Léandre était en colère, dans une colère noire qui lui rongeait les os et qui remontait dans sa gorge. Tyler avait le gout de la bille dans la gorge. Mais derrière ses lunettes noires, son regard sévère restait dissimulait. Aussi puissant qu’il pouvant l’être, le juge ne pouvait qu’attendre ce procès. L’homme qu’il haïssait avait un nom : Lorca. Un diable qui avait tué son père et arraché la vue. Un être humain qu’il haïssait au tant qu’il le craignait. Léandre éprouvait une peur primaire dévorante devant cet homme. Ce procès n’avait même pas commencé qu’il faisait tomber les digues mentales du magistrat. Ses émotions remontaient sans qu’il les maitrise. Il avait une soif de vengeance terrible et des blessures encore béantes. Mais l’aveugle savait qu’il ne pouvait pas avancer d’autre pion, il lui fallait attendre.

Furieux, Léandre rentra fin chez lui. Cette fin de semaine avait été exécrable, mais ce dernier rendez-vous de préparation du procès avait fini d’achever l’humeur du juge. Le week-end était là, quoi que Léandre fût tellement sur les nerfs qu’il hésitait clairement à aller travailler ce dimanche. Ce n’était pas le premier juge à venir bosser un dimanche, ni le dernier. Léandre s’était pourtant fixé cette limite, déjà bien conscient de ses travers. Mais ce procès rabattait toutes ses cartes. Conscient qu’il n’était pas en état de prendre une décision, Tyler se décida plutôt de trouver le moyen de refaire retomber sa nervosité. Il était seul et avait un peu de temps devant lui. Léandre pouvait se lâcher.

Tyler avait pris le temps de crier dans un oreiller pour exprimer sa colère. Puis, il l’avait laissé la musique rugir pour lui, Léandre profitait plutôt du moment pour aller se laver. L’eau lui donnait l’impression de pouvoir faire partir les mauvais sentiments. C’était faux, comme si un geste aussi simple pouvait avoir au tant de force. Mais cela jouait et lui permettait de se détendre. La colère contre le monde se muselait peu à peu, retrouvant sa place tout au fonds de lui-même. Il espérait que ce procès pourrait enfin nourrir ce monstre, mais aussi aider à repousser la mélancolie qui s’était attachée à ses os. Léandre avait besoin de passer autre chose, mais il était incapable d’aller de l’avant. Tyler voulait que ce procès lui permette enfin de laisser ses blessures se refermer. Le juge n’arrivait pas à être réellement en paix avec son passé, mais surtout avec lui-même.

Habituellement rapide sous la douche, Léandre se laissa aller. L’eau brûlante lui rougissait la peau, mais l’aveugle n’en avait que faire. Le miroir de la salle de bain était devenu opaque via la buée. Le magistrat avait retrouvé son calme habituel, sa tempête intérieure s’étant en grande partie apaisée. Il savait qu’il allait passer une bonne soirée et Léandre n’avait pas envie de se prendre la tête. Finalement, le juge se changea de nouveau, s’offrant des vêtements propres. Cette nouvelle peau était agréable. Léandre n’avait peut-être plus ses yeux, mais il faisait particulièrement attention à son image. Il se voulait être séduisant, désirable. Il avait besoin qu’on le considère de cette manière.

Léandre termina par filer dans la pièce de vie. Le magistrat avait pris la décision de déménagé. Après procès, une fois qu’il aurait reprise de l’énergie pour gérer ce projet énergivore. Il avait enfin de l’argent et comptait bien l’utiliser. Le juge ouvrit la porte, la belle était là. Calme, le magistrat la salua « Bonsoir Jessica, entre. » Naturellement, il lui prit son manteau pour le ranger dans la penderie de l’entrer. Cela fait, Léandre retourna dans le dos de l’avocate. Il avait terriblement envie de l’embrasser. Mais il hésitait à rompre tout de suite la tension… Que fallait-il faire ? Le juge décida donc de lui laisser le choix. Il se rendait bien compte qu’il était bien plus en tension qu’il ne le pensait. Léandre prit la main de la rousse, et ramena ses doigts jusqu’à sa propre bouche. Il demanda « Tu vas bien ? ». Il eut un sourire, il était content de la voir.

