, mais un retard tout de même. Le temps de traverser la rue, le fumeur expérimenté fit usage de son expérience. Le mégot de sa cigarette se fit pincer entre le majeur et le pouce de sa main gauche. Simultanément, sa main droite attrapa une vieille boite à cachous, la logeant dans le creux de sa paume. Le couvercle vola sur le dos du majeur droit, recouvert de l’annulaire. Le mégot atterri prestement contre le métal noirci par des centaines de ses congénères venus et disparus, comme un cimetière d’éléphants. Le couvercle en place, Andrew atteignait l’autre côté du passage piéton, et quand ses deux pieds furent du bon côté de la route, un fameux bonbon à la menthe – sans sucre – apparut sur sa langue, libérant le froid de la menthe au travers de la gueule souriante d’Andrew. Un sourire pincé à l’attention d’Eva, se sachant hors du temps annoncé.

Comme de leur rencontre, cette femme savait tirer les regards sur elle par son élégance et un accoutrement qui reflétait sans équivoque son statut et sa place sur l’échelle sociale. Une touche non négligeable de classe, mais l’assurance d’une leader. Arrivant à son niveau, à l’interne de son cerveau, on pria le docteur Paddington de bien vouloir aller se reposer et ne pas faire de l’analyse continue pendant cette sortie à vocation sociale et éducative. Et si tenté qu’il n’y puisse pas, qu’il fasse l’effort d’analyser l’artiste, qu’importe son manque de compétence dans l’analyse psycho-artistique.

Il n’empêchait rien, qu’Eva avait décidé, selon Andrew, de profiter d’un rare beau jour de printemps pour sortir l’apparat du paon. Et Andrew reconnut à son propre égard qu’il était toujours dans son costume trois pièces.
- Bonsoir Eva, commença-t-il, inclinant la tête respectueusement, mains jointes comme un dalaï lama, son sourire encore bien présent. Une séance plus compliquée que prévue, veuillez m’en excuser.

A la question de l’italienne, il la considéra un bref instant, ses lèvres partant sur sa gauche dans une demie moue pensive.
- J’ai de rares souvenirs de Normandie pendant mon enfance, et des images très floues de nuits arrosées à Lyon et Toulouse , admit-il, sa bouche s’étirant d’amusement. Mais je sens comme une couche de subtilité dans cette question. Me trompe-je ?

Machinalement, sa main gauche vint se loger dans une poche de pantalon, suivant le regard de la jeune femme dont il se réjouissait d’apprendre plus, que ce soit sur la peinture ou elle-même.

D’ailleurs… Sa sœur était-elle l’instigatrice de cette invitation ? flottant à l’arrière de son crâne, une paire de doigts s'élevèrent en la direction de sa soeur. Au cas où.
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31.03.19 18:37
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Pour la beauté du geste
Eva & Andrew

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Les yeux de la Castelli glissent lentement le long du costume. Un choix efficace qui met en valeur cette stature herculéenne. Andrew est fascinant. Tel le David de Michel Ange il est d'un esthétisme qui perd le regard. « Vous êtes tout excusé. » Rassura-t-elle le grand Anglais incliné devant elle. De ces quatre mots l’Italienne efface l’ardoise du temps. Pour être dépendante des circonstances, plus souvent qu’à son tour, elle sait que c’est compliqué. Elle ne réprimande jamais un individu retenu par le devoir. D'autant qu'ils ne sont pas réunis par des affaires mais par l'envie de partager un moment commun. C'est très différent.
Freud, Lacan, leurs héritiers, ont fait partie de ses lectures de jeunesse. Eva y avait retrouvé quelques clefs de lecture, pour les esprits tourmentés de ses artistes préférés. Comprendre la genèse d'une œuvre l'a toujours aidée à l'en aimer davantage. C'est ainsi qu'elle fonctionne. A l'opposée de beaucoup de ses confrères qui finissent par ne voir que l'apport mercantile qui se cache derrière l'objet. Quelle tristesse. Mais tout esprit commercial a ses limites. Tout comme elle avait rencontré -très vite- les limites de l’exercice psychanalytique. Quoi qu’elle ait une considération méfiante pour la psychanalyse, elle reconnaît l’importance de la parole dite. Du dialogue. « Avez-vous pu l’aider ? Ce patient ? » S'informa-t-elle donc tant par courtoisie que par intérêt. Elle garde dans l'idée que quelques unes de ses connaissances pourraient bénéficier d'une expertise. Mais encore faut-il trouver le bon homme. Charlotte lui refuse son avis concernant le travail de son frère. Cela donne une raison de plus à l'Italienne de se montrer curieuse.
Ils prirent la direction de la salle d’ouverture de l’exposition. La galerie est modeste. Ce fût l'un des critères pour arrêter le choix de l'instigatrice. Eva chercha en elle quelques souvenirs associés au Sud de la France. Faire la conversation voici qui est aussi un art et quel art ! Par chance, cette femme disposa rapidement d’une intelligence spatio-temporelle aiguë. La majorité des métropoles Françaises l’avaient hébergé. L'Europe continentale est son espace de prédilection pour le marchandage de haut-vol. Toulouse, ses pierres roses, ses théâtres, qui porte l'accent du sud sur la scène. « Une splendide galerie d’Art contemporain. Où était-ce déjà… ? » Là où un économiste va associer un territoire à ses richesses, un chercheurs aux découvertes scientifiques, une marchande d’Art retient les lieux par leur façon de cultiver -de rendre culte-  la beauté artistique. Pour cela, il faut bien avouer que la France reste une terre sacrée.
« Bien sûre oui. Il y a la question sous la question. » Confirma alors Eva avec une petite pointe d’humour. Pour un expert de la psychée humaine ce devait être une formalité. L'Italienne sourit. Elle est ravie vraiment. Cela lui change de ses interlocuteurs habituels. Elle se permet d'ailleurs avec lui, un jeu de langue et de langage, qu’elle épargne à beaucoup d’hommes. « Sisley est né Anglais. Mais dans son coeur il était Français. » Ils passent ensemble le seuil. La lumière change brusquement pour être moins forte. Une tactique simple et efficace pour créer une impression d'intimité. Eva s'est montrée un rien paresseuse pour cette sortie culturelle. Elle ne l'a pas préparée comme elle le fait pour ses homologues étrangers par exemple. Là est aussi le confort de faire quelque-chose, sur son temps libre, son temps propre.
« Je trouvais amusant de débuter notre Odyssée picturale par un natif qui a peint l'ennemie héréditaire. Ce n'est pas tous les jours que le Metropolitan prête ses trésors. » NYC et ses trésors cachés. Il y en a tant et plus. Castelli ne cesse d'y faire des affaires. Elle écarte cette pensée et se penche lentement pour décrypter un premier cartel.
« Alfred Sisley. Vue du canal Saint-Martin (1870). Huile sur toile, 50 × 65 cm, musée d'Orsay, Paris. Le canal Saint-Martin parcourt essentiellement les 10e et 11e arrondissements de Paris. Long de 4,5 km, il relie le bassin de la Villette au port de l'Arsenal (aujourd'hui port de plaisance de Paris) qui communique avec la Seine. Sisley adopte déjà à cette époque le style impressionniste. Les couleurs claires dominent et les formes se dissolvent. Il travaille par petites touches juxtaposées, cherchant à capter les effets de la lumière dans l'air et sur la surface de l'eau. » Après une courte lecture la belle recule de deux mètres. Les mains posées sur le bas ventre elle se met à scruter la toile. Elle vient au côté droit d'Andrew et aimablement elle patiente.

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03.04.19 23:05
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A ces quatre petits mots de politesse que l’on attendait entre deux personnes éduquées ; Andrew répliqua d’un hochement de tête satisfait, pouvant mettre cette entrée en matière prévisible néanmoins pas aussi polie qu’attendue. L’affaire étant entendu, et voyant sa compagne de soirée s’avancer, il allongea le bras dans un geste poli, préférant suivre que mener, cette danse étant loin de ses habitudes.


- Rien de dramatique je vous rassure. Mais il va falloir travailler un petit peu.