Le contact de Jessica était agréable. En peu de temps, elle avait tout de suite senti qu’il était encore stressé. Léandre avait du mal à décrocher. Le procès Lorca débuterait dans moins d’une dizaine de jours. Cette idée en tête, il en devenait difficile de s’en défaire. Pourtant, au contact de Jessica, le magistrat eut envie de se laisser aller. C’était bien pour cette raison qu’il l’avait invité. Les caresses de l’avocate faisaient mouche. Léandre n’était clairement pas insensible.

Tyler passa une main dans le dos de son invitée, puis vient lui réclamer ses lèvres. C’était un baiser tranquille, presque timide. Si Léandre la désirait, il n’était pas pressé, ils avaient tout leur temps. Il profita ensuite de l’instant pour humer l’avocate. Il aimait l’odeur de son parfum, de sa peau. Il l’aimait tout simplement. Léandre en avait conscience, lui-même ne sachant plus réellement quoi faire, si ce n’est de les faire taire. Jessica ne voulait pas en entendre parler… Et Léandre voulait juste qu’elle fasse partie de sa vie. Il acceptait la situation comme elle l’était.

Ses doigts glissèrent le long du tissu, analysant rapidement comment était habillé Jessica. Léandre avait beau être aveugle, il savait que l’image avait son importante. Au plus près d’elle, il se demanda comment elle était maquillée. Jessica Keenan était une femme qui provoquait les pires ragots et il y avait des choses qui échappaient au juge. Cela faisait trop longtemps qu’il était aveugle. Léandre avait oublié. Tout proche, il se recula légèrement, Tyler commenta à voix haute « J’aurai aimé avoir mes yeux juste pour te voir… juste une fois. » Pour comprendre, pour se rendre compte si son image mentale correspondait à la réalité, pour retrouver une certaine beauté des formes et la force des couleurs. Mais Léandre ne pourrait jamais retrouver la vue.

Tyler défit lentement l’étreinte et annonça « Allons-nous asseoir. ». Calme, tranquille, mais surtout amoureux, Léandre était en train de retrouver sa sérénité. Il appréciait aussi Jessica car certaines choses étaient simples. Le quotidien l’était. Léandre était habitué à ne travailler et vivre plus globalement qu’avec des valides. Pour certain, le handicape du juge était un problème, d’autre un sujet de questionnement, ou encore sujet de nombreuse maladresse. Mais avec Jessica, c’était juste normal. Son handicape n’était tout simplement pas un sujet et cela lui faisait beaucoup de bien.

Léandre se rendit dans la cuisine, puis attrapa une bouteille de vin déjà ouverte. Il avait laissé l’alcool décanté. L’anniversaire du juge étant passé, un de ses proches lui avait offert une belle bouteille de bordeaux. Le vin rouge était de bonne qualité. Léandre avait eu envie de partager cette bouteille avec Jessica, surtout qu’il savait qu’elle avait de la culture dans ce domaine. Il n’y avait rien de plus frustrant de partager un bon alcool avec quelqu’un qui ne savait pas l’apprécier. Les verres ballons remplis, Léandre en tendit un à l’avocate. « Ça devrait te plaire. ». Enfin, il l’espérait. Certaines femmes avaient tendances à préférer les vins blancs liquoreux. Ne détectant pas le sucre, Léandre ne les appréciait pas.

Tyler se posa sur le canapé, la jambe contre celle de la rousse. Il avait besoin de la sentir présente. Pendant un bref instant, il pensa à l’audition de Jessica. Il aurait voulu l’interroger, lui poser des questions de comment elle avait ressenti les choses. Mais Keenan lui avait explicitement demandé à ne pas parler travail. La musique basse, l’atmosphère était agréable. Dans une autre vie, Tyler aurait probablement choisi de d’aller en boite de nuit, de se souler et se perdre dans l’obscurité. Mais ce n’était pas envisageable… Bien que parfois, Léandre avait envie de se retrouver cet univers, de danser surtout. Depuis l’accident, c’était quelque chose qu’il ne faisait plus. Il avait laissé cette activité de côté, il l’avait abandonné, ne se sentant plus apte.

« Avec plaisir. » Léandre n’avait pas encore un réseau de relation de la même taille que celui de Jessica. Au-delà même de la dégustation, cela lui permettrait de tisser de nouveaux liens, d’augmenter son influence. Tyler était en train de faire un travail de longue haleine, mais un empire ne se construisait pas en un jour. Il avait son objectif et le temps qu’il mettrait pour y arriver n’avait pas d’importance. Il réussirait, quoi qu’il en coûte.

Léandre écoutait le conseil de la Rousse, mais s’il avait envisagé cette possibilité, il s’était bien rendu compte que c’était un cul de sac pour lui. Tyler n’avait pas les relations ni l’argent pour assurer un tel projet. Le juge avait fini de rembourser ses dettes et il avait bien conscience qu’il avait pu s’en sortir grâce à l’aide publique. Ses dépenses de santé étaient importantes, dans un pays comme les Etats-Unis, cela serait pire encore. Léandre répondit « Ce n’est pas réaliste ». Pas en état. Puis le juge avait assez travaillé pour avoir sa place, il ne voulait pas repasser par cette longue période d’apprentissage. Il ne voulait plus se retrouver à la place de l’apprenant.

Léandre laissa sa main se faire manipuler par Jessica, appréciant le contact. Tyler restait un peu vieux jeu sur ce point. Il aimait lorsqu’ils pouvaient prendre leur temps, lorsqu’ils discutaient aussi. Il fallait que le juge demande si l’avocate avait bien reçue la clef USB, mais il sentait bien que ce n’était pas le moment. Pas lorsqu’il sentait la peau chaude de la Rousse entre ses doigts.

Devant la dernière réflexion de Jessica, Léandre reteint du bout des lèvres une pique bien sentie. S’il voulait conclure maintenant, ce n’était pas la peine de vexer l’avocate. Pour la peine, il eut un sourire et passa à autre chose. « Hum, je vais plutôt respecter ce que signifiait cette avant-première… » Léandre s’approcha, l’embrassant, glissant ses doigts le long du corps de l’avocate. Si Tyler était plus tranquille, il y avait encore beaucoup de colère, de mauvais sentiments qu’il lui fallait évacuer. Toujours dans le respect de sa partenaire, mais sans retenue particulière, Léandre laissa parler ses pulsions. Il fit tout ce dont il avait envie… mais aussi de quoi satisfaire Jessica. Tyler avait bien conscience qu’il n’y avait que lui qui avait des sentiments. S’il ne pouvait pas garder Jessica grâce à ça, il le ferait autrement. Le sexe pouvait lui apporter cette solution.

Léandre était allongé dans le lit, mais la belle se leva. Il entendit son pas fin de se déplacer jusqu’à la cuisine. Ils n’avaient pas mangé, mais ce n’était de cette faim qu’il était nécessaire de rassasier. Tyler se leva, nu lui aussi, ses lunettes posées quelque part. Jessica s’était de nouveau posé dans le canapé et avait probablement récupéré son verre. Léandre s’approcha d’elle, glissa ses doigts sur les cuisses de celle-ci puis remonta jusqu’à sa poitrine. Le juge se baissa vers elle, puis lui embrassa le cou, avant de doucement demander « Satisfaite ? » Cela l’amusait. Ils avaient une bonne alchimie sexuelle et Léandre sentait bien que Jessica y prenait plaisir.

Tyler demanda « As-tu faim ? ». De quoi exactement ? La question restait complète. Et si Jessica devait probablement respecter un régime strict au niveau alimentaire, ce n’était pas le cas du reste. Bien plus calme et tranquille, Léandre se posa en face de l’avocate, il glissa prudemment sa main sur la table basse pour retrouver son verre. Il n’avait pas besoin de bien plus. Tyler était au moins un homme économe sur ce point, il pouvait se soulait avec très peu d’alcool. Dans ce moment bien plus tranquille, il demanda « As-tu reçu la clef usb ? ». Léandre connaissait la réponse à cette question, mais il voulait savoir ce qu’en avait fait l’avocate. Tyler ne laisserait absolument plus personne le menaçait ou lui faire du mal… même si ce n’était pas lui la personne visée. La question méritait d’être posée, sans compter que l’avocate pourrait filer sans qu’il ne soit réveillé. C’était déjà arrivé.