Une réponse courte, qui – il l’espérait – saurait traduire l’importance qu’Andrew apportait au secret professionnel, ainsi qu’au traitement de ses patients. D’autant qu’il n’était pas là pour parler boutique, mais bien plonger ailleurs à un autre moment. Sans compter que certains de ces patients étaient des membres des forces de l’ordre ; et par conséquent peu dans le cœur d’autrui.
Chassant ces pensées parasites et le dérobant de sa concentration, Andrew se saisit des lunettes dissimulées dans la poche interne de sa veste, pour les reposer sur son nez. Dès qu’il eut un pied dans la salle, ses yeux s’en allèrent se balader autour de l’entrée ; un geste d’un autre temps, où en lieu et place de Richelieu il portait des rangers. Sans ôter un sourire curieux de son visage, il écouta l’italienne soliloquer sur une galerie perdue. De sa position, Andrew voyait son visage de profile, et machinalement il plissa les yeux un bref instant. A nouveau Charlotte apparu dans un recoin de son esprit, avec ce sourire suffisant. A nouveau, il chassa l’idée que sa sœur tente de le piéger. Cela étant, Andrew jeta un œil sur les épaules d’Eva, la curiosité humaine étant ce qu’elle fut, uniquement interrompu par sa parole. Elle tournait autour d’une question avec un certain flair pour le mystérieux. Ce trait, bien tirant légèrement plus sur le trait de la manipulation que la psychologie, éveilla un certain intérêt chez Andrew. Toute personne qui savait user de l’esprit pour entoiler ses pairs finissaient par créer un lien relativement double chez le psychologue. D’un côté l’attrait de l’esprit, de l’autre la compétitivité pure.
Ainsi Andrew ne releva pas ce dernier trait d’Eva, préférant attraper le savoir qu’elle lui tendait, image à l’appui.

- Ah… Un homme en avance de son temps, il avait senti le Brexit, plaisanta-t-il, se penchant pour lire la description de la toile, légèrement en retrait.

Accompagnant sa lecture de légers coups d’œil à l’œuvre, comme on lisait des sous-titres lors d’une scène, son sourire devint un regard sérieux. Et même ce ne dura qu’un quart de seconde, il reprit un peu de cette vue sur la robe d’Eva. Il y avait un « je ne sais quoi » qui apparut comme un flash mental, une image subliminale qui résonnait avec les films noirs. Une fois de plus, la concentration d’Andrew et son absence de capacité de se focaliser sur deux sentiers séparés fut son grand ennemi. Machinalement et pour retrouver un semblant de stature, après une blague politique moins de deux minutes après leur départ, Andrew se racla doucement la gorge, alors qu’il détaillait la pièce.

- Je note l’ironie d’un anglais en son cœur un « froggy », dont les œuvres nous viennent maintenant des américains.

Les galeries ayant toujours eut un relent de sacré au même titre que les bibliothèques pour Andrew, ce dernier préféra se pencher sur le côté, sans pour autant chercher à surplomber sa partenaire culturelle.

- Je l’admets sans mal, mais qu’importe la qualité d’une photo, je trouve que la peinture insuffle plus… d’émotions que la photo qui la capture. Non ?

Un regard en coin vers Eva, sa phrase se répéta dans son crâne. Elle paraissait soudainement niaise. Mais au final, si dans son cabinet Andrew cherchait à faire sortir les tripes de ses patients, dans cette tanière, il se sentait bien de rendre la pareille aux coups de pinceaux.

- D’ailleurs, commença-t-il, lesquelles vous parlent ici ?

Un sourire en coin, Andrew avait malgré sa conviction, posé une question pour tirer d’Eva quelques mots. Quelque part, il ne connaissait pas réellement Eva, et naturellement, par des moyens proches de ceux de l’italienne, il cherchait à déceler une facette, sinon deux, de la Castelli. Andrew, en plus d’être joueur, était compétitif. Et Eva lui apparut comme une partenaire de jeu, une femme diantrement attirante sur ce terrain.
A nouveau, le concept du film noir et de la femme fatale les habitant, agita une main, quelque part au fond de la psyché d’Andrew. Au minimum attrayant, au plus haut fascinant. Cette soirée commençait en retard, mais se lançait sur un rail rapide.

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06.04.19 0:29
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Eva & Andrew

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L’Italienne penche la tête sur la droite de façon infime. Elle scruta le sourire de son vis-à-vis. Elle laissa un sourire venir. Elle comprenait fort bien la nécessité de la discrétion. D’autant, qu’elle en est elle-même l’obligée, dans ses propres activités professionnelles. Dépositaire d’un silence protecteur. Même si cette protection recouvre bien plus que l’intimité de sa clientèle. Charlotte ne sait rien des activités parallèles de son amie la Marchande d’Art. Cette double-vie, cette double identité, peuvent-elles se deviner pour un esprit formé comme celui d’Andrew ? Castelli en doute. Mais, il est vrai, que ce défi de cache-cache la rend plus joueuse. Un jeu dangereux. Un jeu des ombres.
Le Brexit… Oui. L’idée vient de loin. Dans les années 80 un parti politique avait cherché à motiver la masse. Seule la crise financière est parvenue à faire bouger la ligne. L’argent est le pouvoir dans le système actuel. C’est le nouveau dieu. La décision populaire, qui a fait basculer l’Angleterre, dans ce qu’elle est à présent a été motivée par la peur. La peur est le moteur des foules. Comment créer-t-on un conflit si ce n’est en créant une crainte ?
Eva n’a pas le droit de vote. C’est une Italienne hébergée. Une adoptée. Elle fait marcher l’économie de l’Art. On la tolère donc. Elle a fait avec. Elle s’est adaptée. Ce qui est une contrainte elle s’en sert tant que possible dans ses “petites” affaires. « Il était irrémédiable. » Les Anglais n’ont jamais réellement voulu de cette Union. Quel peuple fière. L’indépendantisme forçonnée de cette nation est sa force et sa faiblesse. « Vous ne croyez pas ? » Demande alors la belle curieuse. Elle lui sourit pour encourager. Un rien malicieuse et féline. Car elle aime percer les esprits à jour. La famille d’Andrew est plus Britannique qu’elle ne le sera jamais. Un homme qui est né et a servi cette monarchie vieillotte ? Quel est le point de vu d’un natif ? Aura-t-il les mêmes arguments que ses compatriotes ? « Étiez-vous pour ? » En 2016 la question ne se posait pas. Mais huit ans après… La discussion semble possible. Même plus elle semble intéressante. Car il y a de plus en plus d’opposants qui se manifestent. Ce n’est pas sans raisons. Sont-elles valables ? Voilà ce qu’il faudrait se demander.
Castelli connaît l’oeuvre de ce peintre rebelle. Enfin comme elle connaît beaucoup d’artistes du courant Impressionnistes. Sans être superficielle, elle n’est point une experte. Ce n’est pas son domaine. Mais, elle se souvient bien de la période. Comment l'émergence du XX siècle a
« Des oeuvres qui sont souvent envoyés en Espagne pour leur restauration. C’est ce que l’on appelle la Mondialisation. » Rit doucement la Marchande d’Art.
En Art il y a beaucoup de théories. Il y a aussi, aux yeux d’Eva, un peu trop de théoriciens. Elle en vient à se moquer des grands pontes de la Critique. Eux qui n’ont jamais pris le temps de faire -de vivre- l’Art. Ils sont comme des cuisiniers qui ne goûtent pas leur préparation. Elle préfère entendre ce qu’un homme comme Andrew a à en dire.
« Je suis d’accord avec vous. L’objectif met une distance, qui nous écarte du réel. » C’est de fait imposé par l’usage d’un appareil. Cependant, il y a autre chose. « Il le reproduit à l’identique, sans pour autant lui être fidèle. » Eva scrute alors les contours de la silhouette du quai. « Alors qu’une toile dégage toujours… une chaleur. » Elle redresse lentement sa nuque tout en poursuivant : « La passion dans toutes les imperfections. » Il est arrivé que Castelli soit émue aux larmes. Elle a pleuré sur les courbes des déesses Africaines. Elle a désiré les corps des modèles de Klimt. Pourtant les photos de Marylin Monroe ou d’une envolée d’oies sauvages la font seulement… sourire. Comme une appréciatrice du beau qu’elle est. D’un pas fluide, elle recule, s’écarte lentement. Son regard clair se pose sur son cavalier. Elle prend le temps de considérer sa nouvelle question. Elle n’a pas réfléchi à cela. Son oeil formé reconnaît le savoir-faire, l’art et la manière.
Mais Castelli a bien saisi que son interlocuteur ne veut pas savoir quelle est la plus belle des toiles. C’est celle qui a eu le plus d’effets. Eva sourit amusée par ce défi personnel. Elle débute une déambulation nonchalante dans la salle. Son regard passant tranquillement d’un tableau à un autre. Un sourire lui vient quand elle croise une des oeuvres de son palmarés. Elle s’en approche à pas de loup. “Under the bridge at Hampton Court” Le cartel en dit moins sur ce tableau. Tant mieux cela donne tout le champ à l'imagination et l'introspection.
« Celui-ci. » Elle le désigne avec un sourire de coniveance. Et elle s’abstient d’abord d’expliciter son choix. Qu’Andrew puisse avoir un avis totalement vierge. Elle aime la palette de couleurs, la vigueur des coups de pinceaux. Mais surtout l’idée du point de vue. Montrer ce qui est en-dessous. Voir ce que l’on ne voit pas. C’est une idée qui lui plait.
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11.04.19 12:31
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Si tenté que le cerveau et ses voix eurent des visages, c’était celui d’Andrew, assis dans un fauteuil, lisant son journal, qui sans lever le nez de sa colonne, annonçait « Tu l’as cherché ».
Cette blague sur l’échappée catastrophique et digne d’un sketch de mauvais goût, de la Grande-Bretagne de l’UE, devait s’arrêter à une absence de réaction ou dans le meilleur des cas, un simple sourire entendu que le rapport était facile, peu adapté mais amusant. Le sujet politique était un terrain miné de bouses de vache comme la religion. Force était de constater qu’il venait de tendre une perche et son mode d’emploi à sa partenaire. Du peu qu’il avait su capter lors de leur rencontre, Eva n’était pas anglaise. De ce fait le Brexit ne la concernait pas, mais l’avait transformée, elle et sa situation, par un jeu de dommage collatéral. Une dualité de relation entre vision externe et ressenti direct.
Tout d’abord, après le commentaire fataliste, Andrew s’immobilisa, comme pour accuser une charge. Les deux questions suivantes, et surtout la seconde, étaient chargées comme des missiles, certes en sous-texte, que le psy s’en découvrit un sourire pincé. Il venait de prendre trois revers à cette pique moins réfléchie qu’il n’eut pensé.
L’esprit affûté d’Andrew travaillait d’arrache-pied, mais avec l’aisance d’une loutre dans l’eau, à répondre à ce mouvement que venait de tirer Eva. La pensée alors le frappa ; cette conversation avait pris le tournant d’une partie d’échec. Il y avait définitivement donc en cette femme l’envie de jouer sur deux tableaux. D’une part le visuel, l’art, et son partage avec lui. Peut-être même le plaisir de sa compagnie. Mais dans le fond, quelque chose d’intrusif venait de percer un trou chez Andrew. Intérieurement, cet esprit vif commençait à étaler ses plans.
A l’externe, le sourire pincé muta, alors qu’il se redressa, droit comme un i. Une moue pensive se dessina sur son visage, alors que son bras gauche vint se ferme dans un poing reposé contre ventre. D’un geste qui trahissait sa réflexion, son coude droit se cala sur le poing, s’y fichant comme un sceptre pommeau bien connu. La main libre caressa par deux fois sa moustache avant de saisir le menton entre index et majeur. Pion sur E4.

- Irrémédiable je doute. Mais l’Histoire étant comme l’Ouroboros… il haussa les épaules, prévisible assurément. En ce qui me concerne… Ah, je n’avais pas le droit à une opinion.

Et comme pour y mettre un voile de pudibonderie, le docteur termina sa réponse ainsi, préférant se concentrer sur cet écartement de l’art photo pour celui de la peinture. Ainsi, pensa-t-il, Eva est une femme qui juge la photo comme une facilité, ou tout du moins exigeant et représentatif des imperfections de la réalité. Une notion intéressante pour habiller un peu plus l’éducation d’Andrew sur le sujet. Déjà Eva semblait passer de nénuphar en nénuphar, à la recherche d’une toile qui saurait avoir un impact particulier sur la marchande d’œuvres. La suivant, un pas en arrière, considérant son choix et sa manière, il s’arrêta à l’appel de la toile mentionnée. D’un geste précis quoi que lent, son index alla se caler sur l’arête de son nez, puis glissa vers le haut, repoussant ainsi ses lunettes face à ses rétines. Il se mit à ausculter ce pont, curieux, mains jointes dans le dos. Comme s’il observait Eva donner un discours, il voulut d’abord disséquer la construction, la géométrie, l’architecture, les couleurs. Comme si n ressenti s’expliquait par des formules secrètes, au même titre qu’une crème brulée d’exception se réalisait par l’expérience et le talent, mélangés comme les jaunes d’œuf à la crème.

- Un pont donc, annonça-t-il après un instant, un œil en coin vers Eva.

Par ce constat si évident qu’il paraissait inutile dans la conversation, il était en réalité question d’interroger Eva, s’assurer que l’astucieuse italienne ne se défaussait pas simplement d’une question, la jugeant en deçà de son niveau d’intelligence artistique. L’analyse de la peinture s’arrêta au découpage des plans. S’il fallait traduire la pensée d’Andrew en image, la peinture serait un reflet partiel d’Eva, non pas par sa représentation mais celle qu’elle s’en faisait. Il se tourna vers la souriante marchande d’art, abattant la carte évidente qu’il cherchait à la lire, à prétexter l’amour de la peinture, pour réellement poser cette question que personne ne voulait entendre :
« Qui est Eva Castelli ? »

- Qu’est-ce qui jaillis donc dans ce pont ? commença-t-il, pointant avec déférence quelques points d’intérêts. L’aviron, ou les subtiles promeneurs sur la berge ?

Andrew haussa les sourcils, malicieux et provocateur

- L’eau ? son reflet ? Le thème du miroir, ou simplement l’émotion ?
Andrew joignit la question au geste, ses mains s’ouvrant lentement, comme un livre. Si le reflet, imparfaite reproduction, était reprise sous le pinceau d’un artiste de cette qualité, était-ce une reproduction une interprétation?

Il était difficilement concevable pour Andrew que l’on puisse apprécier l’art pour l’art. Trouver des thèmes dantesques au nom de l’art, ressemblait de trop près aux interprétations des choix stylistiques d’auteurs morts et enterrés. Sans tomber dans le cartésianisme réducteur, une attraction à l’art était telle, pour des raisons d’émotion précise. Que ce soit une scène de Renoir comme déjeuner des canotiers, rappelant les dimanches en famille, ou la persistance de la mémoire de Dali qui évoque une pensée précise… Rien n’était dû fermement à l’art pour l’art selon le psy.
De même en allait pour cette attraction au jeu des questions nivelées avec Eva. Quelque part au fond de l’inconscient d’Andrew, se formait une idée simpliste mais aussi tenace que du lierre : qui d’elle ou lui, jouait avec l’autre?
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23.04.19 0:09
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Eva sentit la raideur soudaine de son voisin. Le temps d’une fraction de seconde elle songea que sa petite pique aiguisée était un peu trop mauvaise. Son regard glissa sur le profil du Docteur Paddington. Tout à coup, il ressemble presque à un soldat prit en faute.
« Fort heureusement l’être humain a d’extraordinaires capacités d’adaptation.   » Souligna donc l’Italienne pour que ce sujet -sensible- ne se referme pas sur une réplique négative. Elle se demanda tout de même pourquoi Andrew n’avait pas eu le droit de citer lors de cet événement autant politique que civil ? Quoique la curiosité avait été piquée, ils en resteraient là sur le champ politique. Même si de l’avis général de la dame, enfin de compte, absolument tout est de l’ordre de la politique.
Mais enfin ils s’y reviendront plus tard. Si ce n’est pas ce soir, ce sera un autre soir. Il y a des conversations qui ont besoin d’un verre auquel se tenir.
La belle se prêta donc au jeu de son cher ami. Un bien vilain jeu, en y pensant, qui n’est pas loin de la torture intellectuelle. Demande-t-on à un libraire quel est le livre préféré ? Tout l’art du choix est donc d’élargir suffisamment la grille d’évaluation pour qu’un tableau se distingue de l’ensemble.
« Un pont. » Fit-elle écho avec dérision. Il lui revint alors un adage que lui avait récité un vieil ami: “Il y a trop de murs et pas assez de ponts.” L'image aussi simple soit elle est terriblement parlante. L’Angleterre en est à présent une expression tristement parfaite. Ce grand dôme invisible dressé tout autour du pays. Plus un seul pont de plaisance pour traverser les eaux et la rejoindre.
« Regardez plus bas. » Proposa alors Eva. Les silhouettes du tableaux retiennent à peine son oeil azuré. Elles sont de pâle figuration. La flânerie du bord de l’eau est un motif romantique, réalité. Un lieu commun de la peinture de l’époque et de l’artiste qui est en question ici. « Sous le pont.   » Murmure-t-elle pour que le voile ne se soulève pas trop vite.
« Eh bien pourquoi faudrait-il faire un choix ? Je dirais qu’il y a de tout cela oui. Qu’il y a plus encore. Le contraste entre le haut et le bas, la lumière et les ombres. Il y a tout. » Castelli saisit alors le bras de son compagnon de recherche. Elle l’incita tranquillement à reculer de trois mètres dans leur dos. Elle s’arrête alors près de lui. Telle une véritable amie qui vient en renfort. Les pieds bien plantés dans le sol de la galerie. La stature droite comme celle d’une combattante qui attend l’heure de la bataille. « Il se sert du dessus pour montrer le dessous. Il montre sans le dire ce que l'on redoute. » Le regard scrute alors la forme de l'eau sous le pont. Tâche sombre dans le décor coloré. Alfred Sisley ne fût pas le plus talentueux de son époque. Ni le plus renommé des peintres. Pourtant dans certaines de ses oeuvres il parvenait à une subtilité d’exécution tout à fait désarmante.
La belle dame sort brutalement de sa contemplation. En fait, elle s'en extrait comme d'un rêve à la fois merveilleux et effrayant. Elle papilonne des paupières. Elle s'agite comme un animal qui se rend compte qu'il a trop paraissé. Ses doigts fins se ressert sur la manche de la veste masculine. « A vous. Dites-moi laquelle vous attire le plus Andrew ? » Souffle tout bas la négociatrice de l'en-dessous.