Un péché ? Léandre n’était pas croyant. Il n’avait que faire d’un Dieu qui lui avait fait tant de mal. S’il existait, alors l’humanité avait besoin de s’en débarrasser. Pour ce qui était de la considération moral, Tyler n’éprouvait aucun regret. Ce n’était pas moral de bloquer un ascenseur et de vouloir le faire s’écraser alors qu’il y avait deux personnes à l’intérieur. Léandre ne laisserait plus personne lui faire du mal, ni à lui, ni aux siens. La question devenait personnel. Dans ce cas, le juge n’avait plus aucune pitié. Léandre savait qu’il fallait choisir entre la victime et le bourreau, il préférait le second rôle.

La réaction de Jessica était logique, mais Léandre lui répondit franchement « Je ne l’ai pas fait dans cette optique. » Tyler l’avait avant tout fait pour lui-même. Mais si la Rousse voulait le récompenser, il n’était pas contre. Léandre n’attendait tout simplement rien. Pourtant la provocation de Jessica était loin de le laisser indifférent. « hum… pourquoi pas ? ». Tyler ne dirait jamais non à une telle proposition de l’avocate.

Le téléphone de Jessica se mit à sonner, prenant toute l’intention de son interlocutrice. Léandre l’entendit bouger et ne fit pas de commentaire. Tyler était toujours à son premier verre de vin. Il n’avait pas besoin de plus pour sentir le côté légèrement enivrant de l’alcool. Tranquille, il avait la tête tournée vers Jessica, le regard naturellement posé sur elle. Malgré sa cécité, les pupilles du juge la suivaient dans le logement. Il la laissa faire.

Au moment où elle posa ses pieds sur les cuisses du juge, Léandre glissa les doigts sur les chevilles de Jess. Il laissa ses doigts glisser sur la peau de celle-ci, pourtant son geste s’arrêta brusquement à la demande de l’avocate. Léandre eut un petit moment de silence. Jessica venait d’appuyer sur une blessure qu’il voulait faire taire. Spontanément, Léandre avait légèrement tourné la tête sur le côté, élément du langage corporel pour dire non. Bien plus relâché dans ce tête-à-tête, c’était le genre de réaction que Léandre arrivait habituellement à dissimuler. Dans ce moment d’intimité, ce n’était pas le cas. Conscient que Jessica était loin d’être idiote, Tyler termina par finalement dire « C’est que… je ne sais plus faire. ».

Léandre avait oublié. Cela faisait parti de ce qu’il avait perdu lors de l’accident, des choses qu’il n’avait plus fait à cause de la peur de regard de l’autre… mais aussi parce que Tyler avait mis du temps à se réapproprié son corps. Lors de sa longue hospitalisation, son corps avait été celui du corps médical, mais pas le sien. Des séquelles en étaient resté, cela en faisait partie. Léandre avait beaucoup de mal avec tout ça. Mais s’il éprouvait une certaine crainte, voir même un peu d’angoisse, il était prêt à avancer avec Jessica. Il avait envie de danser avec elle, il percevait aussi le ridicule de la situation. Léandre n’était pourtant qu’humain, avec ses contradictions.

Léandre eut peur que Jessica se moque ou ait une autre réaction similaire. Pourtant, ce ne fut pas le cas. Elle l’interrogeait, ironisait sur la situation, mais les mots n’allaient pas plus loin. Les paroles de l’avocate pouvaient être d’une violence terrible et Léandre avait conscience qu’il était dans un état de faiblesse. Dans ce moment d’intimité, Tyler s’était défait en partie de son armure. Est-ce que c’était une bonne chose ? Léandre n’avait de réponse pour le moment. C’était un fait et il n’était pas en état de plus réfléchir.

Beaucoup de choses pouvaient de nouveau s’appendre, mais certaines restaient définitivement inaccessible. Léandre avait perdu beaucoup de ses loisirs, ainsi que l’ensemble de ses liens, en partie sur internet. Il s’était désormais éloigné de cette culture, mais dans une autre vie, il aurait peut-être été un joueur pro’ sur un jeu compétitif en ligne. C’était un de ses secrets. Une anecdote qui pouvait faire sourire.