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10.05.19 18:08
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Si Andrew n’avait rien eut à dire pour le Brexit, c’était bel et bien à cause de l’uniforme qu’il portait alors à cette période. En bon militaire, chacun avait son avis, mais de par leur nature, les hommes en uniformes se devaient de rester apolitiques. Qui plus est, lors des débats houleux au départ de la décision de quitter l’Europe, l’entourage direct du – alors sergent – Paddington était très eurosceptiques et par conséquent, le débat n’avait pas lieu. On accusait l’Europe des maux britanniques, et de toute manière, l’esprit insulaire était jarre remplie d’autosuffisance. Un trait de caractère qui était douloureux à entendre pour le sous-officier. Par ailleurs, son commandant – un écossais d’origine – étant très européen dans l’âme, interdit formellement et simplement, toute discussion politique dans les lieux communs et de rassemblent, faisant ainsi une pierre deux coups, et rabaissa par la même occasion les velléités isolationnistes dangereuses pour le maintien de la cohésion.

De retour à la galerie d’art, Andrew se risqua d’un fin sourire amusé, se rappelant le mot d’ordre qu’il avait appris d’un professeur d’Histoire, féru de la Seconde Guerre Mondiale. « Improviser, adapter, surmonter ». Aussi la remarque d’Eva était on ne peut plus vraie. Et avant de pouvoir s’en rendre complètement compte, sa bouche s’entrouvrit.
- Improviser, adapter, surmonter, lâcha-t-il comme un souffle, un mantra, aussi cocasse qu’il refaisait surface dans une galerie d’art au centre de Londres.

Lancé désormais dans ce jeu, dans une espèce de bulle spatio-temporelle créée de toute pièce par cet étrange couple/duo que l’italienne et lui formait, Andrew se focalisait naturellement sur la voix de sa voisine, voulant en apprendre avidement plus sur l’art présent devant lui, ses mécaniques et ses attraits ; mais aussi plonger dans le monde d’Eva. Quelque part, il creusait un chemin vers l’esprit d’Eva. Aussi, la manière douce et simple, bien qu’authentique et honnête du docteur, était la plus adaptée pour parvenir à cette fin. Après tout, il était plus simple de visiter une maison dans laquelle nous sommes invités, au lieu de chercher à rentrer par effraction et dissimuler sa présence.

Suivant les indications de la maîtresse, en bon profane, Andrew voulut capter ce qui n’avait pas été visible pour lui. Apparemment, malgré sa méconnaissance de l’art, du sujet Sisley, il semblait s’en tirer honorablement. Ainsi l’art, contrairement à l’esprit humain, était un tout indissociable et apprécié dans son ensemble plutôt que disséqué par zone. Ainsi, les quelques notions d’Histoire de l’art glanée sur internet, qui préféraient dépiauter et déconstruire une œuvre, n’étaient au final pas justes dans leur appréciation de cette dernière. Andrew se retrouva surpris au contact physique. En bon anglais élevé au grain, le contact avec un autre humain n’était pas une norme, même en 2024. Cela dit, étant dans cet élan d’être mené sur deux temps, et relancer deux temps à son tour, comme une danse de salon, le docteur ne se retira pas de l’emprise d’Eva. Il y avait de l’autorité dans sa poigne.

*De l’autorité, de la bienveillance, et beaucoup de contrôle*, se fit-il comme note mentale.

Elle semblait bel et bien arborer un masque bien atypique. Ou plutôt, elle semblait en manquer pour ce rendez-vous culturel. Comme si la présence de ces toiles venait à révéler une part vraie de la femme qui tenait entre ses pinces son bras. Diligent et dans un état d’esprit à l’inverse de la combativité, Andrew se laissa guider comme un aveugle, à la recherche de cette vue magique et légendaire. Ce cliché si présent dans la littérature et les œuvres filmiques, qui portaient l’art comme étant seulement visible à distance. Comme si prendre du recul était une panacée non seulement aux aléas de la vie mais également à la compréhension du langage des artistes. Un mode de pensée qui, selon Andrew, sortait tout droit d’une galerie d’art française ou américaine, arrogante et industrielle, cherchant à branler le nœud intellectuel d’un quidam en recherche d’une éducation artistique mesurée par l’égo et non le sentiment. Il hocha simplement la tête, satisfait de la réponse. Ainsi il semblait que ce n’était pas la surface mais le fond qui attirait l’attention de la Castelli. Une couche de plus à cette femme qui cultivait le mystère, en se montrant sans se cacher. Andrew ne fit pas tant de réflexion mais quelque part dans son esprit, une lumière s’alluma, plaçant l’italienne dans une case de personnes bien particulières, celles complexes.

A la question d’Eva, qui visiblement retournait la balle dans le camp d’Andrew, ce dernier s’affubla d’un grand sourire, laissant entrevoir quelques dents au travers de la moustache. En arrivant dans la galerie il y avait eu une peinture qui avait capté son regard. Se redressant, Andrew fit pivoter son regard, se rappelant alors qu’il existait d’autres personnes autour d’eux. Ce bref instant hors du monde s’était éteint aussi vite qu’il était venu, mais déjà le docteur avait trouvé sa proie. Avec le phlegme tout britannique qu’il pouvait rassembler, mains jointes l’une dans l’autre au niveau de son torse, l’homme déroula son index en direction d’une peinture sur le mur d’en face, dans une semi-salle adjacente.

- Aussi profane que je sois, celle-ci m’a marqué lorsque nous sommes arrivés.

Laissant le temps à Eva le temps de suivre son geste, il pivota sur ses talons pour se mettre face à la toile et s’y engager. Esquivant une personne sur son chemin, prenant garde de marcher sans hâte, histoire de ne pas perdre l’italienne, mais également ne pas se démarquer plus que temps dans la galerie, Andrew s’arrêta à deux mètres de la dite toile.

- Neige à Louveciennes, lit-il en plissant légèrement les yeux, annonçant comme on annonce un projet scientifique à un jury.


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14.06.19 10:48
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Eva accepta de bonne grâce de lâcher sa prise sur le bras d’Andrew. Elle n’insiste pas en général. Ou alors seulement quand elle pressent que la résistance est une évaluation de sa propre détermination. La frontière entre les deux est très subtile. C’est là l’intérêt du genre humain à ses yeux. Elle ne saurait apprécier une relation tout à fait simple. Est-ce parce qu’elle est elle-même une femme compliquée ? Ou plus justement parce qu’elle n’a aimé que des femmes complexes ?
Ils sortent du circuit imposé par le scénographe de l’exposition. Ils se retrouvent près du point de départ. Cette zone est vide. Cela plait à Eva. Elle aime apprécier une oeuvre dans la nudité du monde.
“Le Neige à Louveciennes” est donc le nouveau sujet à contemplation. Castelli n’a pas spécialement fait attention à celui-ci au premier abord. Elle se rattrape dans une étude studieuse. Voilà qui donne un peu plus de crédit à sa façon de vivre l’Art… C’est à dire le plus souvent en compagnie. Il y a tant qui échappe à l’oeil. « A moi l’en-dessous et à vous le fond. Tout en profondeur. » Souffle-t-elle au camarade, tout en croisant ses bras. Un pied en avant, les hanches cambrées, telle une lady qui se satisfait de ce qu’elle voit.
« Où va-t-elle ainsi ? » Une demande faite dans l'intimité de l'instant. Comme si partager sa passion avec un autre implique un acte de confiance... voir même de fois. Plusieures hypothèses se présentent. Chercher la chaleur d’un foyer très certainement. Écouter le sermon du Père du village. Retrouver quelqu’un ? Un amant ? Une amante ? L’Histoire de l’Art est aussi passionnant que l’art en lui-même. Elle donne plus de sens. Elle donne de la nuance. Il existe parmi les historiens de très vifs débats sur telle ou telle interprétation. L’Italienne a son opinion à chaque fois. Mais elle ne s’en confie pas aux acheteurs. Ce serait indélicat. « Il préfère désincarner les personnages. "Les anonymes". Ils sont là pour servir le paysage. C’est intéressant. Pourquoi ? » Dit la blonde en allant regarder son compagnon de soirée. Possède-t-il une réponse ? Lui qui connaît les arcanes de l’esprit ?
Derrière Mr Paddington une femme âgée qui leur tourne le dos. Cependant Eva reconnait la permanente miel, les gangs blancs, le dos courbés par une longue vie. C’est l’une des femmes les plus riches du pays. Sa famille a fuit Jérusalem dans les années 30. C’est une collectionneuse passionnée. Sa présence en cette galerie donne à la Castelli une petite idée pour leur prochaine rencontre. La malice se dissipe lorsqu’elle cherche le regard du charmant anglais. « Nous allons voir la dernière salle et ensuite vous m'emmenez danser Andrew. » L’espace de fin de cette exposition rassemble des éléments qui ne sont pas picturaux.
Une correspondance de l’artiste avec ses contemporains. Visiblement il avait appris à écrire en Français et il possédait des bases en espagnole. Il écrit à Monet, Manet, d’autres moins connus sur la difficulté de vivre librement de son art à leur époque. Il s'est essayé à la sculpture. Ceux sont en majorité des maquettes d’oiseaux ou de natures mortes. Les formes sont assez brutes. Il n’y a pas de lisse. Les animaux donnent l’impression de sortir du bloc d’argile. Eva circule, flâne le long des allées. Elle se penche pour voir les objets, carnet de croquis, esquisses, pinceaux, le trousseau d’un peintre. Rien qui ne soit original. « Prenez-vous le pinceau Andrew ? Ou la plume ? » Étant dans le milieu Eva sait qu’il y a beaucoup plus d’artistes que ce que le Monde en montre.
Quant à définir de l’un ou de l’autre qui est l’amateur du professionnel. C’est aussi facile que de donner du mérite à une oeuvre d’art. C’est difficile. Un bon trait n’est pas forcément un beau très. Ce qui est réciproque. Doit-on considérer que le beau est le critère primordial ? Ou bien est-ce beau en tant que “création qui déclenche une réaction, une émotion ?” Les philosophes ont toutes sortent de choses à dire là dessus. La Castelli se fixe sur les désirs de sa clientèle. Tout porte à croire, selon ces derniers, que sa mère a été une véritable artiste. « J’ai écris un peu de poésie étant jeune fille. A la suite d’une peine de coeur. Très influencée par les symbolistes. » Ouvre-t-elle avec tant de lucidité sur la banalité de son acte créatif. Une femme très ordinaire qui avait écrit des vers sur un homme perdu.
Une porte et derrière une employée qui récupère audio-guides et commentaires. L’Italienne alors ralenti le pas pour être à la même hauteur que l’initié. Elle lui sourit. Il y a une modeste boutique un peu plus loin sur la droite. Le genre d’endroit où Eva ne va jamais. Si elle doit faire un cadeau à quelqu’un elle n’use pas du merchandising. « Eh bien ? A vous de décider Andrew. Je vous suis. » Elle a une façon de le dire. C'est à la fois amical et sincère et en même temps plein de défi. Un peu comme si Eva ne peut pas s'en empêcher.

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27.06.19 0:26
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Il y avait quelque chose d’intime, dans cet instant face au tableau, dans cette salle vide. Comme être chez l’artiste lui-même, ou dans un salon privé. Eva, se dit Andrew, devait connaître ce sentiment par cœur de par son travail dans le monde de l’art. Mais pour le psychologue, ce sentiment était tout à fait nouveau et le pris de court, alors que l’italienne posait son pied en avant, comme pour marquer son statut et appuyer son présent caractère. Un geste important, approuva-t-il en silence, un regard de biais vers Eva. Il retint un petit rire, alors qu’il rajustait ses lunettes du bout de son index, le menton légèrement rentré se faisant.

- Doit-elle aller quelque part ? entama-t-il, tête légèrement penchée vers le côté.Peut-être veut-elle simplement profiter de la neige qu’elle aime ?

L’anglais tourna la tête avec un fin sourire en biais, à moitié amusé, et à moitié sûr de lui.
- Me trompe-je si j’annonce comprendre que vous ne faites pas dans l’errance ?

Plus cette visite avançait, et plus Andrew commençait à se voir dessiner un visage d’Eva. Pas celui qu’elle présentait au monde, mais un visage que lui-même tirait de cette conversation. Déjà lors de leur rencontre, il y avait eu quelques maigres contours, alimentés par Charlotte et sa femme. Une femme de caractère, c’était indéniable, et un simple salut aussi peu ou grandement formel fut-ce, suffisait à l’asseoir. Mais avec ce court temps dans la galerie, il apparaissait à l’ancien sergent de sa Majesté, qu’Eva cultivait les facettes, comme une boule disco aussi anachronique qu’iconique. Autant de facette retournant la lumière envoyée, avec un espace au centre que personne ne soupçonnait. Après tout, qui avait déjà ouvert une boule à facette pour inspecter ce qui la caractérisait ? Personne. Personne, car tout le monde se satisfait des petits miroirs. Aussi, Eva jouissait de pouvoir faire marcher son caractère comme des miroirs, et à n’en pas douter, son charme également.

Andrew aurait admis sans rater un battement de cœur, que l’italienne était une superbe femme, qui prenait le soin de le dire à tous et toutes. Mais comme il l’avait appris au fil des années et des expériences diverses et variées ; toute exhibition attrayante, déclenche invariablement un danger proportionnel. Le danger, aussi subtile qu’il fut-ce pour Andrew, se traduisait par cet élégant néanmoins traître jeu d’esprit que les deux se livraient depuis leur rencontrée du soir. Mais y avait-il réellement danger ? Ou son hyper vigilance, conséquence des mois passés au Malawi, avait-elle raison de lui ? Ce n’aurait pas été la première fois que son syndrome vienne le déphaser avec le présent, avec la réalité.
C’est alors que, se perdant dans ce terrier à lapin, qu’Andrew fut extirpé de son propre esprit par la remarque d’Eva. Le verbe « désincarner » eu l’effet d’un défibrillateur, réalignant son esprit avec la galerie, Londres, la Terre. Rendre les gens anonymes, sans visage. Oh en psychologie il existait mille et une façon d’interpréter cette façon d’exprimer son esprit et sa résonnance à autrui.

Si tenté que pour être artiste il faut être empathique, alors la raison de rendre ses modèles anonyme…
- Hmmm, commença-t-il, se pinçant le menton entre bout du pouce et index. Si elle n’est pas destinée à avoir de réel but, alors son absence de personnalité serait… Pour refléter chacun d’entre nous ? Pouvoir se créer sa propre histoire, ou la voir. Qui n’a jamais eu le simple plaisir d’aller se promener par un jour d’hiver, par simple plaisir de vouloir sentir le froid sur les joues ? Du tac au tac, il reprit, souriant avec malice. Si j’étais mauvaise langue, j’oserais même dire que c’est un argument de vente. Mais Sisley n’était pas vendeur de tapis, plaisanta-t-il.

C’est là, en faisant marcher son côté médical, qu’Andrew se fit demanda pourquoi diable n’y avait-il pas eut de cours d’Histoire de l’art, dans le cursus psy. Les œuvres agiraient comme des témoignages, assurément plus honnêtes et intimes que n’importe quelle confession orale. A nouveau tombé dans les méandres de son esprit, Andrew ne capta le regard d’Eva, que lorsqu’elle le chercha, après ce qui dû être selon lui une longue bsence. Maudissant légèrement ses pensées qui à la moindre occasion l’embarquait sur leur montagnes russes infernales.
Mû par un geste répété, entraîné, et mainte fois appliqué, affûté par le temps, Andrew pivota de l’entier, avec un grand sourire. Ce même sourire qui faisait lever les yeux au ciel Charlotte, qui ne connaissait que trop bien ce réflexe pour rassurer, feintant de ne pas avoir disparu dans sa psyché quand bien même son regard s’était éteint pendant de longues minute ; laissant un corps vagabond suivre le mouvement comme une marionnette attachée à sa main directrice.
Malgré l’absence du conscient, trop occupé à se perdre dans une concentration mentale tournant en rond, le subconscient, quand à lui avait malgré tout su marquer que la visite de galerie arrivait sur la fin, et qu’il fallait qu’Andrew soit venu avec un plan en tête pour la suite.

- Je vous suis, répliqua-t-il, le buste alors légèrement incliné vers l’avant.