Devant l’ordre de l’avocate, Léandre répondit « Jessica… » Tyler savait très bien qu’il n’avait pas de réels arguments. C’était une peur simple et idiote, pourtant c’était quelque chose qui s’était encré en lui. Léandre eut un moment de doute, puis se leva doucement, peu confiant. Si cela avait été quelqu’un d’autre, probablement qu’il ne serait pas laissé aller. Mais l’avocate n’était pas hostile envers lui, elle connaissait assez de secret qu’elle n’avait pas utilisée.

Mal à l’aise, raide dans ses mouvements, Léandre se laissa pourtant peu à peu aller. Les sens saturés, le jeune juge profitait juste de l’instant. Son corps contre celui de Jessica, la musique, le rythme… Il avait l’impression de renouer avec une vielle amie qu’était la danse. Léandre était complétement dans l’instant, oubliant tout ce qu’il pouvait avoir autour. Le reste du monde n’existait plus, il n’y avait ce le moment présent. Tyler était heureux. C’était une bulle de bonheur pour lui.

Léandre était incapable de dire combien de temps était passé lorsqu’il y eut des coups à la porte. Tyler arrêta Jessica « Attends. » Au mot police, le juge laissa échapper un gros mot. Ils avaient abusé. Léandre fut contraint de laisser ce moment et se détacha de Jessica. Il baissa la musique au strict minimum, puis répondit « J’arrive ». Rapide, il attrapa de quoi s’habiller et se rendit jusqu’à la porte. C’était un simple t-shirt et un jogging, il n’avait pas le temps pour tout ce qui était costume. La question était juste d’être présentable. Léandre avait beau être aveugle, il en avait parfaitement conscience.

Léandre ouvrit la porte et écouta attentivement les remontrances de la police secours. Tyler savait très bien qu’il avait une tête de gamin, qu’il était décoiffé et qu’il était face à deux flics qui ne le connaissaient pas. Un fou rire était en train de naitre au creux de ses entrailles. S’il se retrouvait avec une plainte pour tapage nocturne, ça pourrait poser un problème. Léandre conservait donc une expression sérieuse. Il avait bientôt trente ans et se retrouvait dans cette situation… Tyler n’avait pas ses lunettes et les deux flics ne se rendirent pas compte qu’il ne voyait pas. Du moins, cela ne posa pas problème pendant le bref échange.

Après avoir promis qu’il ne ferait plus de bruit. Léandre ferma la porte. Il resta quelques instants dos à celle-ci et fit signe à l’avocate de rester silencieuse. Tyler attendait que les agents de police soient partis. Une fois certain que c’était bien le cas, le juge posa une main sur son visage puis laissa apparaître un grand sourire. Que la situation était drôle ! Léandre ne pouvait réagir autrement. Ils n’étaient vraiment que deux sales gosses.

Léandre s’approcha de Jessica, posa une main sur les hanches de celle-ci puis vint lui réclamer un baiser. « Allons ailleurs… ou tu veux. » Chez elle, ou n’importe où. Tyler n’avait pas envie de se réprimer. Il savait bien qu’ils faisaient du bruit, surtout lors de leur relation. L’appartement du juge n’était pas assez insonorisé pour. « Je vais bientôt déménager, ça ne sera bientôt plus un problème. ». Léandre allait devoir se changer, il avait pris des vêtements de conforts qui tranchaient complétement avec son style habituel. Toujours souriant et amusé par la situation cocasse, Léandre commenta « Peut-être que j’aurai finalement besoin d’une avocate… je pourrai payer en nature ? » Le corps complétement contre celui de la rousse, Léandre avait commencer à caresser la poitrine de l’avocate tout en parlant. L’humour ne volait pas très haut, mais ce n’était pas l’objectif. Il était tard, ils étaient alcoolisés, il ne fallait pas en attendre plus. Léandre commença enfin à rire « Imagine, tout de même cette situation. » Peut-être que Tyler n’avait pas eu de problème auparavant car ses voisins savaient qu’il était juge « Mélanie et Chloé se régaleraient. ». Si c’était amener à se savoir, les deux femmes seraient sur le coup. Mélanie était capable de beaucoup d’ingéniosité pour apprendre des choses à ce sujet. Léandre avait presque été eu.

Profitant de la réponse de Jessica, Léandre vient lui embrasser la gorge. Ils ne s’étaient quittés que quelques instants, mais assez pour que le désir reprendre ce peau-à-peau se fasse ressentir. Dans les bras de la Belle, Léandre se sentait heureux. Il était comblé. Le moment était léger et c’était tout ce qu’il demandait. Tyler était réellement détendu, confiant envers sa partenaire et totalement dans le moment présent. Le reste du monde n’existait plus.

Léandre était satisfait qu’ils aillent chez l’avocate. Il aimait dormir chez elle, passer du temps dans son logement. Tyler n’avait encore rien trouvé de particulièrement intéressant, mais entrer dans le domaine intime de la rousse lui plaisait. Il répondit, franc « Ce n’est pas encore tout à fait décidé. ». Enfin, Léandre avait fait son choix mais il attendait des réponses administratives. Dans tous les cas, cela allait être dans une résidence sécurisée avec un gardien. Un lieu qui ne pourrait pas être facilement visité. C’était une condition qui allait l’aider à mieux dormir.

Donner tant de pouvoir à l’avocate n’était pas forcément une bonne idée. Léandre s’en amusa « Je me réserve un droit de véto. ». Même si le juge savait très bien que tout était dit sous le trait de l’humour, il n’était pas certain d’où cela pouvait le mener. Jessica Keenan avait une imagination sans limite pour ce domaine. Cela rendrait Léandre très curieux.

La température de Léandre remonta d’un cran sous les agissements de l’avocate. Il se laissa faire pendant quelques instants. Il n’avait plus du tout le contrôle sur la situation. C’était particulier pour lui… Mais Tyler ne cessait de réagir sous les actions de l’avocate.

A contre-cœur, le juge laissa enfin Jessica se rhabiller pour qu’ils puissent se rendre chez elle. Léandre en profita pour retrouver son costume habituel. Il n’allait pas servir longtemps, mais il n’avait pas envie de quitter son domicile en pyjama.

Dans la voiture, Léandre ne lâcha par l’avocate. Conscient qu’elle était tout de même conductrice, le juge essayait de ne pas trop se montrer insistant. Ses doigts étaient posés sur la cuisse de la rousse et remontaient doucement par moment. Au moment où Jessica lui intima d’être moins timide, Léandre lui répondit doucement « N’oublie pas de regarder la route… ». Bien qu’il n’ait pas surveiller sa consommation, Léandre savait très bien qu’ils avaient bu de l’alcool avant. Il n’avait pas envie que la soirée se finisse en drame.

Lorsqu’ils furent enfin garée, Léandre descendit de la voiture. Il retrouva la conductrice et, sans violence, la coinça contre le véhicule. Tyler vint lui mordre la lèvre inférieure avant de l’embrasser comme un affamé Léandre était totalement désinhibé. Il n’avait pas envie que leur moment s’arrête. Tout les deux, l’un contre l’autre, Tyler était le plus heureux des hommes. Il était amoureux de cette femme, profondément, bien plus qu’il n’avait pu le concevoir. Ce moment le comblait. Léandre se refusait la moindre réflexion. Il ne voulait pas penser, pas réfléchir si Jessica l’aimait, s’il se complaisait dans une relation de mensonge et de manipulation. Les sens saturés, le juge voulait y croire sur l’instant. Se laisser aller à ce profond sentiment de sérénité et de plaisir. C’était quelque chose qui lui manquait dans sa vie.