Cette fois, c’était lui qui offrait son bras. Le geste se voulait rassurant, presque mécanique. Au fond, il fallait cacher l’absence et la politesse dictait qu’il devait se lancer d’un pas en avant pour gommer cette erreur passée. Un bras tendu, l’autre alla chatouiller sa poche de pantalon, tripoter que la carte de visite de leur prochaine destination était toujours bien présente dans sa poche. Quand bien même il avait sentir le carton lui piquer la cuisse, et qu’il eut retenu l’adresse


Si la mère d’Andrew fut présente, ses yeux revolvers auraient été sans pitié…
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28.06.19 22:53
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Se balader, flâner, errer… Errer. Longtemps ce simple mot ne fit rien d’autre que provoquer un frisson de répulsion. Il y a même de l’effroie quand elle y pense trop. Pourquoi cette allergie ? Il a fallu attendre une remarque à ce sujet. Cinq ans auparavant, ils avaient eu une très longue et houleuse conversation à propos de la mère d’Eva. Une femme malade dont la principale activité, en dehors de la peinture, était l’errance. Quelle vision angoissante, que cette femme en haillon, qui déambulait dans les couloirs de la maison. Leo Castelli architecte de leur demeure avait fait une maison de lumière. Le reflet de sa femme, comme un esprit se voyait sur toutes les immenses baies vitrées. Pour une petite fille c’est une présence quasi cauchemardesque. « Pas d’erreur. Une bonne analyse. » A quinze ans son père a forcé pour qu’elle débute une thérapie. Pour travailler sur la relation mère-fille. Une relation qui n’est ordinairement pas simple. Avec une pathologie en plus c’est un calvaire. « L’errance est pour les âmes en peine. » Pendant un battement de cil la belle crue voir la silhouette fantomatique de sa mère. Pauvre femme… « Et je ne suis pas en peine. »
Dire que le père d’Eva soupçonne cette relation perdue d’être à l’origine de son homosexualité. Un raisonnement, elle le sait à présent, qu’ont beaucoup de parents. A ce jour il tient encore cette théorie qu’il conserve pour les réunions avec ses grandes soeurs. La sexualité ne regarde pourtant personne d’autre que la personne qui la pratique. Pour ce qui est de la descendance la problématique est autre. Mais Eva n’eut aucune scrupule à laisser cette mission à ses dizaines de cousines et cousins. Le nom de Castelli lui survivrait.
« Oh non assurément pas vendeur de tapis. L’universalité dans le reflet de la neige. Voilà qui est joliment trouvé. J’aime beaucoup votre façon de voir les choses. » Andrew, libre penseur, lui fait du bien avec ses théories. « Pas d’erreur. Une bonne analyse. J’aime votre façon de voir les choses. Je crois sincèrement que nous devrions tenter un rendez-vous mensuel. Mensuel c’est raisonnable n’est-ce pas ? Cela m’apporterait beaucoup. Je suis bien trop habituée à mes collègues historiens. De vrais trafiquants de légendes ! » Dit-elle avec une bonne dose d’humour.
Bras dessus, dessous, ils prirent une marche dans Southwark. La Castelli joua au guide pour aller retrouver sa chère Mustang. La carrosserie rouge a l’air d’être flambant neuve. Comme chacune de ses possessions la dame en prend soin. Que dire des voitures qui sont pour elle le plus doux des pécher mignon. Il y en a pour une fortune. Mais c’est une fortune qu’elle a gagné. Une pression sur la commande à distance. Les portières s’ouvrent sans grand effort. L’intérieur en cuire est propre et esthétique.
Tout en chaussant ses verres solaires, l’Italienne décoche un sourire à son grand complice. « Vous allez voir c’est une merveille. » Déclama-t-elle tout en montant à bord du côté conducteur. « Guidez-moi Andrew. » Souffla-t-elle au passager en penchant la tête vers lui. Le sourire devient un bel éclat de rire. Le moteur ronronne alors que la musique est enclenchée sans avertissement. Dans une mécanique très huilée la belle baisse le son, remonte le tissu de la robe pour avoir une vue sur les pédales, entame un quart de tour au volant. « Est-ce que vous aimez les voitures ? » Demanda Eva alors qu’elle baisse la fenêtre pour profiter d’un petit vent frais. L’aisance de ses gestes leur prêtent une sorte de nonchalance. Conduire est une de ses activités plaisir personnel. Un petit secret qu’elle confesse toujours avec de la malice. Il est moins courant d’une voir une femme amatrice de mécanique. « J’en suis collectionneuse. » Lui explique-t-elle alors qu’ils filent, conquérants dans le central district. Dans un élan de jeu, Castelli active le décapotement de la voiture. Le toit se replie sur lui-même. « N’est-ce pas jouissif ? » Lance-t-elle en enclenchant la troisième avec l’assurance d’une coureuse de formule 1.


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01.08.19 0:16
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La remarque sur une analyse fit tiquer Andrew. Peut-être était-ce une utilisation du verbe anodine, ou alors quelque part la belle italienne se senti prise pour une patiente de l’anglais. Les déformations professionnelles, si simples à prendre avec soi, avec plus ou moins d’évidence, n’échappaient pas au psychologue.
Appréciant cette sortie, et tous les enjeux qui s’installaient entre les deux, il était simple de se dire qu’elle apprenait à le connaître comme il le faisait avec elle. Andrew sautait simplement la barrière en l’annonçant, carte sur table. A y repenser, il faisait pareil avec ses patients, lors de leur première entrevue. La différence étant qu’il n’y avait pas de cabinet, et la prochaine livre serait celle qu’il sortirait pour la première tournée.

- Oh je n’oserais pas vous décrire en peine, c’est certain Eva, reprit-il, amusé, avec un demi sourire.

La peine, ce sentiment si humain pourtant, moteur de tant d’avancées, qu’elles fussent personnelles, professionnelles, communes. Cette volonté de ne vouloir aucune rayure sur la carrosserie de son armure, tactique et attitude bien connue lorsqu’il était chez les Grenadiers de feu la Reine. Il ne presserait pas le sujet, pas ce soir, car ce soir était dédié à l’éducation culturelle, et bientôt la fête.

Un compliment, qu’il pris avec un brin de gêne, comme tout un chacun, car ce champ qu’était l’art ne lui appartenait pas, et il s’y sentait encore très profane. Et à nouveau, ce verbe : analyser. Quelque part, il senti que cette utilisation répétitive fit penser à un tique de langage, afin de brosser Andrew dans le sens du poil. Et ainsi vint la proposition.
Toujours prompt avec ses zygomatiques, Andrew les usa de plus bel.
- Me volerait-on mes répliques professionnelles madame Castelli? Plaisanta l’homme, légèrement penché sur la robe noire et sa propriétaire. Cela dit, si toute les sorties sont aussi intéressantes que ce départ ; avec joie qu’une habitude en naisse.

Quelque part, l’aînée d’Andrew devait rire aux éclats, et sa femme avec.

Menant la danse puis relâchant le sens de marche à la blonde, l’air frais extérieur était bienvenu, car malgré les efforts technologiques, aucun ventilateur ne saurait remplacer une brise venant du parc. En voyant la voiture, avant de connaître qui en possédait les clés, Andrew su. Il y avait quelque chose dans cette carrosserie entretenue qui se voulait combative, imposante, et voyante. Comme une dendrobate. L’image lui allait bien. Évidemment, elle portait fièrement ses possessions, Andrew était le même avec ses passions.
- Ah, les voitures… Je suis plus aficionado des motos, répliqua-t-il, avec ce soupçon de provocation, pour cette pseudo rivalité moto contre voitures.

S’installant, à bord, Andrew nota qu’effectivement, cette voiture était comparable à un bijou. Sans s’y attarder, il nota le cuir entretenu – comme le reste – et son aspect neuf. Ayant jeté un œil à la plaque d’immatriculation, Andrew avait noté qu’il ne s’agissait pas d’une location. Andrew eu soudain la pensée, puis l’image, d’Eva choyant sa voiture, avec un grand soin. Ses voitures, se corrigea-t-il, quand la mention de collection apparue. En avait-elle seulement le temps ? Un nouvel embranchement de valeurs et personnalité concernant Eva, apparu quelque part dans les figements du cerveau du psychologue. La notion qu’il faille entretenir toutes ces mécaniques ; quand bien même Eva apparaissait comme une femme pleine de ressources ; les mains noircies ne collaient pas. Qu’importe, il demanderait plus tard, après qu’un verre, ou deux, fut échangé.
Avant que le moteur ne se fasse entendre, et rugissent ses tours, Andrew sorti son téléphone et se faisant, clama l’adresse. Un bar à vin, appelé Willy’s Wine Bar, à l’orée ouest de Whitechapel. Ne rajoutant pas d’autre information, préférant le mystère d’un sourire amusé et joueur.
Le fait de mentionné ce célèbre et sordide quartier, il en était certain, saurait faire chauffer l’intérêt de l’italienne. Mais surtout, l’appel du vin, sans pour autant préciser que le lieu permettait également de danser. Il avait regardé le menu sonore de la soirée et il s’agissait de jazz, l’ère New Orleans.

- Jouissif je ne sais pas, appela-t-il par-dessus le son du moteur. Mais rapide c’est certain !