Il n’aurait fallu que quelques instants pour sortir de l’ascenseur et parcourir le couloir. Mais cela leur demanda bien plus de temps. Jessica le provoquait et Léandre y répondait à chaque fois. Il avait envie d’elle, la désirait et se foutait bien des conséquences. Enfin arrivé dans l’appartement, Léandre suivi les indications gestuelles de l’avocate. Il répondit avant de faire quoi que ce soit « Oui quelque chose qui bouge. ». Jessica connaissait ses gouts. Elle n’aurait pas de mal à trouver quelque chose qui leur conviendrait tout les deux. « Mais avant… » Léandre profitait clairement de sa position. Jessica était plaquée contre le mur, lui était devant lui bloquant tout possibilité de retraite. Taquin et souriant, il poursuivit sa phrase « Laisse-moi retrouver ta peau. » Léandre glissa ses mains sous la robe de l’avocate pour ensuite le lui enlever. Les doigts du juge parcourraient le corps de Jessica. Il avait la sensation de la redécouvrir. Il vint lui chercher un baiser, avant d’enlever ses propres vêtements et de nouveau partager l’entièreté de sa température corporelle avec elle. Léandre attrapa doucement les mains de l’avocate avant de lui intimer « laisse-toi faire… profite. ». Puis le juge glissa sa langue sur la poitrine de la Rousse, il lui relâcha les mains avant de doucement lui mordiller le téton. La main gauche du juge était sur la hanche de Jessica, tandis que la main droite descendait de plus en plus dangereusement. Il lui caressait l’entre jambe mais n’allait plus loin. Tyler voulait juste conserver le désir, que leur jeu continue le plus longtemps possible.

Doucement, Léandre se recula, puis libera l’avocate. C’était chez-elle, c’était son appartement et le juge ne savait pas du tout comment elle s’organisait pour mettre de la musique.

La musique rythmait le temps. Léandre sentait son corps s’échauffait au contact de la Belle. Jessica Keenan était une belle femme. Tyler le sentait bien, à chaque instant où il glissait ses doigts le long de son corps… Ou lorsque la rousse l’attirait à elle. Léandre aimait se laisser prendre dans ses filets. Dans l’instant, Léandre se laissait porter par le moment et par la musique. Et au moment où tout prenait sens, Jessica se déroba à lui. Elle recula, maitresse des désirs de son partenaire. Léandre ne pouvait pas râler. C’était ce qu’il avait fait peu de temps auparavant. Il répondit doucement « Hum, un petit peu oui. » Léandre ne pouvait pas suivre la descente de Jessica. Un verre de plus et il s’arrêterait là. Le juge était quelqu’un qui ne tenait plus l’alcool. Il voulait surtout profiter de cette soirée.

Léandre suivi l’avocate jusqu’au comptoir. Il l’entendait fredonner. Il s’interrogeait, est-ce que Jessica aimait chanter ? Ce n’était pas le cas du juge. Ce dernier fredonnait seulement sous la douche. Le verre d’alcool dans la main, Léandre répondit en écho à Jessica « A nos victoires.». Pourtant ils étaient dans deux camps différents. Ennemi le jour et amant la nuit. Cela convenait au juge. Il ferma son esprit à toute interrogation personnelle. Léandre avait conscience qu’il n’était pas lucide à cet instant. Mais peut-être était-ce aussi pour ça qu’il se sentait aussi bien. Le juge aurait le temps d’être triste plus tard.

Léandre se laissa de nouveau bercer par le moment. Il savait qu’il fallait apprécier ces instants volés. A la question de l’avocate, la réponse parue évidente. Oui. Il voulait quelque chose qui puisse l’anesthésier, lui faire oublier, lui permettre de complétement se détacher de la réalité et de se perdre dans la nuit. C’était un moment très agréable. Une déconnexion presque nécessaire. Léandre le sentait au fonds de sa peau, dans ses tripes, dans toutes les cellules de son corps. A travers son parcours médicale, Léandre avait gouté à ce genre de poison. Il n’avait qu’une envie, c’était celle de se laisser tomber dans ce vice. Pourtant la part la plus rationnelle du juge faisait face. Il était conscient que de se laisser aller de la sorte était l’équivalent de se jeter sous une voiture. C’était faire un pas sur un chemin qu’il ne serait pas capable de rebrousser. Léandre sentait bien à quel point il était sensible à ce genre de chose. La réponse difficilement franche, le juge répondit « Il ne faut pas. ». Puis, il posa son verre et expliqua « Je m’arrête aussi là. ». Il eut un sourire « Je suis bien comme ça. » Son corps ne le supporterait pas. Tyler était de ceux qui avait l’alcool triste. Dans ses moments-là, les barrières qu’il s’était construit s’abaissaient. Il y avait alors toute la mélancolie accrochée à ses os qui ressortait. Léandre n’avait pas besoin de ça. Jessica non plus.

Conscient que son moral était en train de changer, Tyler se rapprocha de l’avocate. Il vient alors lui chuchoter « Je peux faire mieux. » Et sans effet secondaire. Le juge huma la belle avant d’aller lui mordiller l’oreille. Il l’emprisonna de ses bras avant de glisser ses mains sur les cuisses de sa partenaire. Il lui caressa le bas ventre avant de se baisser. Il mit un genou à terre et s’assura de ses propres appuis. Léandre embrassa le pubis de la Belle, puis attentif à ses désirs, il glissa sa langue dans l’antre chaude et humide. Tyler avait envie de sentir Jessica se tordre de plaisir. Il avait envie qu’elle se noie dans ce moment comme il avait envie de le faire lui-même.

Le résultat obtenu, Léandre se releva et vint embrasser l’avocate. Il lui mordilla ensuite l’épaule. Il ferma ensuite les yeux et se laissa aller contre elle. Jessica n’était pas amoureuse de lui et ne le serrait jamais. Le corps contre celui de la Rousse, Léandre se plaça de nouveau face à elle et expliqua « J’ai envie de toi. ». Mais de beaucoup plus qu’il ne pourrait obtenir.

Léandre ferma les yeux, entièrement concentré sur Jessica. Cette femme, il l’aimait. Passer du temps avec elle lui faisait du bien, même si c’était pour finir par se déchirer avec elle. Il aimait lorsqu’elle venait lui caresser la nuque de cette manière. Le geste était particulier. Le juge aurait eu du mal à le décrire, mais ce geste, c’était elle et uniquement elle.

Il lui rendit son baiser, passionné, amoureux. Ses doigts se mirent à caresser l’avocate. Il se laissa guider jusqu’au lit et tomber dans les draps. Confiant, Léandre s’installa confortablement. L’avocate était juste au-dessus de lui. Le désir était là, la Belle pouvait le sentir.

A la question de Jessica, le juge eut un sourire silencieux. Il était alcoolisé, mais toujours conscient des limites qui lui avait imposées l’avocate. Il lui avait déjà tout dit. Mais Jessica ne l’aimait pas et ne l’aimerait jamais. Pourtant à ce moment précis, Keenan avait les mains douces. Cela faisait bien au juge. Il répondit « Tu es parfaite comme ça. » L’avocate avait ses défauts, mais Léandre les aimait aussi. Le brun déplaça ses mains le long des courbes de sa belle, Jessica Keenan était terriblement séduisante. « Quand tu es brute… Mais aussi quand tu te fais plus douce. » Comme maintenant. Si Tyler ne le remarquait pas directement, Jessica avait tendance à beaucoup le griffer et le mordre. De qui laisser de belles traces sur sa peau. Si c’était temporaire, cela avait déjà provoqué plusieurs réflexions de son kiné. Léandre s’en fichait bien. Lui, il était heureux de cette situation.

Tyler ajouta tout de même « Tu avais proposé de faire ça dans ton bureau, ça me plairait beaucoup. » C’était un fantasme. Léandre ne ferait jamais de telles choses dans son propre bureau. La raison était simple, au-delà de toutes conventions, c’était surtout qu’il travaillait avec beaucoup de femmes. Ses subordonnées directes l’étaient. Lié le sexe et le pouvoir était une pente dangereuse, cela le rapprochait de l’homme qu’il ne voulait pas être.

Léandre ramena sa main sur le visage de la Rousse. S’il ne pouvait pas la voir, il pouvait sentir ses expressions. Il demanda, curieux et réellement intéressé « Et toi Jessica ? De quoi as-tu vraiment envie ? » De sexe ? De rien d’autre ? De choses extravagantes ou plus simple ? Léandre était assez clair avec lui-même, mais il ne savait pas ce qu’attendait l’avocate. Leur relation était compliqué, il l’aimait mais il était aussi rare qu’il se soit fait aussi mal au contact de quelqu’un. Tyler savait ce qu’il voulait, mais pas l’avocate. Elle le voulait sans le vouloir réellement, elle l’avait rejeté pour finalement revenir vers lui. Léandre l’aimait trop pour partir, mais il savait aussi qu’il allait finir par devoir le faire pour son propre bien.