Le fameux détail aussi gros qu’une maison : Eva était italienne, et la conduite italienne était une singularité propre. Andrew se retrouva à espérer qu’il arriverait entier, dans ce trafique tout sauf italien.
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03.08.19 1:26
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Eva eu elle aussi une pensée pour Charlotte et son épouse. Probablement pas pour les mêmes raisons que le frère. D’ailleurs, il faudrait qu’elles se revoient toutes les deux. Cela fait plusieurs fois qu’elles se moquent. Il y en a toujours une qui a un imprévu. Le fardeau des femmes d’affaires britanniques sans doute. Beaucoup des femmes de l’entourage de la Castelli sont tombées dans ce tourbillon là.
Même maintenant, ce soir, tandis qu’elle discoure sur l’art avec son compagnon; il y a une partie de son esprit qui cherche comment exploiter cette visite. Comment faire une exposition qui sort de cet angle. Ou bien quel collectionneur pourrait être intéressé par les oeuvres cachés d’un obscure expatrié comme ce peintre. « Je ne suis qu’une pâle imitatrice. Comme toute admiratrice… » Rétorque la trafiquante dans un sourire séducteur. Ce cher Paddington n’a pas idée d’être si proche d’une vérité absolue. La carrière de Castelli est plus portée sur le vol que le don. Même si dans son esprit tout est équivalent. Puisque le principal est que l’Art existe. Quelle belle philosophie. Ainsi s’économise-t-elle de tout jugement moral sur sa personne.
« Un motard ! Vous ! » S’insurge l’Italienne humoristique. Elle sourit en coin avec lui. Lui avouait-elle qu’elle possède elle aussi un permis pour ce genre de moyen de locomotion ? Non. Elle préfère participer à ce petit combat idéologique beaucoup plus divertissant. « Andrew auriez-vous une âme de rebelle ? » Sonde donc Eva.
Avec doigtés elle active les cordonnées dans le GPS de la voiture. L’écran tactile est vif. Une voix de femme donne les premières indication d’une voix sensuelle. Eva désactive la commande vocale avec un sourire. Elle jette un coup d’oeil sur le plan général qui s’affiche. Londres n’a plus beaucoup de secret pour elle. « Je vois que vous avez écouté mes goûts. » Dit-elle en lisant la brève description du bar. Elle actionne le levier de vitesse. Le pied appuie sur la pédale avec assurance. La Mustang quitte la place et se faufile dans le trafic urbain. Eva a la conduite de quelqu’un de rôdé. Elle ne se sert pratiquement pas de l’assistance du GPS. Il ne lui sert que pour anticiper les bouchons qu’elle exècre. « Vous n’aimez pas la vitesse ? » Le véhicule zigzague pour contourner un bus de ville. Ils flirtent avec le code de la route. Ils sont sur la ligne jaune. Ce dont la blonde ne se permet qu’avec les gens à qui elle octroie un degré de confiance. Ainsi est-elle faite. Elle connaît et plie la loi et les règles selon sa vision du monde. Cela ne l’a jamais dérangé. Jugeant, qu’elle participe suffisamment à cette société. Le district east n’est pas celui où elle va le plus. Mais elle le connaît de nom, de réputations et d’horreurs.
« Ce tueur qui imite L'Eventreur. C’est horrible. » Ils sont à un feu. Le moteur gronde paisiblement. Castelli a tourné son regard sur son complice. La gravité du sujet durcie un peu son visage. Elle manie le levier. « Vous vous y connaissez en tueur en série ? » Simple curiosité intellectuelle. Ils ont chacun leurs compétences propres. Ils peuvent tout aussi bien débattre sur un tableau que sur un esprit malade. D’autant qu’Eva se sent ébranlées par ces horreurs. Elle est émue par le sort de ces femmes. De plus, elle connait un peu l’univers de la prostitution. Elle sait que la majorité de ses filles n’ont pas eu le choix. Elle sait que leur vie est déjà un enfer en soi. Alors en plus mourir éventrées… quelle horreur vraiment.
La voiture reprend la route. Ils entrent déjà dans le quartier. L’atmosphère se métamorphose. L’Italienne le sent presque sur sa peau. Elle en a une petite chaire de poule. Mais, elle ne dit rien. Ce n’est pas elle qui reculera devant une appréhension pardi.
« Nous y voilà. » Une place semble les avoir attendu. Le créneau est parfait. La paire de lunettes est rangée dans la boîte à gants. Eva inspira le fond de l'air avec un sourire léger. Curieuse, elle ouvrit la portière pour descendre de voiture. Prête à savourer un bon cru en compagnie de cet intriguant aventurier.


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06.08.19 16:40
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Un rebelle, voilà une notion qui pouvait lancer un débat interne somme toute vif et profond, entre les oreilles d’Andrew. En finalité s’il eut fait se monologue, après de longues potentielles minutes voir une heure d’introspection, Andrew arriverait à la conclusion qu’il n’a rien d’un rebelle. C’était plus une addiction à l’adrénaline, au danger. Et ce fut sa réponse.

- Je crains être trop sage pour réellement me rebeller, rétorqua-t-il non sans un visage malicieux accompagnant ses paroles. Je crois que j’aime la liberté, et puisqu’elle se marie souvent au danger, je l’embrasse volontiers.
Il ponctua d’un bref clin d’œil sa phrase. Cette image de rebelle au blouson de cuir avec des élans impulsifs et bagarreur, tatoué comme une mosaïque, était un cliché dur à enterrer, même à cette époque. Alors certes il possédait un perfecto, et chaque été il repartait avec d’anciens camarades de service, faire un tour, dernièrement c’était York.
Avec le comportement qu’ont les enfants sages attendant le bus, Andrew observa les doigts d’Eva travailler sur l’écran tactile tout en parlant, et à sa remarque, lança un regard lourd de sous-entendu. Évidemment qu’il avait écouté les désidératas de madame. Il se garda de préciser qu’il avait eu l’aide d’une agent de Scotland Yard. Par le plus grand des hasards elle avait mentionné ce bar. Et comme toute oreille traînante qui se respecte, Andrew pris cette aubaine au vol, avant de se renseigner et de choisir ce bar. Le moteur crachant un peu plus ce qu’il possédait dans son intérieur, le docteur se cala au fond de son siège.

- La vitesse n’est pas nécessairement mon fort, concéda-t-il, sans pour être inquiet de celle dont faisait preuve la conductrice.

Dans le pire des cas c’était en les britanniques alentours qu’Andrew n’accordait pas une grande foi.

- Cela dit j’aime pousser mon moteur le long des routes océaniques, rajouta-t-il, afin de rassurer Eva, que sa conduite ne le mettait pas dans un état de malaise.

Il remarqua d’ailleurs cette proximité avec le délit, une proximité toute maîtrisée, qu’il salua mentalement. Une nouvelle preuve de contrôle sur son environnement, Eva ne cessait d’exposer son talent naturel à naviguer dans tout l’espace concédé, quitte à frôler les bords du bout de la nageoire. Comme un animal sachant se tenir danas son enclos, mais dont l’inattention lui permettrait de s’échapper sans effort.
L’allure ralentie comme elle fut venue, à l’entrée de Whitechapel. Comme un prédateur qui se sent rentrer dans un territoire hostile, et qui diminue son pas, à l’affût, méfiant, le moteur de la mustang ronronnait désormais devant le feu rouge. Cette image fit naître un petit sourire à Andrew.
Sourire très vite ravalé, à la mention du tueur sévissant, comme son mentor, il y a plus de deux siècles. Il ne put que hocher la tête, car au sein de N.S.Y, cet individu – qui d’ailleurs selon Andrew était une pâle copie sur éduquée sur le sujet – faisait parler de lui au détour des corridors. La question d’Eva le fit pondérer une seconde, plongeant son regard dans selon de l’italienne. Machinalement il mâcha sa langue, et inspira fort.

- M’y connaître non. C’est un sujet d’étude d’une vie que ces individus. J’en ai étudié peut-être, par curiosité de l’esprit, et afin de m’y préparer, si tenté que New Scotland Yard me demande un avis sur la chose. Je suppose que ces personnes ont déjà franchi les limites de mes compétences. Notez que je ne suis pas de près ou loin affecté à l’enquête, sourit-il.

Tout en s’exprimant, Andrew réprima un petit frisson qui sautait de vertèbre en vertèbre le long de son dos. Malgré l’horreur de ces meurtres, il ne fallait surtout tomber dans le piège d’alarmer les gens. Fut-ce en qualité de psychologue, ou auxiliaire de la police. Un devoir de commissariat en quelque sorte, sans parler du maintien du secret professionnel qui incombait à chacun travaillant avec les forces de l’ordre.

- Il vous inquiète, vous ? demanda-t-il, lançant un petit néanmoins efficace processus de remonte moral.

Extérioriser ses peurs, ses angoisses, et mettre un visage sur son imaginaire si fécond avaient vite fait de calmer les nerfs. Et tout en approchant de leur arrivée, l’ancien sous-officier nota que les rues étaient plus vides qu’auparavant, avant l’arrivée de cette immonde personnage. Le soleil, bas, lui rappela un proverbe martial : « La nuit n’est l’amie de personne ».

Une fois le moteur éteint, la ceinture sauta, et comme un danseur virevoltant sur lui-même, Andrew posa son pied droit dehors, s’extirpa de la voiture, pour d’un mouvement, refermer la porte et passer au-devant du moteur rejoindre Eva. Déjà un pied dehors et sur le point de se retrouver droite, il posa néanmoins la main sur la portière pour l’accompagner à la fermer derrière elle. Les vieilles manies et politesses dont il ne se lassait jamais.

- Je pense pouvoir dire sans crainte que je ne vous décevrai pas, enquilla-t-il en fermant la portière.


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Andrew aimait particulièrement cet instant, alors qu’il pénétrait dans cette enceinte où de la musique sud-américaine, sûrement un tango vivace, résonnait au fond de salle. Ce petit instant où il prenait la mesure et la température d’un endroit. Discrètement, le psy décolla son bras gauche de son corps, pour le tendre à Eva poliment, alors que ses yeux étaient ailleurs, en partant du comptoir, à la recherche de personnes debout, se mouvant avec but.

Il en profita pour se décrire la salle, intérieurement. Une lueur
Un jeune homme à la barbe savamment taillée rase fut harponné par le regard du psy. Le contact fait, et s’assurant qu’Eva était à côté de lui, il leva deux doigts, mimant « deux » avec la bouche. Un autre geste simple signifia qu’ils venaient manger et boire, ce à quoi un hochement de tête succéda à la seconde de réflexion dont savent faire preuve les serveur°ses de talent. D’un mouvement fluide, l’anglais emboîta le pas, la tête tournée vers sa voisine.

- Une table va nous attendre, sourit-il, invitant à suivre.

Derrière le sourire, une certaine fierté. Il était déjà arrivé qu’on ne le comprenne pas dans son langage non-verbal des bars et restaurants. À chaque fois un mauvais signe selon Andrew. Après tout, serveur°se n’était pas à la portée de tous°tes ! Et au plus grand bonheur de docteur, le serveur les menait vers une table non loin de la piste. Il se souviendrait de donner un bon pourboire à ce type. Tirant une chaise à soi, et y prenant place, Andrew rajusta sa veste d’un micro coup de main, avant de laisser Eva avec la carte des vins.

- Je vous laisse le délicat choix du premier vin, je me charge des premiers tapas, annonça-t-il, presque menaçant.

Il était temps que la vapeur s’inverse, et qu’il mette un peu l’italienne en danger, qu’elle soit prise par un contrepied. Après tout, on ne badine pas avec le bon vin !
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07.09.19 14:55
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Pour la beauté du geste
Eva & Andrew

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Andrew obtient une nouvelle approbation tacite de sa guide de soirée. La liberté, la seule, vient de la probation à construire une vie en dehors des contraintes inhérentes à l’existence. Le danger n’est donc jamais loin. Il provoque, il alimente les émotions qui font vibrer le corps et l’âme. « “Faire la nique à la mort.” » Lança l’Italienne avec une franche provocation, appelant à eux une célèbre réplique de film. Le danger enlace Eva depuis sa plus tendre enfance. Le danger de découvrir sa mère morte un beau matin. Puis plus tard le danger de mourir du VIH. Le cancer ensuite avait essayé d’avoir sa peau et ses os. Il lui suffit de fermer les yeux pour sentir le mal tapis dans l’ombre de sa chair. Enfin bien sûre le danger perpétuel de se faire prendre et de finir dans une prison pour femme jusqu’à la fin. Si bien que le danger est sans doute le seul amant fidèle de ses nuits. « Quelle est la chose la plus dangereuse que vous ayez faites ? » La question aussi malicieuse qu’elle est complice cherche à tisser un lien.
« Oh oui. Les longues routes... » Eva visualise tout de suite l’Italie. Le petit jour, le ciel rouge, l’iode, les routes qui sont à perte de vue livrée à son ivresse. Elle se jure à elle-même d’y aller l’été suivant. Et d’écrire une carte à ce fin psychologue à l’occasion.
Le souvenir d’une Bête Humaine qui rôde dans les rues de Londres altère la bonne humeur. Quoique Castelli ne soit pas une femme qui se voile la face. Au contrair c’est une nécessité que de savoir ce qui se passe dans les entrailles de la cité. C’est là où est implanté la clientèle particulière. L’ignorance met en danger. Elle écoute donc le bon docteur fait preuve de modestie. « Un peu. » Juste avant de redémarrer elle lui confie sans sourciller. « Et je sais ce que c’est d’avoir peur d’une ombre. » Parler de sa brève expérience dans la prostitution estudiantine n’apporte rien. Eva l’a fait sans être enchaînée par une urgence économique. Elle a voulu connaître ce métier et le pratiquer. Une liberté qui lui a permit d’être exigeante. Elle ne prenait que, des femmes, mûres, éduquées, ou non. Une courte expérience dont elle a retiré autant de plaisirs que de connaissances sur l’esprit humain.
Mais pas assez, pour que quelques années plus tard, elle repère un esprit malade. « A mes débuts. Je suis tombée sur un artiste fou. Un prodigieux sculpteur méconnu du grand public. J’étais fascinée. Je voulais à tout prix l’exposer. » Il est rare à présent qu’elle repense à Salomon Velasquez. Personne ne connaît cette histoire de son passé. Pas même Noa. « Il m’a harcelé pendant plusieurs mois. Jusqu’à ce qu’à une perquisition on découvre qu’il séquestrait des femmes pour… les manger. Il est mort en prison, il y a une vingtaine d’années. » Pour autant, elle continue d’avoir une boule au ventre quand elle croise son nom dans un document. Elle sourit comme pour lui dire que ce sujet est clôt. Ils ont mieux à faire que de parler de ses traumatismes de jeune fille. Il y aurait probablement de quoi faire toute une étude.
Après avoir scrutée la rue d’en face et avoir apprécié l’enseigne, elle traversa. Castelli aime faire la découverte d’endroits. C’est un peu comme appréhender une nouvelle toile. Voir les couleurs qui sautent aux yeux. Les interpréter. Les cinq sens envoient leur message propre. Elle entend le rythme cubain derrière la porte encore fermée. Elle devine la chaleur du lieu à la buée sur la vitre. « Vous avez raison. » Une fois entrés, l’Italienne se laisse charmer. Elle inspire l’odeur des plats et celle des boissons du sud, le parfum des corps chauffé par l’effort de la danse. Il y a un peu de l’Amérique du sud ici. Ses yeux embrassent lentement la décoration intérieure. Elle glisse naturellement son bras à celui de son cavalier. Ravie de voir qu’il en est l’initiateur cette fois. « Vous avez tout prévu! » Le taquine-t-elle ravie et séduite par le soin qu’il a mit à préparer leur soirée. Elle continue d’observer le bar en le suivant. Elle croise le regard de plusieurs tables et adresse des sourires. La salle est bien remplie déjà. La piste est occupée. Eva note, avec plaisir, qu’ils n’en sont pas loin. Voilà qui est parfait. Le sourire s’agrandit un peu quand elle voit le savoir-faire d’un couple qui passe. Elle tire distraitement sa propre chaise tout en continuant de les regarder pendant un instant. Ils sont beaux, irradiés, par leur joie de danser. Enfin, elle se détache d’eux pour regarder son compagnon de tablée. « Hum! C’est un défi ! » Dit-elle en attrapant la carte des vins. Elle l’ouvre et apprécie d’abord le graphisme et la hiérarchisation des informations. Cela donne toujours un critère qualitatif sur l’établissement. Elle croise ramène ses jambes en arrière et croise ses chevilles.
Très vite, vin pétillants, rosé, parfumés, sont dénigrés par son palais. Elle hésite avec un vin d'apéritif. Mais ils sont généralement trop sucré. Ils gâtent le goût. Elle penche donc vers la sélection de rouge. Le Mendoza retient finalement son attention. Elle se souvient d’un séjour en Argentine. Un crue de 2022, Malbec Trapiche. Tout au plus moyennement corsé, aux arômes et aux saveurs de petits fruits noirs -mûres ou cerises noires- Il lui avait semblé très rond en bouche, simple et facile. Parfait pour ouvrir leur bal.
Amusée Castelli referme la carte et la repousse. Malicieuse elle demande: « Vous cuisinez ? »Il a l'air d'avoir la patience et le raffinement pour. Lorsque le serveur approche elle débute en Anglais. Se reprend en Espagnol après avoir remarqué l’accent. La langue cousine de la sienne chante dans sa bouche. Une fois seule avec Andrew la marchande l’espionne du coin de l’œil. « Qui vous a appris à danser ? » Interroge-t-elle un peu plus espiègle. La souplesse des mouvements ne trompe pas une connaisseuse.


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08.09.19 19:35
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